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Solutions: comment situer le CRM analytique dans toute la galaxie d'outils
et de modules de gestion de la relation client ?
Françoise Fogelman-Soulié:
Dans le CRM, les deux parties
sont le front-office et le back-office. A l'intérieur de la partie front-office,
on retrouve l'ensemble des canaux de contacts (web, centres d'appels,
courrier, SMS...) ainsi que le CRM opérationnel qui comprend les éléments
liés à la gestion de campagne, à l'automatisation des forces de vente
et à la gestion du site web. Le back-office, de son côté, comprend d'une
part les éléments de l'ERP et de l'autre le CRM analytique.
Les composants du CRM analytique sont d'abord la base de données, le datawarehouse
clients/prospects. Puis interviennent un certain nombre d'éléments qui
permettent de procéder à du reporting, à de l'analyse simple et de l'analyse
multi-dimensionnelle. Enfin, entre les partie front-office et back-office,
nous avons un bloc charnière qui intègre le CRM collaboratif et toute
la gestion des partenaires.
Quand nous regardons les différentes étapes d'un projet de constitution
CRM, une fois que les différents modules sont identifiés, il faut se demander
de quelle façon l'on doit mettre en place le produit. Ces étapes sont
au nombre de quatre: 1. enregistrer les informations, 2. les analyser,
3. les enrichir, et 4. les exploiter. Le CRM analytique correspond aux
trois premières étapes.
Quels
est le détail de ces trois premières étapes ?
Pour décliner les grandes catégories, nous
allons nous caler sur un processus.
1. La phase d'enregistrement correspond à la collecte de l'ensemble
des informations sur les prospects et les transactions à partir de toutes
les sources dans la société. Ce sont les différentes bases de l'entreprise
mais aussi celles des distributeurs et des partenaires, des éléments qui
proviennent des revendeurs, des données des sites web (cookies, tags,
fichiers log...), des informations en provenance des centres de contacts
et toutes les sources possibles et imaginables. Lorsque l'on effectue
des analyses de type data mining, elles produisent aussi des informations
que l'on va intégrer dans le serveur de l'entrepôt de données. Ces informations
sont en général celles des retours de campagnes et du service après-vente.
Le but est d'obtenir une vision transversale de l'entreprise, qui soit
multi-départementale. Tous les départements doivent partager cette information
au travers d'une vision multi-canal pour en obtenir une vue cohérente.
Cette première étape critique peut occuper jusqu'à
60-70 % de la durée d'un projet quel qu'il soit. C'est une
phase très importante en temps et en coûts, mais sa qualité
va conditionner le reste. Dans l'information collectée, il y a
aussi des données qui vont s'enrichir petit à petit.
Plus elle est sophistiquée, plus l'information aura de la valeur.
2. La phase d'analyse concerne le datawarehouse (entrepôt
de données) et la mise en place des KPI (indicateurs de performance
clefs) pour le suivi de l'activité. Dans le centre d'appels, c'est
le nombre moyen d'appels par minute, et chez les vendeurs c'est le nombre
de visites par jour. Une fois que les KPI ont été définis,
il faut les travailler avec une orientation très métier
et de haut niveau. Pour cela, il faut prendre les outils du marché
qui permettent de mettre à disposition des indicateurs dans des
rapports prédéfinis ou des rapports dynamiques multi-dimensionnels.
Il faut être capable de mettre un ensemble de rapports à
la disposition d'un ensemble de départements. Quand le datawarehouse
est mis en place avec toutes les informations transversales, il est enfin
possible d'obtenir la vision transversale, avec comme but le pilotage
et le suivi de l'activité.
Dans cette phase d'analyse, l'entreprise obtient une vision comptable,
historise, regarde ce qui s'est passé et constate les dégâts,
c'est-à-dire le passé. C'est vraiment l'outil de tous les
jours pour suivre ce qui se passe, par exemple dans un contexte comme
celui des campagnes marketing.
3. La phase d'enrichissement va plus loin car elle permet d'élaborer
des connaissances sur le client qui vont permettre de réagir par
rapport à lui. Quelle est la valeur de ce client ? A qui faire
cette offre-là ? A quelle catégorie envoyer mon mailing
pour maximiser le taux de retour ? Peut-on prévoir que ce
client va passer à la concurrence ? Ici, l'on retrouve toute
la notion prédictive, en essayant de prévoir le potentiel
d'un client. Pourquoi ce client a-t-il bien répondu à ma
campagne ? Quelles sont les caractéristiques de ce client
qui répond ? Mais aussi: quelles sont les caractéristiques
du fraudeur ? Dans l'assurance, celui-ci aura souvent une voiture
rouge. Ici, l'essentiel de l'analyse s'appuie sur du data mining qui permet
de segmenter les clients. L'entreprise va alors estimer des valeurs clients
pour prévoir qui a le plus fort potentiel. Elle va calculer des
scores d'appétence.
L'entreprise dira : "Je sais à quel point vous êtes
intéressé par mon produit et je veux bien vous faire une
promotion". Ou alors: "Je vous invite à tel événement
qui coûte cher car vous êtes bon pour acheter mon produit".
Pour cela, "j'utilise les informations de ma base de données
pour prévoir en vous donnant une note, et si vous avez 99 %
vous êtes intéressant alors qu'un autre aura seulement 2 %
de chance d'être invité".
Comment
passe-t-on à la dernière étape, celle de l'exploitation
?
Là, l'entreprise a compris que son
centre d'appel dormait, que ses vendeurs n'effectuaient pas assez de visites,
et elle lance des actions. Si elle est un opérateur, elle contacte
tous les individus qui ont un taux de churn très élevé
à travers son centre d'appels. Les bons clients reçoivent
une heure de communication gratuite sur leur destination préférée,
ou alors l'opérateur leur offre un nouveau mobile. Mais ces clients
sont ceux qui conjuguent le plus fort risque et la plus forte valeur potentiels.
Ensuite, en descendant la liste des scores, ceux qui ont 60 % de
chances de partir à la concurrence reçoivent un mail avec
une petite promotion. Grâce au CRM analytique, l'entreprise fait
des offres personnalisées et ciblées.
Beaucoup
d'éditeurs proposent des solutions de CRM analytique. Quelle est
la typologie de ces acteurs ?
Ils proviennent des trois mondes : celui du
CRM pur, celui de la business intelligence et celui des ERP. Ensuite,
certains acteurs selon le schéma front-office / back-office sont
plus d'un côté ou de l'autre. Le bon concept est celui du
best-of-breed, c'est-à-dire les acteurs de niche en opposition
à l'éditeur qui couvre l'ensemble avec sa solution.
Commençons
donc par les acteurs qui tentent de tout couvrir... ?
Oracle a sa base de données, puis
sur la partie analytique Discoverer en reporting et Express pour OLAP,
et enfin Darwin du côté data mining. En front-office, cet
éditeur a développé tous les modules. Mais contrairement
à des idées reçues, Oracle vient du monde de la business
intelligence et pas des ERP. Il s'appuie sur un socle en béton
armé et propose ensuite une offre front-office qui se surajoute
aux modules en dessous. Oracle est typiquement l'acteur qui vient de la
business intelligence et qui couvre tout.
De ce côté-là, l'on peut également citer SAS
qui vient de la business intelligence avec du reporting et de l'analyse
OLAP, et qui est le leader dans le domaine du data mining. Aujourd'hui,
il rentre dans le front-office avec l'acquisition d'Intrinsic spécialisé
dans la gestion de campagnes. Ensuite, SAS a encore quelque chose à
dire sur le front-office web, mais pas sur l'automatisation des forces
de vente ni sur les centres d'appels. Pour l'instant du moins.
Enfin, il ne faut pas oublier SAP et PeopleSoft, qui viennent de l'ERP.
Le second, à travers l'outil Vantive, couvre la totale du front-office
et du back-office, et tisse des alliances avec d'autres acteurs comme
Hyperion pour la partie multi-dimensionnelle.
Ensuite,
ceux qui viennent de la gestion de la relation client au sens strict...
?
Siebel vient du front-office et est excellent
dans ce domaine. Il possède sa propre base de données qui
à l'origine était un peu d'Oracle et de DB2. Et Siebel se
dit: pour la partie analytique, comment je procède ? Cet éditeur
tisse donc des alliances avec Business Objects pour le reporting et Hyperion
pour la partie OLAP. Mais finalement, il ne dit pas grand chose en terme
de data mining, sauf peut-être quelques accords avec des sociétés
comme KXen et Data Distilleries.
Siebel propose ses propres modules de reporting mais dit à l'entreprise
que si elle en veut plus, son produit est intégré avec des
éditeurs qui fournissent du reporting pointu. Maintenant, il faut
voir les annonces par rapport à la réalité du terrain.
Dans le même ordre d'idée, citons Selligent qui couvre tout
le front-office mais s'intègre à d'autres sur la partie
analytique.
Maintenant, voici un dernier exemple qui vient d'arriver sur le marché.
Epiphany vient du front-office où il se concentre sur la gestion
de campagnes, mais a complètement intégré la partie
data mining. Il dispose aussi de modules pour le web et les centres d'appels,
mais son optique est la gestion de campagnes. Chez cet acteur, le front-office
prédomine mais un bout de back-office l'intéresse aussi.
D'une manière générale, tous les éditeurs
de CRM front-office ont des outils de reporting, mais si l'on compare
avec ceux de la business intelligence il n'y a pas photo.
Voir
la seconde partie de l'entretien
A 51 ans,
Françoise Fogelman-Soulié n'est pas seulement directeur
associée, responsable du pôle gestion de la relation client
chez Business & Decision. Elle est également membre du Conseil
scientifique du groupe France Télécom et expert auprès
de la Commission Européenne. Diplômée de l'Ecole Normale
Supérieure, titulaire d'une agrégation de mathématiques,
d'un DEA d'économétrie et auteur d'une thèse d'état
sur l'informatique, elle a réalisé de nombreuses interventions
auprès de grandes entreprises et organisations gouvernementales.
Parmi ces interventions, elle a conduit la mise en place d'un datawarehouse
technique pour la conception des véhicules chez PSA-Peugeot Citroën,
celle du datawarehouse commercial d'Air France, et de celui de suivi des
ventes pour le compte de Suez-Lyonnaise des Eaux. Elle a également
réalisé une étude du comportement d'accès Intranet
à un datawarehouse pour le ministère de l'Industrie, et a
mené des études de faisabilité des systèmes
d'information marketing pour les groupes BMW (automobile) et AGF (assurances).
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