Depuis la sortie début avril du
processeur "P4 2,4A", Intel a repris le dessus en terme
de performances pures face aux Athlons XP du fabriquant AMD. Avec
la sortie de son nouveau P4 à 2,533 Mhz lundi dernier, Intel espère
parvenir à endiguer la croissance continue d'AMD qui a gagné 4 points
de parts de marché en 2001 et qui propose des produits présentant
un meilleur rapport coût/performances que ceux d'Intel. Aux
Etats-Unis, AMD contrôle désormais 37 % du marché des
petites entreprises, 28 % du marché des moyennes entreprises,
17 % du marché de l'éducation et 32 % des marchés publics,
selon Dataquest.
Pour essayer de creuser un écart
significatif en terme de performances, Intel a revu sa copie. Le
bus du chipset 850,
qui
régule la vitesse des transferts de données entre les composants,
a été amélioré pour pouvoir fonctionner à une vitesse de 533 Mhz
- contre 400 Mhz pour la précédente version. Ce nouveau bus, le
850E, est capable de faire tourner une mémoire plus rapide : la
Rambus 1066. Simple effet d'annonce toutefois : ces modifications
ne permettent pas au nouveau P4 de faire vraiment la différence
par rapport aux anciennes versions. Comme l'indique le test
du site Tom's Hardware, les écarts de puissance à fréquence
égale varient de moins de 1% à 4% au maximum.
AMD juste
derrière
Face à Intel, AMD tarde pourtant
à renouveler son haut de gamme. Les puces gravées en 0,13 micron
devraient arriver dans les semaines qui viennent, ce qui permettra
à AMD d'augmenter sensiblement la fréquence de ses processeurs.
Pour mémoire, AMD a dû trouver une solution pour compenser
le retard pris sur Intel dans la gravure en 0,13 micron : plus
la gravure du processeur est fine, moins il chauffe, et plus vite
on peut le faire tourner. Les processeurs d'AMD tournent donc à
des vitesses bien moins élevées que ceux d'Intel. La solution pour
AMD ? Mettre en évidence le rapport fréquence/performances beaucoup
plus élevé des Athlons en remplaçant la fréquence réelle de ses
processeurs par une fréquence relative, calculée par rapport aux
performances du P4. Par exemple, un Athlon qui tourne à 1733 Mhz,
est plus rapide que le P4 à 2,0 Mhz. AMD l'a donc appelé Athlon
XP 2100+.
Le passage tardif d'AMD au 0,13 micron
devrait permettre au fondeur de coller au plus près de la gamme
d'Intel : un Athlon 2800+ est prévu pour la fin 2002, alors qu'Intel
annonce de son côté un P4 à 3 Ghz pour le premier trimestre 2003.
De quoi tenir le choc pour AMD, en attendant la grande bataille
de 2003. A cette date, les deux fondeurs joueront une manche très
importante : le passage à l'architecture 64 bits. Les "Hammers"
de AMD affronteront "l'Itanium" d'Intel sur le très
haut de gamme. AMD a mis toutes les chances de son côté pour séduire
le marché très rémunérateur des entreprises. La version serveur
des Hammers, l'Opteron, pourra tourner en bi, quadri et octo-processeur.
Les gammes
d'Intel et AMD
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Intel
|
AMD
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Commentaires |
Haut
de gamme 2002
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P4
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Athlon XP
|
L'athlon
XP présente un meilleur coût rapport / performances.
Mais les P4 les plus rapides n'ont pas d'équivalent chez
AMD. |
Haut
de gamme 2003
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Itanium
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Hammer
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Difficile de prévoir
les performances de processeurs en préversion. Mais pour
l'instant, Intel n'a pas convaincu les fabriquants. |
Entrée
de Gamme
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Celeron
|
Duron
|
Le
Duron présente un rapport coût performances imabattable,
et domine en terme de puissance pure. |
Quand aux performances pures,
il semble qu'AMD a frappé fort. L'Opteron marque un gain de 25 %
par rapport à l'Athlon XP sur des applications 32 bits - qui sont
censées tourner relativement lentement sur un processeur 64 bits
comme l'Opteron. Dans le même temps, les fabricants semblent déçus
par les premiers pas de l'Itanium d'Intel. Celui-ci serait particulièrement
lent dans ces mêmes applications 32 bits. Signe qui ne trompe
pas : Intel a décidé il y a quelques mois d'affecter une petite
équipe d'ingénieurs au développement d'une solution technologique.
Ce projet, connu sous le nom de Yamhill, s'inspire largement de
la démarche d'AMD, et devrait permettre à l'Itanium de faire mieux
dans les applications 32 bits.
Rapport performances/prix
Reste qu'on ne gagne pas
un marché sur le seul critère de la performance : le prix d'une
configuration à base d'Athlon, de P4, de Céléron ou
de Duron a un impact beaucoup plus fort sur les directions informatiques.
Et là, AMD semble garder une longueur d'avance sur Intel. Pour preuve
: on trouve le milieu de gamme d'AMD, l'Athlon 1800+ pour 160 euros
au détail, contre 270 euros pour le P4 1,8A. Autre exemple : il
est préférable d'équiper le très haut de gamme d'Intel avec de la
mémoire Rambus pour optimiser ses performances. Cette mémoire reste
plus chère que la DDR 266, qui donne des performances quasi-optimales
à l'Athlon XP. Cette différence de tarifs entre Intel et
AMD, qui se retrouve également sur le segment bas de gamme - Céléron
contre Duron - permet à AMD de rester plus compétitif que son concurrent.
Et cela, en dépit des efforts d'Intel pour vendre ses P4 moins chers
aux fabricants.
Image de marque
Finalement, le seul domaine
où AMD pâtisse d'un véritable retard sur son concurrent est celui
de l'image de marque. Les moyens marketing du géant de Santa Clara
sont très supérieurs à ceux d'AMD. Alors qu'Intel
jouit d'une réputation sans faille, nombre d'administrateurs de
parcs informatiques sont restés focalisés sur les déboires d'AMD
à ses débuts. Pourtant, la fiabilité de ses processeurs n'a plus
rien à envier à celle des produits d'Intel. Dans ce domaine, la
déclaration du patron de Dell à la récente conférence de
San Francisco organisée par Meryll Lynch pourrait bien bousculer
les idées reçues. Le fabriquant de PC et de serveurs, qui est le
dernier a n'avoir jamais fait confiance à AMD, a déclaré
qu'il ne voyait pas pourquoi les fabriquants devraient faire un
choix entre l'Opteron d'AMD et l'Itanium d'Intel et ne pourraient
pas intégrer les deux marques dans leurs différentes
gammes. Si Dell confirme son intérêt pour le processeur d'AMD, la
confiance du constructeur qui jouit d'une réputation de fiabilité
pourrait faire beaucoup de bien au challenger d'Intel. Et peut-être
AMD parviendra-t-il alors à conquérir l'un des derniers bastions
qui lui résiste encore : le marché professionnel.
[Nicolas Six, JDNet]