Justement,
quelles sont ces applications analytiques que proposent
les éditeurs de la business intelligence ?
De ce côté-là,
la vraie question est de savoir si en terme de CRM analytique,
celui-ci se branche ou non sur le CRM opérationnel.
Certains traitent ou non la connexion avec d'autres
acteurs. Prenons d'abord le leader, Business Objects
à travers sa nouvelle offre d'applications analytiques.
Ces produits traitent complètement et de façon
détaillée la partie analytique, mais n'offrent
pas de pont naturel vers le front-office. En revanche,
Business Objects dispose de connexions vers des acteurs
comme Siebel. Informatica aussi commence à se
positionner avec un début d'offre d'applications
analytiques, mais ce n'est pas son coeur de métier.
En revanche, Informatica montre une bonne stratégie
à travers l'ETL. En règle générale,
tous les intervenants essaient de déborder de
leur positionnement initial. Chacun vient de sa niche
et essaie de s'étendre.
MicroStrategy et Brio, par exemple, sont typiques de
la tendance à coloniser le back-office pour remonter
ensuite vers le front-office. Mais ils n'en sont pas
tous au même niveau. Oracle propose la totale,
Business Objects s'approche, tandis que Brio et Cognos
en sont encore loin. Pour revenir à MicroStrategy,
sa suite de CRM analytique comprend tous les outils
d'analyse et de reporting. Avec elle, soit l'entreprise
développe ses tableaux de bord à la main
et s'appuie sur son intégrateur préféré
pour les définir plus précisément,
soit elle prend l'offre dans laquelle elle trouve 1 000 tableaux
de bord prêts à l'emploi. Ce dernier point
comporte un avantage en terme de réduction des
développements. Et quand les utilisateurs ne
sont pas mûrs pour paramétrer des indicateurs,
l'entreprise profite de toute une richesse de tableaux
de bord à l'intérieur d'une offre packagée.
Pour
de l'analyse et du reporting plus poussés, faut-il
une approche best-of-breed ou plutôt intégrée,
si cela pose problème d'agréger des solutions
?
Il faut trancher et cela
dépend de la sophistication de ce que l'entreprise
désire mettre en place. Si elle recherche du
reporting basique, elle peut tout à fait opter
une solution CRM intégrée. Mais si elle
veut aller plus loin, il lui faudra passer à
des outils plus évolués. Dans le cas de
Siebel, celui-ci ne pratique pas l'analyse mais la propose
par exemple par le biais d'Hyperion. En attendant, si
l'intégration n'est pas serrée, cela peut
passer par le fait de dupliquer les bases au préalable
de la consolidation de l'entrepôt de données.
A l'inverse, si l'entreprise a des besoins classiques
en terme de CRM opérationnel, elle peut choisir
Oracle chez qui la partie front-office de la gestion
de la relation client est moins fouillée que
Siebel. Il faut d'abord regarder les budgets en terme
de licences, d'intégration et de maintenance,
et après cela dépend de là où
se situe le plus fort besoin. .
Nous
n'avons pas parlé d'IBM, qui pourtant semble
avoir un certain nombre d'outils au catalogue... ?
IBM se positionne essentiellement
comme revendeur d'un certain nombre de solutions. Nous
n'avons pas non plus parlé de NCR, qui propose
à la fois son datawarehouse Teradata et une suite
de CRM front-office. Dans toute la liste des acteurs,
si nous résumons, nous retrouvons ceux qui viennent
de la business intelligence, ceux qui éditent
des ERP et ceux qui sont positionnés sur le front-office.
Soit la spécificité de l'entreprise veut
qu'elle insiste sur certaines fonctions du CRM, soit
elle préfère des fonctions classiques
côté front-office mais plus sophistiquées
en back-office.
Tous ces éditeurs proposent de l'analyse avec
des outils, mais leur choix est toujours assez complexe.
Finalement, nous avons parlé des processus, de
la catégorisation des solutions et de leur choix,
mais pas de certains aspects fondamentaux des projets
CRM qui sont des facteurs de risques assez critiques.
Or, ce sont des aspects que l'on n'a pas l'habitude
de regarder, et pourtant ce sont ceux-là qui
déterminent si le projet va réussir ou
rater.
Quels
sont ces fameux facteurs de risques ?
Le projet CRM produit essentiellement
un impact fort sur l'organisation de l'entreprise et
sur ses processus de travail. Dans une organisation,
on retrouve aussi bien une direction commerciale, une
direction marketing, une direction pour le support client...
et chacun a sa petite vision de son client avec sa façon
de le définir et ainsi de suite. A partir du
moment où le CRM entre en ligne de compte, le
motto devient "le client au centre de l'entreprise".
La vision est la même pour tous, chacun doit accepter
de voir le client sous la même grille.
Mais aussi, il faut que les différents départements
acceptent de partager leurs informations. Or, si vous
demandez à votre vendeur sur le terrain de partager
ses informations, il refuse tout net car ce sont ses
clients à lui. En fait, plus que sur les critères
de choix, les projets échouent non à cause
de la technique mais en raison des problèmes
d'organisation. Et ceci, parce que l'entreprise ne veut
pas changer autour d'une nouvelle philosophie de fonctionnement.
Il faudrait pour cela abandonner certaines luttes de
territoire...
Ensuite, il faut parler des processus de travail. Le
marketing travaille à sa façon, le commercial
aussi, et derrière nous retrouvons l'informatique.
Avec la mise en place des processus de CRM, le travail
va devoir s'effectuer de façon différente.
Peut-être que dans l'acquisition de l'information
client, puis son passage à un autre département,
le processus traditionnel devra être modifié.
L'impact sur le travail au jour le jour est ce qu'il
y a de plus important, et c'est là que ça
coince.
Pour
en revenir au choix des solutions, en existe-t-il certaines
qui sont plus faciles que d'autres à accepter
dans l'organisation ?
Nous pouvons en effet être
amenés à des raisonnements selon lesquels
certains outils demandent des remises en cause profondes
de l'organisation. Par exemple, pour Siebel il faut
procéder à une modélisation des
processus de l'entreprise sur ce que permet la solution.
Et là, c'est lourd et on ne rigole pas. L'impact
est plus important que ce que l'on croit.
D'autres outils seront plus légers, comme Selligent
qui demande un travail moins en profondeur sur ces aspects
car il rentre moins en profondeur dans l'organisation.
Avec cette solution, peut-être que certaines pratiques
resteront aussi plus artisanales et moins automatisées.
Et cela provoque des impacts très importants
sur la mise en oeuvre.
Enfin, certains clients nous rapportent que tel ou tel
outil est un "outil à l'américaine".
C'est par exemple le cas de Siebel, qui propose une
vision de l'entreprise à l'américaine
et s'adapte plus à des multinationales. Bien
sûr, les critères techniques sont importants.
Mais aussi bien sur les parties du front-office que
sur les autres parties du back-office, il faut aborder
tout ce qui a trait à la conduite du changement
et auquel on ne pense pas toujours.
Le
développement spécifique peut-il être
parfois une alternative pour répondre à
un besoin précis ?
Sur ce point, il faut aussi
penser en terme de budgets, c'est à dire licences,
développements/intégration, et maintenance.
En appliquant un barême, si le choix se porte
sur du tout spécifique, les licences sont à
zéro, les développements et l'intégration
à un, et en maintenance cela devient très
lourd. S'il faut accepter une nouvelle version et faire
évoluer le système au dessus de la base
Oracle, cela ne va plus du tout. Le grand avantage de
départ se paie en budget de maintenance. Et en
plus, l'entreprise n'a que ce dont elle a besoin sans
profiter de toute l'expertise métier packagée.
Dans Siebel figure l'expertise de centaines de personnes.
L'entreprise en voit dix fois trop, mais lorsque nous
l'installons nous cachons certaines fonctions. Au cours
du temps, une solution spécifique devient donc
plus pauvre et moins fonctionnelle.
De l'autre côté, quand le choix initial
se porte sur du progiciel, le budget de licence et celui
d'intégration équivalent en totalité
à ce qu'il faut pour du développement
spécifique. Mais en maintenance, l'entreprise
ne paie que 15 % du prix de la licence chaque année.
Pour les évolutions, certaines sont parfois gratuitement
comprises dans la maintenance, et donc il faut choisir
des éditeurs qui soient pérennes. Sinon,
au début le choix se porte sur un certain nombre
de modules, puis l'entreprise achète un module
de plus et paramètre les évolutions dans
ses composantes initiales. Avec un progiciel, on sait
où l'on va.
Notre discours consiste donc à dire : "Jamais
de spécifique, car c'est un choix très
dangereux". Cela concerne aussi les clients qui
veulent faire du spécifique sur le progiciel
et le tordent. Puis, le progiciel évolue et il
faut refaire tout le spécifique. Certains ont
adopté cette tendance et s'en mordent les doigts.
Après avoir essayé de le maintenir, ils
jettent la partie spécifique et reviennent à
la version pure et dure. Un logiciel suppose aussi bien
des avantages que des contraintes, et il faut le prendre
tel qu'il est. Cela peut forcer à adapter beaucoup
l'organisation, et nous en revenons au problème
précédent.
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