Célèbre avocat du barreau parisien
connu pour son art de la procédure, Me Olivier Metzner représente
les intérêts de Yahoo Inc. et de Tim Koogle, ancien CEO du
groupe, dans la deuxième affaire Yahoo qui oppose le groupe américain
à l'amicale des déportés d' Auschwitz. L'association
reproche en effet à Tim Koogle d'avoir laissé vendre sur l'espace
enchères de Yahoo Inc. des objets et uniformes nazis alors que, dans
une décision du 21 novembre 2000, le TGI de Paris avait ordonné
à la société la mise en place d'un système de
filtrage pour empêcher les internautes français d'accéder
à ces objets. Me Metzner revient sur les arguments développés
dans sa plaidoirie lors de l'audience du 7 janvier (lire
l'article du JDnet).
JDNet.
Quelle est votre position sur cette affaire pénale en cours ?
Me Olivier Metzner.
D'abord on peut constater curieusement que l'Association des déportés
d'Auschwitz a attendu le 22 janvier 2001 pour prendre part à cette
affaire alors que la société Yahoo Inc. avait annoncé
dès le 2 janvier 2001 qu'elle allait interdire la vente d'objets
nazis sur son espace enchères. C'est seulement après cette
annonce que l'association a fait constater par huissier, la présence
d'objets nazis sur le site, tout en sachant que cette situation allait
cesser. Je trouve le procédé
très limite et quelque peu opportuniste de la part de cette association
qui, je le répète, n'est jamais intervenue au cours de l'affaire
précédente intentée devant le juge civil.
Mais
l'avocat de l'association indique qu'elle avait souhaité réagir
après que Yahoo eut saisi le tribunal de San Jose pour faire constater
qu'elle n'avait pas à
se soumettre à la décision du juge français...
Lorsque cette nouvelle action a été
intentée, Yahoo n'avait pas encore saisi la juridiction californienne.
De toute façon, le tribunal de San Jose a donné raison à
Yahoo mais la société n'a pas pour autant décidé
de remettre en vente sur son site ces fameux objets nazis. Je ne vois
pas d'autre raison que la mauvaise foi pour expliquer cette action car
l'intention de Yahoo a toujours été parfaitement claire
dans cette affaire. Le groupe a toujours soutenu l'action des associations
de lutte contre le racisme. Je dois dire que Tim Koogle a été
particulièrement choqué de se voir accusé d'apologie
de crimes de guerre devant une juridiction pénale.
Sur
le plan juridique, quelle
a été votre argumentation ?
D'abord Yahoo n'était pas actif
sur son site d'enchère mais jouait seulement le rôle d'hébergeur.
Les objets nazis représentaient à l'époque 0,003 %
des 2 millions d'objets en vente. Or Yahoo a, depuis, mis au point un
outil qui va plus loin que la demande du juge Gomez en excluant les objets
nazis pour le monde entier et pas simplement
pour la France. Yahoo a fait plus que se conformer à la loi française.
D'ailleurs les plaignants à l'origine de la première affaire
devant le juge civil ont été parfaitement satisfaits de
l'attitude du groupe.
Mais cette affaire nous renvoie à un problème
plus large qui est celui d'un outil de communication récent, accessible
dans le monde entier et qui pose la difficile question de la détermination
de la loi applicable ainsi que la résolution des conflits de lois.
Si l'on considère que nous devons appliquer
toutes les lois du monde, il ne restera plus grand chose sur Internet. Yahoo
voulait en savoir un peu plus sur le sujet et les récentes directives
européennes sur cette question, comme la plupart des lois nationales,
retiennent l'absence de responsabilité de l'hébergeur sur
le contenu de son site, sauf si ce dernier, saisi par l'autorité
judiciaire, ne réagissait pas avec diligence. [Fabien Claire, JDNet]