Pourquoi il vaut mieux vendre sa startup 20 millions que 200 millions

Pourquoi il vaut mieux vendre sa startup 20 millions que 200 millions Suivez les conseils d'entrepreneurs aguerris : quand il s'agit de lancer sa startup, "less is more".

Il est toujours impressionnant d'apprendre qu'une startup s'est vendue pour plusieurs dizaines de millions de dollars. Mais cela devient véritablement intéressant lorsque l'entreprise est vendue pour plusieurs centaines de millions de dollars.

En tant qu'entrepreneur, comment savoir quelle est la meilleure option ? La plupart estiment qu'une vente "modeste" est la solution à privilégier.

En bref : les startups de moindre valeur mettent moins de temps à se développer et demandent moins de capital pour avancer, ce qui veut dire que les fondateurs possèderont plus de parts de l'entreprise au moment de la vente.

Les acquéreurs se font également de plus en plus rares au fur et à mesure que le prix de votre entreprise augmente. Si vous trouvez quand bien même un acquéreur, l'audit préalable prendra beaucoup de temps et retardera la signature de la vente.

A moins d'avoir fondé une startup digne d'Instagram et de conclure une vente à un milliard en 48 heures, lisez ce qui suit.

Voici quelques exemples :

 Le site d'actualité sportive Bleacher Report a été acheté par Turner Networks pour un peu plus de 200 millions de dollars cinq ans après sa création. Mais étant donné que 40 millions de dollars avaient été levés jusque-là, que les 4 fondateurs avaient été dilués entre 5 et 10%. Chacun d'entre eux n'est reparti qu'avec 10 millions de dollars.

 Arianna Huffington, Ken Lerer et Jonah Peretti ont eux aussi vendu leur startup, le Huffington Post, à AOL six ans après sa création. Leur prix, ambitieux, était de 315 millions de dollars. Chacun disposait d'un pourcentage différent de l'entreprise, et Ken Lerer a reçu beaucoup plus d'argent qu'Arianna Huffington. Selon certaines sources, celle-ci possédait moins de 14% de la startup et est repartie avec environ 18 millions de dollars.

 Mais attention ! Michael Arrington a vendu TechCrunch à AOL pour environ 30 millions de dollars cinq ans après l'avoir fondée. Il possédait soi-disant 80% de l'entreprise au moment de la vente car il n'avait jamais levé de capital-risque. Ce qui veut dire qu'il a obtenu environ 24 millions de dollars avant impôts – soit davantage qu'Arianna Huffington !

 Pour sortir du monde des médias, on peut regarder l'exemple de ThinkNear, une entreprise de TechStars fondée par Eli Portnoy. Elle a été vendue à Scout Advertising pour 22,5 millions de dollars 18 mois après son lancement. Elle avait levé 1,63 million. Au moment de son acquisition, la startup était en possession d'une proposition d'un capital-risqueur qui proposait 4 millions de dollars. Si ThinkNear avait refusé l'offre d'acquisition et choisi l'investissement de série A à la place, la part d'Eli Portnoy aurait été diluée de 25 à 30% supplémentaires.

 Jeff Richards, qui est aujourd'hui un investisseur pour GGV Capital, a essayé les deux options. Très tôt dans sa carrière entrepreneuriale, il a fondé une entreprise estimée à 250 millions de dollars. Cependant il affirme qu'il est reparti les mains vides après la vente. En 2003, il a créé une autre startup, R4. Il l'a vendue deux ans plus tard à VeriSign pour moins de 20 millions de dollars. Cette fois-ci, souligne Jeff Richards, les fondateurs et investisseurs étaient, les uns comme les autres, "ravis" du résultat.

Alors de qui vous inspirerez vous ? Portnoy et Arrington, ou bien Huffington ? Ils s'en sont tous plus ou moins tirés avec la même somme, même si dans les cas de Portnoy et Richards, la vente a pris beaucoup moins de temps.

Ce genre de décision n'est pas à prendre à la légère. Michael Arrington affirme qu'il a failli accepter du capital-risque pour financer TechCrunch à quatre reprises. Au début, il n'avait pas levé de capital simplement parce que l'opportunité ne s'était pas présentée. En 2005, les investisseurs étaient peu enclins à sortir leur carnet de chèques.

"Lorsque j'ai lancé ma première entreprise, Achex, nous avons levé 18 millions de dollars de capital-risque en 2000 auprès du fonds de capital-risque DFJ. La startup a ensuite été vendue pour 32 millions de dollars, mais à cause de la préférence des acheteurs pour la liquidité, les fondateurs n'ont presque rien récupéré, seulement quelques centaines de milliers de dollars pour que la transaction soit effective."

Arrington précise qu'il avait levé autant d'argent car il était presque impossible de construire ce genre d'entreprise sans un bon capital de base. "A l'époque, il fallait acheter des bases de données chez Oracle, il n'y avait pas de solutions d'hébergement comme celles qui sont maintenant offertes par Amazon et Google... Aujourd'hui, la plupart des startups n'ont pas à assumer de coût d'infrastructure s'élevant à plusieurs millions de dollars pour pouvoir lancer leur service. Elles n'ont plus besoin d'autant de capital pour pouvoir accéder au marché."

Lever beaucoup d'argent a néanmoins ses avantages. Cela peut vous permettre de surpasser vos concurrents, nombreux lors des premières étapes de votre développement (GroupMe a dû faire face à Fast Society avant d'être rachetée par Skype, Foursquare était confrontée à Gowalla, etc). Cela peut aussi faire la différence lors de l'embauche de votre personnel.

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Michael Arrington (à gauche) a gagné plus d'argent qu'Arianna Huffington (au centre) malgré des sorties respectives de 30 et 315 millions de dollars. © Business Insider

Il est plus facile de convaincre des ingénieurs et autres talents d'intégrer votre équipe lorsque votre entreprise est attachée à des investisseurs réputés et que vous pouvez par conséquent offrir des salaires attractifs. Arrington se souvient à quel point il a été difficile de convaincre son associée, Heather Harde, de quitter News Corp, où son salaire s'élevait à 1 million de dollars. Tout ce qu'il était en mesure de lui offrir était une base de 150 000 dollars et des stock-options.

Michael Arrington se demande parfois jusqu'où il aurait pu mener TechCrunch s'il avait accepté des financements extérieurs. "Parfois, je me dis que nous aurions pu avoir une croissance plus rapide et nous développer d'une autre manière si nous avions levé du capital et avions été plus dépensiers."

Eli Portnoy, lui, voyait plus d'avantages à rester modeste et vendre sa startup tôt plutôt que de prendre le risque le lever beaucoup de fonds.

Il avait une famille à nourrir, et pas de filet de sécurité sur lequel amortir sa chute. Une acquisition aurait rendu sa situation financière beaucoup plus confortable. En outre, un des membres du conseil d'administration avait auparavant créé une entreprise qui avait rassemblé d'importants financements pour finir par être rachetée. Bien que son entreprise ait bénéficié d'une sortie 30 fois plus conséquente que celle de Portnoy, les deux hommes ont récupéré à peu près la même somme.

Enfin, Eli Portnoy savait pertinemment que la plupart des entrepreneurs n'ont droit qu'à une seule chance pour lancer leur startup. S'ils échouent, leur aventure s'arrête net. Cependant, s'ils arrivent à trouver une sortie, davantage d'opportunités se présenteront à eux par la suite. Les investisseurs privilégient en effet les entrepreneurs expérimentés. Et se construire une fortune personnelle implique parfois d'attendre la seconde tentative pour être vraiment ambitieux. Il est toutefois important de noter que même si de modestes sorties peuvent être avantageuses pour les entrepreneurs, elles ne le sont pas toujours pour les investisseurs.

"En tant que capital-risqueur, j'investis désormais dans des entreprises qui visent des résultats supérieurs à 200 millions de dollars, mais ce modèle ne convient pas forcément à tous les entrepreneurs ou toutes les entreprises," explique Jeff Richards.

Arrington, lui aussi entrepreneur devenu investisseur, fait référence à une startup que son fonds CrunchFund avait financé et qui s'était faite racheter prématurément, contrairement aux souhaits des investisseurs.

Une parenthèse : lorsque les sorties de l'investisseur et de l'entrepreneur ne coïncident pas, les investisseurs proposent généralement aux fondateurs de récupérer une partie de l'argent. Ainsi, si l'entreprise échoue, les fondateurs disposeront d'un "coussin de sécurité" financier. C'est la méthode qu'ont adopté les fondateurs de Snapchat ; chacun d'entre eux a reçu 10 millions de dollars en plus des 60 millions levés par leur startup.

Bien que Michael Arrington ne s'imagine pas créer une nouvelle entreprise, il affirme qu'il choisirait toujours de lever aussi peu d'argent que possible : "De manière générale, je n'aurais pas recours au capital-risque à moins d'en avoir absolument besoin. J'en lèverais au moment opportun en me basant sur les conditions du marché pour que la dilution soit la plus faible possible. Et je dépenserais ce capital-risque de la même façon que je dépense mon propre argent en affaires – très parcimonieusement."

Jonah Peretti, co-fondateur du Huffington Post et aujourd'hui PDG de BuzzFeed, autre site très en vogue, offre des conseils bien différents : "selon moi, vous ne devriez pas lancer une start-up pour des raisons financières," écrit-il dans un mail à Business Insider. "La plupart des startups échouent et il y a d'autres moyens plus évidents et moins risqués de gagner de l'argent... Et si votre entreprise a du succès, l'argent affluera de la même manière dans une entreprise opulente que dans une entreprise aux ressources plus modestes. Mike Arrington et Arianna Huffington ont tous deux très bien réussi financièrement parlant. Il va de même pour Mark Zuckerberg et Kevin Systrom. Ils peuvent se payer tous les yachts qu'ils souhaitent pour faire du ski nautique !"

Article d'Alyson Shontell. Traduction par Joséphine Dennery, JDN.

Voir l'article original : Why It's Better To Sell A Startup For $20 Million Instead of $200 Million