JDNet.
Les chiffres trimestriels d'Amazon dénotent deux tendances :
un contrôle des pertes et un tassement de l'activité. Comment
expliquez-vous ce double mouvement ?
Georges Aoun. Ces résultats démontrent tout d'abord
que nous allons vers la profitabilité. Par exemple, sur les produits
culturels, nos marges sont aujourd'hui à 10% après être
passées, ces dernières années, par 2, 4 puis 6%.
Notre maîtrise des coûts apparaît donc de plus en plus
fine, notamment grâce à notre plate-forme. Aujourd'hui, les
frais de distribution ne représentent ainsi plus que 13% de nos
dépenses. C'est la première fois depuis 1997 que nous dégageons
également un cash flow positif de 3 millions de dollars. Quant
au ralentissement du chiffre d'affaires, il était prévu
et reflète avant tout une conjoncture économique générale
avec le ralentissement de l'activité aux Etats-Unis.
En
terme de ventilation
sur le chiffre d'affaires,
que représentent les produits culturels et les activités
à l'international ?
Les produits culturels au sens large couvrent environ 70% de notre chiffre
d'affaires mondial. Sur
les 668 millions de dollars de chiffre d'affaires que nous réalisons
au deuxième trimestre, 168 millions proviennent de l'international.
128 millions de dollars sont réalisés par les différentes
filiales internationales d'Amazon et 60 millions correspondent à
des activités d'export depuis le site américain.
Combien
de clients affiche aujourd'hui Amazon ?
Sur les 12 derniers mois, nous dénombrons au niveau mondial 21
millions de clients actifs. Au total, nous avons
35 millions de clients dont 7 millions à l'international. Aujourd'hui,
notre rythme d'acquisition est d'environ 1 million de clients supplémentaires
par mois. Nous estimons, sur le marché du livre, détenir
5% de parts de marché.
Comment
s'articule l'accord que viennent de signer Amazon et AOL Time Warner ?
Cet accord fonctionne dans les deux sens. Tout d'abord, AOL Time Warner
nous apporte 100 millions de dollars et se retrouve ainsi à hauteur
de 2% dans le capital. Dans l'autre sens, Amazon va apporter aux activités
shopping d'AOL Time Warner son expertise technologique en matière
de recherche et de personnalisation. Il
s'agit d'une licence d'exploitation qui devrait aboutir aux premières
réalisations concrètes au quatrième trimestre 2002.
En revanche, l'accord prévoit que chaque société
garde ses propres clients : il n'y aura pas de mélange des
bases, ni de marketing croisé. Parallèlement, Amazon va
intégrer sur ses sites les produits AOL Time Warner, qu'il s'agisse
d'accès Internet ou d'abonnements à des magazines.
Mais
pour un distributeur de produits culturels comme Amazon, n'est-ce pas
un risque de se rapprocher d'une des majors ?
La prise de participation d'AOL Time Warner est minime. Notre offre restera
très large et ne sera en aucun cas une destination unique vers
tels produits. Cet accord ne nous ferme aucune porte.
Concernant
Amazon.fr, le magazine "Livres Hebdo", daté du 6 juillet
dernier, évoquait une possible fermeture ou un rattachement opérationnel
à la branche britannique d'Amazon. Quels sont vos commentaires
sur ces deux possibilités ?
Je n'ai pas pour habitude de commenter les rumeurs. Mais dans le cas présent,
j'apporte un démenti formel. Notre centre de distribution en France,
près d'Orléans, est notre pièce maîtresse sur
lequel nous avons effectué d'importants investissements. En outre,
Amazon.fr n'a pas que des activités centrées sur la France
et couvre bon nombre de pays francophones et de pays sensibles à
la culture française. Depuis son lancement, Amazon.fr a vendu dans
168 pays différents.
Néanmoins,
la fermeture récente de Bol.fr démontre que les marges de
manoeuvre sont plutôt réduites entre le poids historique
de la Fnac et la force de frappe d'Alapage/Wanadoo...
Le constat majeur, c'est surtout que le marché français
démarre plus lentement que prévu. Je ferai d'ailleurs l'analogie
avec le marché du téléphone portable sur lequel la
France a connu également un retard à l'allumage avant de
largement se mettre à niveau. Notre force réside surtout
dans le savoir faire acquis depuis 1997 sur différents pays. Notre
plate-forme nous permet aujourd'hui de gérer des volumes importants
avec une qualité de service et une maîtrise des coûts.
C'est un avantage concurrentiel très fort.
Cela
signifie-t-il que la bataille de l'e-commerce culturel ne se fera pas
sur le prix ?
Ce qui se passe actuellement aux Etats-Unis est très intéressant.
Nous y avons lancé il y a 6 mois un service, baptisé "Amazon
at used", proposant des livres d'occasion à la vente. Ce service
représente déjà plus de 10% des volumes que nous
écoulons sur les livres et a enregistré plus d'un million
de clients. Nous étudions la possibilité de décliner
ce concept en Europe. La guerre des prix est donc peut-être valable
dans une phase de conquête mais ce sont désormais les services
qui vont devenir les éléments moteurs. Et dans ce domaine,
il y a une multitude de champs à explorer. Nous sommes encore loin
d'avoir compris l'ensemble des modèles.
Depuis
le début de l'année, les effectifs France ont connu certains
départs, à l'image de votre prédecesseur Denis Terrien.
Quelle est la situation actuelle ?
Le départ de Denis Terrien était avant tout un choix personnel.
Comme dans n'importe quelle société, nous avons un turn-over
avec des départs et des arrivées. Mais disons qu'aujourd'hui
nous sommes plutôt dans une phase de stabilisation sur les effectifs.