JDNet Solutions. Les
grandes administrations (Les Finances notamment, mais aussi L'Education
nationale) mettent en place des projets Internet / Intranet de grande
ampleur. Les collectivités locales, toutes proportions gardées, sont-elles
en retard de ce point de vue ?
Didier Loth.
A la lecture d'enquêtes récentes, on a l'impression que les collectivités
locales sont en décalage. Je serais plus nuancé. Certaines d'entre elles
ont des projets tout à fait intéressants, mais ce sont des projets moins
volumineux que ceux des grands ministères, et souvent non médiatisés,
car non mis en avant par les collectivités concernées. Et puis bien sûr,
les collectivités ne disposent pas des budgets d'un programme comme Copernic
par exemple.
Les communes sont-elles
plus avancées que les conseils généraux ?
Mon opinion personnelle est que les communes ont structurellement plus
de motifs pour lancer des projets car elles sont plus en relation directe
avec le grand public. Un Conseil Général comme celui de l'Oise ne s'adresse
pas, pour sa part, à la totalité des habitants du département, et plutôt
à des catégories de population (personnes agées, handicapées...) où la
proportion des internautes est plus faible. Et au niveau régional, n'en
parlons pas! Aussi est-il discutable d'épingler le retard des régions
ou des départements par rapport aux communes dans l'ouverture des sites
web au grand public.
Que
changent les récents décrets d'application du nouveau code
des marché publics concernant les nouvelles technologies, et que reste-t-il
à faire ?
Beaucoup de choses. Après avoir critiqué la frilosité du
nouveau code, il faut se féliciter et féliciter la DAJ (Direction des
Affaires Juridiques) du MINEFI de la rapidité de parution des décrets
d'application énonçant les principes des enchères sur Internet (en septembre
2001) et de la dématérialisation (en avril 2002). Il y a déjà beaucoup
à faire avec tout cela. Le potentiel est important. Même si pour l'instant
l'achat aux enchères est limité aux fournitures courantes.
Vous avez expérimenté
dès décembre 2000 l'achat de fournitures via Internet, grâce au
système d'enchères inversées. A l'époque, vous aviez déjà
réalisé une économie substantielle. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Notre dernier appel d'offres portant sur des achats de
fournitures courantes avec enchères inversées sur Internet nous a permis
de réaliser une économie encore plus importante, de l'ordre de 35%. Mais
ce résultat n'est pas lié uniquement à l'enchère, qui n'est qu'un outil:
il tient aussi à la démarche adoptée en amont dans la définition du besoin.
Le Conseil Général de l'Oise a construit à cette occasion un catalogue
privé de 310 articles, chacun associé à un montant de commande minimal
et maximal. Dans ces conditions, les fournisseurs sont enclins à des remises
plus importantes. En outre, il était demandé la fourniture d'un système
de commandes dématérialisées en mode ASP (l'application étant hébergée
sur le serveur du fournisseur), ce qui se traduit par des économies sur
le coût de traitement administratif de la commande chez le fournisseur.
Nous tendons finalement vers l'e-procurement.
Quels sont les autres
principaux projets Internet / Intranet mis en uvre au Conseil général
de l'Oise ?
Nous disposons d'un Intranet de communication que nous faisons évoluer.
Nous avons ainsi récemment amélioré notre moteur de recherche en utilisant
un outil opensource, par exemple. Mais nous voulons aussi rendre cet intranet
plus dynamique, en déconcentrant la publication sur les services, notamment.
Par ailleurs, nous avons un module d'e-Learning en mode ASP (solution
Online FormaPro), etc. Pour ces projets, nous avons mis en place un plan
de formation des équipes techniques aux technologies issues du monde de
l'Internet, mais également de nouveaux recrutements. En termes d'infrastructure,
nous généralisons progressivement une architecture unifiée autour de bases
de données Oracle, de serveurs sous Unix et Windows NT, et de postes clients
sous Windows; avec une évolution en cours vers le client-léger dans la
mesure où les éditeurs sont en mesure de fournir ce type de solutions.
Vous
avez mentionné l'utilisation d'un outil opensource. Le logiciel
libre, très implanté dans l'administration, est-il un choix prioritaire
?
Nous effectuons de la veille technologique,
et nous ne pouvons ignorer l'opensource, même si on peut s'interroger
sur le point de savoir si, effectivement, les coûts sont réduits par ce
biais. Cela dit, l'opposition libre-propriétaire, qui prend parfois une
tournure idélogique, pollue quelque peu le débat.
Comment le Conseil
Général de l'Oise a-t-il fait adopter ces différents outils
? A-t-il été nécessaire d'être directif ou l'adhésion a-t-elle été spontanée
?
Il y a eu une forte implication à l'échelon de la direction générale,
mais cela ne suffit pas. Il faut savoir répérer les bons relais parmi
les collaborateurs, et ne pas se reposer sur la seule chaîne hiérachique.
Leur mise en valeur est également importante, et puis il est nécessaire
d'éviter les "usines à gaz", et de faire la démonstration que les outils
mis en place rendent service: ainsi des menus de cantine, par exemple,
très utilisés; ou des comptes-rendus des réunions sur la négociation relative
à la mise en place de l'ARTT. Des projets de workflow et de groupware
ne viennent qu'après. En termes de promotion, nous avons mis en place
des réunions de sensibilisation, utilisé notre journal interne et la messagerie
électronique, notamment.
Quels investissements
ont été réalisés ? Quelle en est la rentabilité ?
Notre budget informatique & télécom, au Conseil Général de l'Oise, se
monte à 22 millions de francs, ventilé de la manière suivante: informatique
de production & logiciels métiers : 30%, bureautique élargie: 23%, infrastructure
informatique et télécom (incluant les PABX et le trafic voix-données):
40%. Les projets de e-Administration ne représentent à ce jour que 7%.
Le retour sur investissement de notre extranet fournisseur est facile
à calculer: le projet nous a coûté 100 000 francs, à rapporter au salaire
d'un équivalent temps plein consacré aux réponses au téléphone.
Quels
sont les chantiers à venir au Conseil Général de
l'Oise ?
Aujourd'hui, notre Intranet communiquant est accessible depuis tout poste
connecté sur le réseau, soit 1000 postes sur 1500 personnes. Nous réflechissons
à mettre en place des bornes d'accès pour le personnel non encore atteint.
En 2003, nous allons aussi adresser la population d'itinérants du Conseil
Général. La fréquentation est bonne, car 90% des personnes concernées
se connectent à l'Intranet, mais cela dépend des périodes. Il est nécessaire
de sans cesse réactiver l'intérêt pour l'Intranet, de susciter la curiosité.
Pour cela, nous allons demain passer à un système de push et à un Intranet
personnalisé. Nous allons également, à terme, nous orienter vers le workflow
(gestion des congés, des formations, etc...) tout en remettant à plat
certaines procédures à cette occasion.