La filiale française du groupe de marketing
direct italien Buongiorno est l'objet de certaines critiques pour
des faits intervenus en 2002 ou au cours du premier semestre 2003. Elles
portent essentiellement sur les relations commerciales de Buongiorno France
avec son réseau d'éditeurs.
Buongiorno
a une double activité : la conception et la gestion de programmes
de e-marketing, et l'acquisition et la fidélisation de clientèle
pour des entreprises clientes. La société constitue des
fichiers d'adresses (avec coordonnées mails et GSM) à partir
de l'exploitation de lettres de diffusion thématiques (réparties
en dix catégories, dont le matériel informatique, la finance, le
voyage, l'automobile...). A côté de ses propres newsletters
(Le Journal du Mail, BMobile ou plus récemment BeMusic, etc), Buongiorno
anime un réseau d'affiliés, éditeurs de sites et
de newsletters d'informations (Zataz, Chronic'Art...), de divertissement,
de guides d'achats (TopGratuit, AchatsGratuits.com...), humour (JeMeMarre.com,
Rigoler.com...). Au total, ce réseau comprendrait une centaine
d'éditeurs partenaires qui exploitent la plate-forme technologique
d'e-mailing de Buongiorno. Cette dernière est "très
efficace" pour les envois des newsletters, de l'aveu de plusieurs
animateurs de lettres de diffusions du réseau. Mais le volet commercial
connaitraît des flottements.
Des délais de règlements étirés
Parmi ses multiples fonctions, Buongiorno joue le rôle de régie
publicitaire en proposant aux annonceurs de communiquer sur son réseau
à travers des encarts promotionnels ou des campagnes en opt-in.
Mais plusieurs éditeurs de newsletters, sous le couvert de l'anonymat,
évoquent les règlements tardifs de campagnes diffusées
par leur intéermédiaire. Le délai habituel de règlement
(de 30 à 60 jours après la diffusion du message publicitaire)
serait souvent allongé d'un mois, voire d'un trimestre.
Ainsi, l'éditeur d'une newsletter spécialisée dans
l'achat-consommation affirme avoir reçu en juillet un reversement
initialement prévu pour mai. Des retards souvent difficiles pour
des éditeurs dont la situation financière est en permanence
tendue. "Les délais d'attente à rallonge sont classiques
dans le secteur, soupire un autre éditeur d'une lettre d'informations
thématiques. Alors on grogne par mail ou par téléphone."
Avant, méthode extrême, d'évoquer des menaces d'injonction
par avocats interposés.
Interrogé par le JDN, Buongiorno France se présente comme
un simple maillon dans "une chaîne". "Nous sommes
payés tard pour des prestations que nous avons réalisées, justifie
Alexis Helcmanocki, le PDG de Buongiorno France. Ce qui a des répercussions
sur nos propres délais de règlements vis-à-vis de nos partenaires éditeurs,
envers lesquels nous ne nous portons pas Ducroire [NDLR : Convention
suivant laquelle un commissionnaire se porte garant, à l'égard du commettant,
de l'éxécution de l'opération par le tiers avec qui il traite - Définition
du Petit Larousse]. Nous ne pouvons
pas nous permettre d'écart importants en termes de trésorerie."
Polémique sur le recours à "l'auto-promotion"
Le système dit "d'auto-promotion" sur le réseau
Buongiorno prête à confusion, car la formulation dépasse
la simple diffusion de publicité pour les services Buongiorno ou
de l'éditeur partenaire. En cas d'espaces invendus, Buongiorno
accepte des accords dits "d'échanges d'espaces" : des publicités
pour un annonceur sont diffusées sur les newsletters partenaires
en guise de test commercial du support. Dans ce cas, Buongiorno ne percevrait
rien, et donc ne redistribuerait rien. La pratique servirait à
accrocher les nouveaux clients annonceurs en prélude à une
véritable campagne - sous forme d'opt-in par exemple - rémunérée.
Le procédé a suscité des interrogations dans le réseau
d'affiliation. Entre avril et juin 2002, des encarts Amazon France ont
ainsi été diffusés à plusieurs reprises sur
des newsletters des éditeurs du réseau Buongiorno. Au cours
de cette période, un éditeur a été surpris
de constater que la diffusion de ces promotions pour le libraire en ligne
était regroupée sous le libellé "auto-promotion"
sur son récapitulatif des reversements. En guise de réponse,
Buongiorno France a explicité les modalités du principe
de "l'échange d'espaces", tout en assurant que "ces
campagnes débouchent une fois sur trois sur des achats d'espaces".
Par la suite, Amazon France s'est effectivement engagé dans une
campagne opt-in avec, à la clé cette fois-ci, une rémunération
de l'éditeur.
Mais, l'ensemble de la chaîne promotionnelle - de la commande d'une
campagne aux modalités de diffusion et de facturation - reste difficile
à décrypter. "Sur l'appel à facturation, le
taux de reversement apparaît mais nous ne pouvons pas vérifier
quel contrat est signé en amont entre Buongiorno et l'annonceur",
commente un webmaster du réseau.
La société de marketing, qui ne se souhaite pas commenter
le cas précis de la campagne Amazon, se défend de toute
mauvaise intention. "A ma connaissance, nous n'abusons pas de la
capacité d'auto-promotion et de l'utilisation des espaces invendus sur
les newsletters de nos éditeurs partenaires, se défend Alexis Helcmanocki.
Nous sommes très transparents avec ces éditeurs sur les règlements et
les niveaux de reversement liés à la diffusion de campagnes publicitaires
sur notre réseau. Le PDG de Buongiorno France affirme que "depuis un an,
nous avons institutionnalisé des procédures pour une comptabilité fluide
et transparente vis-à-vis de nos partenaires, tant pour les systèmes d'appel
à facturation que pour ceux liés aux bons de commandes contre validation
de la facture."
Par ailleurs, Buongiorno a également attiré
l'attention de la Cnil concernant un affaire d''intégration non
sollicitée d'une adresse mail dans ses bases. Contactée
par le JDN, la CNIL a confirmé le dépôt de cette réclamation,
qui en est "au stade de l'instruction amiable" mais affirme
recevoir "très peu" de plaintes concernant les activités
de Buongiorno. "En cas de requête de la
CNIL, nous communiquons systématiquement la fiche informatique de l'internaute
concerné avec la date d'entrée des données et la nature des différents
services Buongiorno auxquels il s'est abonné", se défend la
direction de Buongiorno France.
[Philippe Guerrier, JDNet]