JDNet.
L'administration en ligne en 2005, c'est un projet réalisable ?
Gabrielle Gauthey.
C'est un objectif ambitieux à la fois européen qui s'inscrit
dans un cadre européen (programme e-Europe) et français
: un comité interministériel de la réforme de l'Etat
du 15 novembre 2001 s'est fixé comme objectif de mettre en ligne
la totalité des procédures administratives en ligne d'ici
2005. Dans ce cadre, la CDC et la Documentation Française (en charge
du portail de l'administration en ligne Service-Public.fr) ont été
mandatées pour gérer l'intégration des outils de
ce portail sur les sites des collectivités locales. D'où
la création de la déclinaison Service-Public Local [NDLR
: qui permet aux administrateurs d'implémenter
sur des sites de collectivités locales une brique de services administratifs
en ligne tirées du portail Service-Public.fr.]
Quels
sont vos objectifs ?
Les premiers adhérents sont les collectivités
locales qui ont déjà fait un effort de sensibilisation vis-à-vis
des NTIC : Parthenay, Niort, Vandoeuvre.... La Ville de Paris a également
pris l'outil Service-Public Local en test. Nous avons une cinquantaine
de partenaires qui demandent à tester le service. De notre côté,
nous nous sommes fixés entre 200 et 300 adhérents en 2003.
Quelles
sont les ambitions de la CDC autour de son portail Localtis.fr ?
C'est une initiative que nous avons lancée en juin
et qui fait suite au Journal en Ligne des collectivités locales
(élus, fonctionnaires territoriales, acteurs du développement
local), initié en 1997. C'est un portail d'information et d'alertes
juridiques (23 rubriques avec 30 partenaires) qui traite de thématiques
comme le logement, l'urbanisme, le sport, les finances, les ressources
humaines... Le but est d'équiper les Intranet des collectivités
locales. Nous avons déjà 200 collectivités abonnés.
Parallèlement,
le déploiement d'espaces multimédia Cyber-base [NDLR : d'ici
2004, 400 espaces publics numériques Cyber-Base devraient être ouverts
en France. Une mission à laquelle la Caisse des dépôts entend consacrer
15 millions d'euros], lancées en 2001, continue-t-il ?
Oui. Nous aurons une trentaine d'espaces NTIC ouverts en
France. 200 autres contrats sont dans les tuyaux.
Vos
travaux portent-ils aussi sur la mise en place de places de marchés
inter-administrations ou administrations -fournisseurs ?
Le 19 novembre, dans le cadre du Salon des maires et des
collectivités locales, nous allons présenter une place de marché
de dématérialisation des achats publics. C'est un projet
sur lequel nous travaillons depuis deux ans en partenariat avec France
Télécom, Dexia-Crédit Local et le Groupe Moniteur. Ce projet, qui va s'appuyer
sur une société commune, est dédié à
l'aide à la gestion de l'achat public. Jusqu'ici, nous avions un
statut de groupement (nom de code : Gael, pour groupe d'achats en ligne).
Comment
établissez-vous des liens avec les 36.000 communes de France pour
les sensibiliser aux NTIC ?
Nous sommes très proches des collectivités
locales compte tenu de notre statut d'investisseur public. Nous avons
des tactiques différentes pour approcher les collectivités
locales en fonction de leur taille. Tout d'abord, la CDC dispose d'un
réseau de 26 directions régionales. Nous nous inscrivons
dans les programme d'intérêt général TIC par
mandat du Comité interministériel d'aménagement et de développement du
territoire (CIADT) de Limoges de juillet 2001, qui nous permet de lancer
des projets d'infrastructures haut débit. D'autres relais TIC apparaissent
comme Susinet Saem (une société anonyme d'économie mixte pour le
développement des TIC à Paris) ou Arantis (Agence des technologies
de l'Information en région Poitou-Charentes).
Comment
peut-on mesurer la pénétration des TIC dans les collectivités
locales ?
Ce sont généralement les collectivités
importantes qui s'investissent dans ce type de projet et moins les communes
de 500 à 1.000 habitants. Lorsque j'ai pris mes fonctions en 2000,
nous avions fait une étude sur le taux d'équipement Internet-Intranet
dans les collectivités locales. Nous nous sommes rendus compte
qu'elles étaient loin derrière les entreprises du secteur
privé. Les collectivités françaises étaient
également en retard vis-à-vis de leurs homologues européennes,
notamment par rapport aux länder allemand ou aux régions italiennes.
Mais cela change assez vite, compte tenu du développement important
des intranets au sein des conseils généraux et grandes métropoles.
On voit également apparaître des Extranets départementaux
dans la Vienne, la Manche et le Finistère. C'est le conseil général
qui prend en charge l'équipement des petites communes.
Quels
freins rencontrez-vous pour intéresser les collectivités
aux NTIC ?
Ils
proviennent essentiellement des tiraillements politiques entre les pôles
de décision des grandes villes, des départements et des
régions. Un comité de pilotage d'un projet de développement
du territoire bien structuré permet de travailler efficacement.
Autre frein : le manque de sensibilité des élus. Nous organisons
des voyages d'élus à l'étranger pour leur montrer
des exemples d'administration en ligne. Il y a aussi des freins plus opérationnels
comme le manque d'ingénierie et de compétences techniques,
au-delà du manque d'argent. A la décharge des collectivités
locales, il est vrai qu'elles ne disposaient pas de moyens de développement
des activités télécoms.
Quels types de collectivités s'impliquent le plus dans les NTIC
?
On constate que les départements et les grandes
villes sont très actives. Et au-dessus, une cohérence régionale
est nécessaire à gérer. Cela peut se mesurer aussi
par l'irrigation de l'accès haut débit sur un territoire
déterminé. La CDC participe au lancement de 139 projets
d'infrastructures haut débit, qui concernent 15 régions,
44 départements et 45 intercommunalités. Si l'on dresse
une cartographie, on se rend compte que le quart Sud-Ouest est la zone
plus active.
Ces
projets concernent-ils des zones géographiques où l'ADSL
ne passe pas ?
Nous avons contribué à quelques expérimentations
satellite dans ce sens. Nous souhaitons ne pas opposer les zones rurales
aux zones urbaines dans le domaine du haut débit. L'un des objectifs
est de faire parvenir du haut débit sur l'ensemble du territoire
français à un tarif raisonnable. Il faut être patient
car la mise en place de ce type de réseaux nécessite 12
à 18 mois.
Pour
quelles raisons les collectivités locales s'impliquent-elles dans
des projets d'accès haut débit ?
Il y a besoin d'argent public pour faire des infrastructures.
L'opérateur historique demande aux collectivités de subventionner
le déploiement d'un réseau en fibre optique pour optimiser
les performances d'un répartiteur en charge de diffuser l'ADSL.
Notre modèle local tourne plutôt autour de gestionnaires
d'infrastructure neutres et ouverts à l'ensemble des opérateurs
et fournisseurs de services. Nous regardons différentes modes d'accès
haut débit - satellite, wi-fi, etc - et la mutualisation de la
desserte et la collecte.
Quels
modèles économiques faut-il adopter pour viabiliser l'exploitation
de ces infrastructures haut débit ?
Au préalable, il faudrait mieux se servir du levier
des subventions européennes comme les fonds Feder. Plus d'un tiers
de ce que l'on a chiffré autour des infrastructures TIC pourrait
être financé par des fonds Feder. Deuxième point,
pour rendre l'exploitation des infrastructures viable, nous prônons
un partenariat "public-privé" avec des responsabilités
et des risques partagés. Dans ce sens, nous avons signé
un accord avec LD Câble. Et nous venons d'inaugurer le Grand Toulouse,
un projet de réseau de fibre optique réunissant les groupes
Vinci, Sirti et CDC [NDLR
: Il s'agit d'un contrat d'affermage de dix ans avec la nouvelle société
Garonne Networks, détenue à 40% par Vinci Networks, 30%
par la CDC et 30% par le groupe italien Sirti. L'objectif est d'exploiter
un réseau de télécom à haut débit de
80 kilomètres de fibre optique d'un coût de 6,4 millions
d'euros.]