Le GPRS et l'iMode sont opérationnels,
les OS mobiles et les composants de communication sont prêts,
mais où sont les produits ? On attend toujours la grande
opération marketing qui pourrait réveiller le marché :
les opérateurs de téléphonie mobile, les fabriquants
de terminaux et les développeurs de logiciels pratiquent
l'attentisme. Microsoft a donc décidé de réveiller
le petit monde de la mobilité et d'en prendre les commandes,
tout en prenant bien soin de rester dans les coulisses.
Laurent
Dugimont, Chef de Produit Mobilité chez Microsoft France
confirme que "le marché est là. Pour preuve :
il n'y a quasiment plus de grand appel d'offre sans un volet communication
mobile. Les standards sont là eux aussi, les technologies
se sont démocratisées mais l'offre, elle, n'est pas
au rendez-vous. Elle est même plutôt sur un coup d'arrêt :
tout le monde parle de mobilité depuis des années,
mais les produits et les standards ont mis tant de temps à
débarquer que la motivation des acteurs s'est effritée,
et que le mouvement s'est engourdi". Une bonne raison pour
Microsoft de redynamiser le marché.
Un travail minutieux
sur le terrain
Comment faire pour remettre tout le monde sur le pied de guerre ?
La firme de Redmond a axé sa stratégie sur deux points :
faciliter la tache des développeurs, et faire un gros travail
de lobbying sur tous les autres acteurs du marché. Un effort
considérable : "Nous faisons en sorte que les produits
développés par les acteurs du marché puissent
être certifiés facilement et rapidement : un organisme
vérifie leur combatibilité selon une série
de normes définies par nous-même, et nous nous arrangeons
pour que les prix soient raisonnables. Nous mettons aussi en relation
les développeurs avec les opérateurs de téléphonie
mobile pour qu'ils puissent vérifier la compatibilité
de leurs produits avec les réseaux de l'opérateur".
Microsoft s'est donné les moyens
de convaincre : 1000 développeurs ont été
réunis en Avril 2002 pour réfléchir autour
du thème de la mobilité. Mais le travail de lobbying
du géant s'est étendu bien plus loin, et notamment
jusqu'aux opérateurs de téléphonie mobile :
"Nous avons réussi à convaincre SFR de comercialiser
son offre de bureau mobile. C'est à ce jour notre plus grande
réussite : l'opérateur avait un projet similaire
dans les tiroirs, mais il était en sommeil". Microsoft
est aujoud'hui - selon ses propres dires - l'acteur le
plus actif de l'industrie de la communication mobilité.
A qui profite l'opération
?
Le travail du géant du logiciel pourrait donc considérablement
accélérer les choses et réveiller le marché.
Mais Microsoft cherche évidemment avant tout à servir
ses intérêts : "Nous croyons beaucoup au
marché de l'informatique mobile. Nous voulons y être
présents, et à la meilleure place". En se plaçant
comme un pivot sur le marché, en définissant les standards,
et en jouant le rôle d'agent de liaison entre les différents
acteurs, Microsoft réalise un investissement stratégique
qui pourrait bien se révéler très rentable.
Avec le but de devenir incontournable.
Deuxième objectif : la
firme de Redmond entend rentabiliser les lourds investissements
consentis dans le domaine de la mobilité : "une
bonne partie de notre stratégie est tournée vers cet
axe. Une partie de nos produits ont été volontairement
orientés vers la communication nomade, et pas seulement notre
OS pour terminaux mobiles". Il faut donc logiquement récupérer
les dividendes de ces investissements, en réveillant un marché
un peu trop atone s'il le faut : "Il faut que la mayonnaise
prenne".
Microsoft
montre l'exemple
A ce propos ... quelle est la qualité des produits de
mobilité de Microsoft, l'éditeur - faut-il le
rappeler - de l'OS présent sur les Pocket PC ?
Sont-ils exemplaires ? Ou peut-on reprocher au géant
du logiciel de regarder la paille dans l'oeil du voisin alors que
c'est une poutre qui obstrue le sien ? "Nous pensons que
l'application porteuse pour la communication embarquée est
actuellement le mail par GPRS". Un domaine où les Pocket
PC semblent avoir beaucoup de mal à concurrencer les terminaux
BlackBerry
de Rim, très appréciés aux Etat-Unis.
Pourtant, des progrès considérables
ont été ralisés : "Depuis le début
de cette année, il est possible d'ajouter à nos serveurs
de Mail un module pour gérer les terminaux mobiles. Au niveau
du terminal, la réception des mails est entièrement
paramétrable. On peut recevoir des pièces
jointes
au format Excel ou PowerPoint
si on le souhaite - ce que les terminaux de Rim ne font pas.
Mais le terminal est paramétré par défaut pour
ne récupérer que l'en-tête et les 2 premiers
Ko du message". Tout comme les Blackberries, ce qui permet
d'économiser du temps et de l'argent lorsque l'on se connecte
par GPRS - un réseau lent et coûteux à
l'usage.
Une réussite ?
Dernier axe : Microsoft a souhaité améliorer
la cohabitation entre les différentes technologies de communication
sans fil au sein d'un même terminal - du type de Bluetooth,
Wifi ou GPRS : "Toutes ces technologies vivaient l'une
à côté de l'autre. Nous avons voulu les faire
vivre l'une avec l'autre : il sera donc possible de passer
automatiquement du Wifi au GPRS". De quoi économiser
de l'argent, puisque le système sélectionnera automatiquement
le réseau Wifi quand il sera disponible.
Microsoft tente manifestement de s'imposer
comme leader du marché de la mobilité - et de
garder son hégémonie sur les OS et les suites logicielles
qui équipent ce support. Mais le succès du géant
a jusqu'a présent été assez tempéré,
puisque les terminaux Pocket PC sont encore minoritaires sur le
marché des assistants personnels. Pourtant, l'initiative
de communication mobile de Microsoft pourrait lui donner un atout
considérable dans le futur.
[Nicolas Six, JDNet]