Trois questions
à Philippe Coste (Idate) : "Le haut débit, c'est le vrai défi stratégique
des FAI"
Par le Journal
du Net (Benchmark Group)
URL : http://www.journaldunet.com/0304/030407idatecoste.shtml
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Vendredi 4 avril 2003
Malgré une conjoncture défavorable,
les télécommunications restent l'un des pans d'activités
les plus dynamiques, tous secteurs industriels confondus. En tant que coordinateur
du rapport DigiWorld 2003, l'atlas annuel du monde des télécoms
édité par l'Idate, Philippe Coste bénéficie
d'un poste d'observation privilégié de l'évolution
du secteur téléphonie et Internet. Il apporte des éclaircissements
sur les enjeux actuels des fournisseurs d'accès Internet mondiaux.
JDNet.
Comment évolue la dynamique du secteur des télécommunications
dans la conjoncture actuelle ?
Philippe Coste. Dans le cadre de la publication du rapport DigiWorld
2003, nous avons arrêté nos analyses et nos études fin
février. Nous avons intégré des perspectives conjoncturelles
de 2003, y compris les risques de guerre. En l'état actuel du conflit,
il est très difficile d'analyser les répercussions macro-économiques.
Nous savions déjà que les perspectives globales de croissance
pour 2003, y compris dans les télécoms, seraient moroses.
En Europe, la croissance des services télécoms n'est pas époustouflante
(+ 6%). C'est un ralentissement sensible par rapport aux années précédentes
mais d'autres secteurs industriels seraient ravis d'afficher un pareil taux.
Globalement,
les principaux moteurs de croissance du secteur des télécoms
sont la téléphonie mobile et l'Internet. En Europe, on observe
un taux de croissance de 11 % pour les activités mobiles. En
France, sur l'année 2002, le marché du mobile a dépassé
celui du fixe en valeur. Le
secteur des télécoms, que l'on peut diviser en deux grands
marchés (entreprises et ménages) a sa propre dynamique. Pour
la partie professionnelle, les opérateurs télécoms,
qui sont des clients directs de la filière équipementiers,
sont dans une phase de réduction très forte de leurs investissements
en raison de plusieurs facteurs : surcapacité réseau existante,
restructurations profondes de leurs activités et rétablissement
de leurs équilibres financiers. Côté entreprise, la
demande de services télécom est molle.
Quelles
sont les prochaines grandes étapes pour les principaux groupes
FAI européens ?
En 2002, les fondamentaux financiers se sont sensiblement améliorés.
Les trois grands Internet
Service Providers européens, Wanadoo, Tiscali et T-Online,
sont sur la voie de la profitabilité en 2003. Le vrai défi
stratégique est le haut débit. Wanadoo et T-Online y sont
d'ores et déjà impliqués.
Le secteur a déjà connu une très forte concentration.
Le processus de consolidation devrait continuer car il existe encore une
myriade d'ISP de petite ou moyenne taille dont les modèles économiques
restent fragiles. Les opérations de croissance externe ont été
quelque peu freinées ces derniers temps car les grands acteurs
ont donné la priorité à la rentabilité.
Comment
évolue la problématiques haut débit aux Etats-Unis
?
C'est également un sujet très chaud. Jusqu'ici, l'accès
Internet était dominé par des spécialistes comme
AOL, MSN ou Earthlink. Les modèles économiques de ces FAI
ne prévoyaient pas d'être opérateurs télécoms.
Ils achètent de la capacité télécom à
des opérateurs. Aujourd'hui, le haut débit se développe
via le câble ou via les offres DSL que les opérateurs télécoms
mettent eux-mêmes en place. L'enjeu pour les grands acteurs ISP
américains est d'accompagner leurs clients bas débit vers
des offres haut débit. Mais l'exercice est plus délicat
lorsqu'on ne contrôle pas l'ensemble de la chaîne d'accès.
Une réponse apparaît à travers une politique structurante
que nous avons baptisé "buy your own access" : un utilisateur
prend un abonnement haut débit à un câblo-opérateur
ou à un baby-bell local. Mais la dimension contenu est renforcée
avec des services premiums offerts sur le portail d'accès en guise
de distinction (par exemple la nouvelle offre "Yahoo Platinium").
MSN a testé ce concept fin 2002 aux Etats-Unis. AOL et Yahoo semblent
s'engager sur la même voie. C'est un mouvement intéressant
à suivre qui pourrait constituer les premiers pas d'une véritable
offre de contenus payants sur Internet.
Cette stratégie
de "buy your own access" pourrait être transposée
en Europe. Ce sera peut-être le début d'un cercle vertueux
d'offres de contenus Internet attractifs et une carte à jouer pour
des acteurs portails comme Yahoo Europe ou MSN Europe qui ne disposent
pas d'accès direct à des réseaux télécoms.
[Philippe Guerrier, JDNet]
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