JDNet. Il y a quatre
ans, vous lanciez fromages.com. En 2000, vous annonciez un chiffre d'affaires
de 2,5 millions de francs et un bilan positif. Depuis quand enregistrez-vous
de bons résultats ?
Marc Refabert.
En terme d'exploitation pure, la société est équilibrée depuis octobre-novembre
1998. Comme je n'ai jamais fait appel à de l'actionnariat privé, notre
objectif était dès le départ de gagner de l'argent au plus vite. Nous
avons opté pour une structure légère et réactive. La conception du site
a demandé 1 million de francs et nous sommes une petite équipe, 5 personnes.
Le site a été conçu pour être simple, clair et pratique. Au cours de la
première année d'exercice, nous avons perdu beaucoup d'argent. Le chiffre
d'affaires de la société était de 70 000 francs pour 400 000
francs de pertes. Mais en 1998, nous avons redressé la barre avec 700 000
francs de chiffre d'affaires. Et en 2000, nous avons fait un bénéfice
de 35 000 francs, soit 1,4% de notre chiffre d'affaires avant impôts.
Quelle a été votre
méthode pour atteindre ces résultats?
Nous sommes avant tout
une société de services avant d'être des fromagers. Notre métier est de
faire vivre un site et de créer du trafic. La fidélisation de notre clientèle
est très importante. 6 clients sur 10 recommandent tous les 4 mois. Ensuite,
nous veillons tout particulièrement à la qualité des produits et de la
logistique. Nous n'avons pas de stock. Nous travaillons en temps réel
avec notre fournisseur de fromages, Pascal Beillevaire, fromager-affineur
en Loire-Atlantique et avec notre transporteur, Fedex. Un système qui
nous permet de livrer 85 % des commandes en 24 heures partout dans
le monde, sauf au Japon, où la livraison s'effectue en 36 heures. Mais
nous travaillons à raccourcir les délais. Fedex n'est pas le prestataire
le moins cher du marché, mais il nous permet de respecter nos engagements
de rapidité. Aujourd'hui, notre logistique est parfaitement rodée.
Vous parlez de fidélisation
et de faire vivre votre site. Quels sont les dispositifs que vous avez
mis en place et depuis quand ?
Aujourd'hui, tout le
monde parle de fidélisation comme si l'on découvrait ces outils. La fidélisation,
c'est du bon sens. Chez nous, la mise en place d'une newsletter date de
1998. Aujourd'hui, nous avons 5 000 abonnés à cette lettre qui n'est
pas, je le précise, commerciale. Son contenu met en avant les accords
mets et vins, détaille des recettes, parle des produits... Elle est avant
tout informative et touche très peu de nos clients. 70% des abonnés ne
sont pas des clients. Il y a parmi eux pas mal de professionnels. L'information
autour des produits est pour nous actuellement aussi importante que la
partie commerciale. Chez nous, la rubrique le "Rendez-vous des amateurs",
entièrement dédiée au rédactionnel, est celle qui est le plus visitée.
Aussi, si 30 pages sont dédiés au commerce, 250 sont du contenu que nous
réactualisons très régulièrement.
Est-ce que le fait
de vous être positionné d'emblée sur le marché international est
pour vous un des facteurs important dans votre situation économique actuelle
?
Très certainement.
Aujourd'hui, nous ne sommes pas tributaires du marché français et de son
développement. 99% de notre chiffre d'affaires est réalisé à l'export.
Les Etats-Unis représentent 70% de celui-ci, l'Europe 15%, et l'Asie ainsi
que le reste du monde, 15%. En Europe, l'Italie est d'ailleurs un marché
surprenant et assez important. Ensuite, deux autres éléments on joué en
notre faveur. Nous avons été les premier à entrer sur ce marché et nous
avons ciblé une clientèle susceptible d'acheter ces produits sur Internet.
Si quelques uns de nos 4 000 clients sont français, la grosse majorité
sont étrangers. Nos prix qui incluent le coût de la logistique plus nos
marges, sont très élevés pour le marché français. Par contre, ils sont
dans la moyenne des prix qui se pratiquent à l'étranger.
Pensez-vous que le
modèle des pure players à un avenir sur Internet ?
J'ai toujours dit qu'Internet
n'était pas un Eldorado. Aujourd'hui, encore moins qu'hier. Les start-up
comme la notre seront peu nombreuses au final. Le ticket d'entrée est
tellement élevé à l'heure actuelle que ce modèle est difficilement tenable.
L'avenir est aux brick and mortar et à la grande distribution. Ces grands
groupes peuvent se permettre de perdre de l'argent. Nous, non.
Que pensez-vous de
l'opportunité que représente les galeries marchandes pour les marchands
ou les comparateurs de prix ?
Je n'ai jamais cru
au modèle des galeries marchandes pour la simple et bonne raison que sur
Internet, il n'y a ni notion physique, ni notion de lieu. Il n'y a pas
de problème de parking sur Internet. C'est sur cette notion et sur le
principe du gain de temps associé que les galeries marchandes se sont
créées à la périphérie des villes dans le commerce traditionnel. Sur Internet,
une fois que vous avez trouvé ce que vous cherchiez, vous pouvez quitter
la galerie comme bon vous semble, d'un clic, pour aller ailleurs. En plus,
je ne crois pas aux sites qui vendent tout et rien, sans fil directeur.
Quant aux comparateurs de prix, ils servent davantage aux professionnels
du net qu'aux internautes.
Quels sont vos coût
marketing ?
J'ai gelé toute publicité
depuis le mois de février. Nous avons essayé toutes les formes de publicité,
à part la télévision, et mon constat est le suivant : les bandeaux
publicitaires sont très chers et les internautes ne cliquent pas dessus.
Et ce n'est pas une spécificité nationale ! Quant à la publicité papier,
elle demande beaucoup de moyens. Par contre, nous avons placé nos investissements
sur des outils de marketing opérationnel qui nous permettent de mieux
qualifier nos visiteurs. Depuis 2 à 3 mois, nous centrons nos efforts
sur le développement de l'affiliation, du marketing viral et avons mis
en place un call center. Pour le moment, nous ne sommes pas abasourdis
par les résultats du call-center qui peut fonctionner par voix sur IP.
Les litiges sont la principale motivation aux quelques appels que nous
recevons. Mais ce système nous permet de ne pas perdre de clients.
Comment ont évolué
vos marges dernièrement ?
Nos marges ont été
légèrement entamées ces derniers mois par l'augmentation des coûts, liés
à l'épidémie de fièvre aphteuse et à toutes les questions associées
à la sécurité alimentaire en général. En pleine épidémie, nous avons perdu
beaucoup de clients. Ce qui nous a amené à réviser à la baisse, de 20
à 30%, nos objectifs de chiffre d'affaires. En 2001, nous tablons sur
un chiffre d'affaires entre 3,5 et 4 millions de francs. L'augmentation
des frais de transport a également contribué à entamer nos marges. Les
transporteurs ont également subi les conséquences de l'e-krach. Comme
ils n'ont pas acquis de nouveaux clients, ils ont augmenté leurs
prix. Ce paramètre a pour nous un réelle importance. Aujourd'hui, nous
traitons 20 à 25 commandes par jour. En décembre 2000, nous avons exporté
quelques 4 tonnes de fromage. Cette année, nous tablons sur 15 à 20 tonnes.
Heureusement nos marges restent confortables et notre trafic augmente.
Notre panier moyen se situe autour de 500 francs et en mai, nous avons
recensé 200 000 pages vues.
Quels sont vos projets
sur Internet ?
Nous allons ouvrir,
d'ici une dizaine de jours, un site en japonais, fromages-japon.com. Ceci
afin d'être mieux référencé. En effet, le Japon est officiellement le
plus gros marché de vente de fromage et il est pour nous, loin derrière
les Etats-Unis. Nous avons donc décidé de créer ce site entièrement
réalisé par Datasia.
Comment voyez-vous
votre avenir ?
Il y a peu, pour moi
l'avenir était très clair. Aujourd'hui, je ne sais plus réellement où
aller. La crise de la fièvre aphteuse a placé une épée de Damoclès
au dessus de notre tête. Nous avons toutefois quelques projets en réserve
outre le site japonais. Un projet B to B n'est pas exclu. Mais doit être
auto-financé, gagner bien notre vie est un préalable. Sur ce projet, il
n'est toutefois pas exclu d'ouvrir le capital à un investisseur extérieur
qui ne rentrera pas dans fromages.com. Ce sera un projet à part.
Qu'est-ce que vous
aimez sur Internet ?
J'aime Internet pour
son côté rapide, pratique, novateur.
Quels sont les sites
que vous préférez ?
Parmi les sites américains,
j'aime beaucoup sax.com et le site de design, deananddeluca.com. En France,
la Fnac.