Bonnes feuilles : Grandeurs et misères des stars du Net Marc Simoncini : ruiné par la Bourse

Le lendemain de la vente d'i(France), Thierry mon associé m'explique que je vais désormais avoir besoin d'une "vraie banque". Il m'introduit auprès d'un banquier qui me reçoit dans son immense bureau et m'explique : "Monsieur, vous avez gagné 25 millions de francs, il vous faut désormais travailler avec des professionnels !"Je lui fais alors remarquer que j'ai gagné 25 millions d'euros, ça commence bien...


marc simoncini, fondateur d'i(france), de meetic et de sensee.
Marc Simoncini, fondateur d'i(France), de Meetic et de Sensee. © S. de P. Grasset / Christophe Beauregard

Thierry m'explique aussi que nous pouvons nous assurer contre la chute des actions Vivendi dont nous sommes gavés. Nous contactons plusieurs banques qui nous proposent des contrats de couverture. Contre le partage d'une partie de la hausse, les banques nous garantissent en échange une grande partie de la valeur du cours. Parfait, nous mettons notre fortune à l'abri des aléas boursiers. Nous commettons alors notre plus grosse erreur : nous ne signerons jamais ce contrat ! Pour Thierry les semaines de négociation avec Vivendi et la fatigue qui en découle peuvent l'expliquer. En ce qui me concerne je mettrai presque dix ans à considérer que c'était un choix inconscient mais salutaire.

C'est également l'époque où je rencontre un gestionnaire de grandes fortunes. Je le trouve charmant. Depuis quelques mois, mes actions Vivendi dégringolent. Son conseil ? Les conserver. Mieux : il m'explique qu'emprunter de l'argent gagé sur ces titres serait une très bonne opération. [...].

Si, cet été 2003, je ne peux décrocher des cours de Bourse, c'est tout simplement parce que je possède des milliers d'actions Vivendi. i(France) m'a pour beaucoup été payé en actions, le cash a servi à payer les impôts sur la vente. En mars 2000, au moment de la vente, l'action valait 110 euros. Le 14 août 2002, le jour de la première conférence aux analystes de Jean-René Fourtou, successeur de Jean-Marie Messier, elle a dégringolé à 8 euros !

Cet été-là, les déboires de Jean-Marie Messier m'importent peu. La seule chose que je vois, c'est que je suis ruiné : avec une action à 8,92 euros, j'ai mécaniquement plusieurs millions d'euros de dettes, étant donné que mes emprunts sont gagés sur mes actions.

Tout s'enchaîne très vite : les banques qui m'avaient déroulé le tapis rouge trois ans plus tôt ne prennent pas de pincettes. Le lendemain de ce jeudi noir d'août, plusieurs d'entre elles décrochent leur téléphone pour m'informer qu'il va falloir rembourser mes crédits. Au pied du mur, je dois annoncer froidement à ma femme qu'il nous faut vendre notre maison de vacances, pour combler une partie de mes dettes. La chute est d'autant plus difficile qu'elle est inattendue.