Lancé il y a une vingtaine d'années sous l'impulsion
de la Commission européenne, l'EBN (European Business Network) est un réseau
d'incubateurs destinés aux entreprises innovantes. La structure s'appuie
sur 200 BIC (Business Innovation Centers) répartis dans les différents pays
de la Communauté européenne. Destiné à l'origine au soutien des projets
liés aux process industriels, l'EBN s'est ouvert dans les années 90 au secteur
de la high-tech. Parmi les quelques 10.000 entreprises qu'il accompagne,
le réseau compte aujourd'hui plus de 40 % de projets IT. Philippe Vanrie,
directeur général de l'EBN et intervenant dans le cadre de l'IVCS de Sophia-Antipolis,
explique le fonctionnement de ce réseau européen et dresse un premier bilan
2002 sur le secteur de l'incubation.
JDNet
: Comment est assuré le financement de l'EBN et quels services apportez-vous
aux entreprises ?
Philippe Vanrie : Notre financement
dépend à 75 % des membres de notre réseau. Il s'agit de groupes, d'acteurs
financiers et d'agences publiques ou parapubliques qui financent notre
réseau en échange d'un service de veille stratégique et d'actions de lobbying
communautaire. Nous comptons parmi nos membres des structures comme BT,
le CEA, EDF-GDF, la Banque Populaire ou le Cern. Notre réseau s'appuie
en aval sur des incubateurs locaux qui apportent un soutien logistique
et managérial aux entreprises innovantes. Grâce à notre réseau et à nos
partenaires, nous sommes capables de tisser des relations industrielles
et financières pour ces entreprises. Certains de nos incubateurs sont
en outre dotés d'un fond de 300.000 à 500.000 euros pour apporter le premier
coup de pouce en matière d'investissement.
Quelle
analyse portez-vous sur le ralentissement du capital-risque ?
Je tiens d'abord à dire qu'à l'EBN,
nous ressentons de façon atténuée ce ralentissement grâce à la diversité
des entreprises que nous accompagnons : 25 % des projets que nous soutenons
sont encore liés à l'industrie. Le ralentissement actuel des investissements
peut être perçu comme une crise, mais je pense qu'il s'agit surtout de
la fin d'une parenthèse. Entre 1995 et 2000, nous avons connu un mouvement
anormal sur le capital-risque avec la prise en main totale d'une chaîne
d'investissement par des acteurs privés. Cette bulle a explosé et si l'on
analyse les indicateurs actuels, on s'aperçoit que 2002 s'inscrit en fait
dans la droite lignée de 1995, comme si les années suivantes n'avaient
pas existé pour le capital-risque. Cela représente un coup de frein énorme
mais aussi, et surtout, un retour aux sources.
Mais
la période 1995-2000 a apporté de nouveaux mécanismes de financement qu'il
va falloir compenser d'une manière ou d'une autre...
C'est vrai
que cette période a créé de nouveaux possibles en matière de capital-risque.
Et pour cette raison, je crois que 2003 va être l'année de la montée en
puissance du public et du parapublic dans la chaîne de financement. Il
faut encore trouver les leviers et les mécanismes pour permettre aux acteurs
publics de prendre part dans le capital-risque. Mais aujourd'hui, tout
le monde souhaite ce mouvement. Les plus grands acteurs du capital-risque
européen sont les premiers à attendre ce signal afin de réguler et de
temporiser le marché. La conséquence directe de cette montée en puissance
du public sera un rallongement de la période d'investissement. Entre 1995
et 2000, les capitaux-risqueurs travaillaient sur des périodes d'investissement
de deux à trois ans. Nous allons aujourd'hui vers des périodes beaucoup
plus longues.
[Ludovic Desautez, JDNet]