Figure célèbre du journalisme américain,
Jimmy Guterman a collaboré avec d'innombrables magazines, de Rolling
Stone (c'est un spécialiste du rock) à Wired (il est féru
de nouvelles technologies). Il affirme s'être toujours intéressé
"aux sujets où culture et technologie se rencontrent"
et s'est donc penché dès le début des années
90 sur l'Internet, "là, justement, où cette collision
promettait d'être la plus explosive".
Nouveau
chroniqueur de Business 2.0, Jimmy Guterman vient de clore, au bout d'un
an, l'aventure de la newsletter d'informations e-business Media Unspun,
l'une des plus pertinentes, irrévérencieuses et originales
jamais publiées. Réalisée par l'équipe qui
produisait déjà la newsletter Media Grok pour l'Industry
Standard, elle ambitionnait certes de suivre l'actualité, mais
aussi "de montrer comment les différents médias interpètent
une même information de différentes façons".
Un pari exigeant, éditorialement réussi mais qui n'a pas
tenu ses promesses économiques (le nombre d'abonnés - 50
dollars par an- est resté trop faible). Dans une interview réalisée
par mail, Jimmy Guterman revient sur cet épisode et les leçons
qu'il en tire.
JDNet
: Qu'avez-vous essayé de faire avec Media Unspun... et pourquoi
avez-vous échoué?
Jimmy Guterman. Dans le dernier
numéro de Media Grok, j'avais invité nos lecteurs à
m'envoyer leur adresse mail pour éventuellement rester en contact.
Comme j'ai reçu plusieurs milliers de réponses, je me suis
dit qu'il y avait peut-être là un business. Nous avions un
excellent produit, correspondant à une vraie demande, donc nous
avons lancé Unspun, qui informait et divertissait en même
temps. A titre personnel, je suis heureux d'avoir d'avoir pu payer quelques
journalistes de qualité pendant un an alors qu'un grand nombre
de bon journalistes ne gagne pas un sou. Mais
l'aspect financier de notre newsletter n'a pas été à
la hauteur - c'est un vrai problème, je le reconnais -, c'est pourquoi
nous avons dû fermer. C'est un business, pas un hobby. Nous savions
que lancer une publication dédiée au business des nouvelle
stechnologies alors que les technologies et les médias sont en
pleine récession serait rude, mais pourquoi ne pas essayer? Et
nous devions démarrer le plus vite possible après l'arrêt
de Media Grok, sans attendre six mois ou six ans. Nos lecteurs voulaient
continuer à nous lire et ne nous ont pas dit d'attendre que le
Nasdaq repasse au-dessus des 4.000 points...
Les
médias en ligne ont-ils un avenir?
Sur Internet, les éditeurs indépendants
n'ont d'autre alternative que s'unir ou renoncer à créer
un business. Mais si les voix indépendantes veulent continuer à
se faire entendre, nous devons nous regrouper sous forme de réseau,
préserver notre discours original tout en partageant un modèle
économique commun. Le seul problème, c'est que personne
n'a encore trouvé comment y parvenir, y compris moi-même.
Les
weblogs sont-ils une solution d'avenir et comment les rendre viables?
J'adore la liberté et la diverisité
des blogs, mais nous n'en étions pas un, m^me si nous n'en étions
pas un. Un weblog sert d'interface entre un individu et le Web, sans aucune
intervention extérieure. A Media Unspun, nous avions des rédacteurs
et des éditeurs, tous collaborant pour créer un produit
que nous voulions à la fois professionnel, utile et divertissant.
Ceci dit, je pense que les weblogs de signatures connues comme ceux que
les médias américains mettent actuellement en place ne marcheront
pas. Les weblogs journalistiques n'ont aucun sens s'ils ne servent qu'à
conforter l'ego d'un auteur ou être une version branchée
d'une chronique traditionnelle.
[François Bourboulon, JDNet]