Start-up : comment réussir son pivot ? Persévérer ou abandonner ?

L'idée est-elle assez valable pour s'entêter à trouver le bon modèle, ou bien vaut-il mieux abandonner ? La question se pose. Stéphanie Pelaprat, fondatrice et CEO de Restopolitan, a envisagé les deux options. Sa start-up, un système de gestion de réservations pour restaurateurs, avec une plateforme dans les établissements partenaires, semblait pourtant prometteuse. En mai 2010, les plus célèbres investisseurs du Web français (parmi lesquels Xavier Niel, Jacques-Antoine Granjon, Jean-David Blanc ou encore Marc Simoncini) y ont investi un million d'euros. Pourtant, le modèle ne prend pas. "En huit mois, on avait déjà dépensé 800 000 euros, se souvient Stéphanie Pelaprat. Nous nous heurtions à deux problèmes majeurs. D'abord, nous avions commencé par démarcher les meilleures tables parisiennes, sans valider l'idée auprès du mass market des restaurateurs, qui eux n'étaient pas prêts à s'informatiser. Ensuite, il y avait une vraie explosion en B2C sur le thème "bons plans restaurants", mais nous n'y répondions pas. Les consommateurs ne voyaient pas vraiment l'intérêt de réserver en quelques clics plutôt qu'en quelques minutes au téléphone."

Capitaliser sur les acquis : technologie, réseau, savoir-faire...

En juin 2011, Restopolitan n'a plus que deux mois de trésorerie. "On avait deux options. Le dépôt de bilan, ou le lancement d'un nouveau produit. Après avoir travaillé pendant cinq ans comme des dingues, avec une équipe fidèle, on n'avait pas envie d'abandonner. Surtout, on sentait qu'on avait les bons ingrédients pour que ça fonctionne, mais pas le bon modèle." En 48h, Stéphanie Pelaprat prend la décision de lancer un nouveau produit. Elle imagine "la carte qui vous invite au restaurant", un abonnement "un repas acheté, un offert" dans les restaurants participants. Trois mois plus tard, la start-up est enfin rentable.

"Les bons ingrédients" : c'est le signe qu'un pivot est encore possible. "Selon les acquis de l'entreprise, on doit faire le choix de pivoter ou de tout arrêter", souligne Jean-Baptiste Rudelle, CEO de Criteo. "Dans notre cas, notre technologie était très sophistiquée et nous n'avions plus qu'à la rendre commercialement viable."

Rassembler l'équipe

Autre indicatif, et pas des moindres : l'état d'esprit de l'équipe et des investisseurs. "Marc Rougier et moi n'étions pas stressés par l'échec, se rappelle Guillaume Decugis. Nous avons envisagé d'abandonner Goojet et de recréer une nouvelle société. Nous nous sommes demandés avec qui nous voudrions la lancer, et la réponse était : avec la même équipe, les même associés et les même investisseurs. Tous avaient beaucoup appris sur le sujet. Nous avons donc décidé de continuer, en se contentant de pivoter."