JDNet.
Quel
est votre positionnement sur le marché des FAI ?
Christophe Carel. Nous
voulons être le spécialiste des technologies xDSL. Notre
vivier de clients est professionnel, des PME ou des TPE. Nous avons également
une petite partie de notre clientèle que nous appelons des "power
users", ceux que que nous avons récupérés mi-2001
avec le rachat de Mangoosta : ce sont des particuliers qui connaissent
bien l'informatique, donc très exigeants dans le domaine des services
Internet, à la limite d'une clientèle professionnelle. Nous
ne voulons pas concurrencer de grands acteurs comme Wanadoo, Tiscali ou
Club-Internet dans le domaine de l'accès Internet grand public,
car cela demanderait des efforts trop importants en terme de marketing.
Fin
2002, vous avez repris des actifs d'Internext, un prestataire de services
InterneXt en redressement judicaire. Quelles synergies en escomptez-vous?
Dans le domaine de l'accès
Internet, InterneXt s'était positionné comme un ISP de proximité.
Il avait construit un backbone national tout en attaquant des clients
de manière locale. Tandis que Nerim disposait seulement d'un backbone
parisien et ne disposait pas de POP (point de présences) en province.
Le rachat d'InterneXt
entre dans une logique de complémentarité. Nous
avons récupéré 250 clients qui vont de la PME à
des grands comptes. De plus, le catalogue de produits Internet d'InterneXt
était plus complet que le nôtre.
Internext
faisait aussi de l'hébergement...
C'est également une activité auxiliaire de Nerim. Nous fournissons
du transit à des hébergeurs qui souhaitent installer des
serveurs sur notre propre réseau. L'hébergement est un mal
nécessaire pour les FAI pour des raisons d'infrastructures : la
plupart des clients d'un FAI font du téléchargement en attirant
du trafic descendant. Lorsqu'un FAI achète de la capacité
chez un opérateur de transit, il acquiert du transit en ascendant
et descendant mais les volumes de trafic ne sont pas les mêmes dans
les deux sens. L'hébergement permet de combler cette lacune. C'est
une activité très rentable puisque nos abonnés exploitent
un réseau d'infrastructure déjà installé.
Lorsque le groupe Iliad/Free a créé la société
Online dédiée à l'hébergement avec des tarifs
très agressifs, il a suivi la même logique. Aujourd'hui,
nous avons 1 Giga de capacité de trafic et nous en utilisons 400
MGo. Nous avons investi 1 million d'euros depuis la création de
Nerim pour monter notre réseau. Mais les plus grandes dépenses
sont survenues en 2002.
Jusqu'où
pourriez-vous pousser votre politique de croissance externe à bas
prix ?
Aussi loin que LDCom [sourire]. La concentration est très
importante dans notre métier car elle permet de mutualiser les
coûts très lourds d'infrastructures et d'améliorer
la marge très rapidement. C'est ce qui s'est passé avec
les rachats d'InterneXt et de Mangoosta. Je dirais que ce phénomène
est également un mal nécessaire.
Vous
parvenez à dégager des marges convenables avec l'ADSL ?
Elles sont très
faibles sur l'abonnement ADSL de base, à
512 Ko. En marge brut, on parle de 15%. En marge nette, cela tourne autour
de 5%. Avec des offres en dessous de 30 euros, c'est mission impossible
pour rentabiliser. En
2002, Nerim a réalisé un chiffre d'affaires de 4 millions
d'euros. Nous avons atteint l'équilibre d'exploitation en novembre
dernier.
Pariez-vous
sur une prochaine baisse du prix de gros de l'ADSL ?
Je
ne pense pas que France Telecom soit en mesure d'appliquer de nouvelles
baisses. L'Autorité de Régulation des Télécommunications
verrait cette initiative d'un mauvais oeil car elle souhaite prioritairement
favoriser le dégroupage, afin d'équilibrer la concurrence
au niveau des opérateurs. Si France Telecom obtient une baisse
des prix de gros ADSL, quel serait l'intérêt d'aller voir
les opérateurs alternatifs ?
A côté
de l'ADSL, quelles autres pistes xDSL explorez-vous ?
L'ADSL était jusqu'ici
la seule technologie proposée. Nous travaillons sur des offres
SDSL avec LDCom afin d'assurer un débit symétrique à
nos clients. Elles se concrétiseront si l'opérateur parvient
à les exploiter dans de bonnes conditions. Mais nous rencontrons
des soucis avec un contrat ADSL dégroupé que nous avons
signé en octobre dernier avec LDCom. Nous voulons que nos clients
bénéficient de prix plus compétitifs et qu'ils disposent
d'une meilleure qualité dans les temps de latence (mesure du temps
de réponse d'un serveur connecté à Internet).
Nous voulions migrer l'essentiel de nos clients sur le réseau LDCom
entre novembre et décembre. Nous avons effectué des tests
sur quelques lignes et nous avons observé des coupures de plusieurs
semaines voire un mois. Ce qui est anormal.
Cherchez-vous à
obtenir une licence d'opérateur auprès de l'ART ?
Non. Pas dans l'immédiat. Nerim se positionne comme
un FAI, nous ne cherchons pas à développer une infrastructure
d'opérateur. Mangoosta a essayé et on voit comment s'est
terminé le projet. Il existe encore des FAI qui n'ont pas fait
le pas : c'est le cas de Club-Internet malgré sa dimension importante.
Cela ne nous pénalise nullement dans notre développement.
Comment analysez-vous
le marché de la fourniture d'accès Internet ? En terme de
concentration ou de segmentation ?
La concentration va continuer tant que la crise perdure.
Il n'y a plus beaucoup d'acteurs en France. Et je ne parle pas des FAI
locaux. Autour de moi, je vois des prestataires comme Magic Online ou
EasyNet. Mais ils sont peu nombreux à tenir le coup.
Nerim
a reçu des propositions de rachat ?
J'ai
déjà eu quelques discussions à ce sujet mais je ne
peux pas vous dire avec qui.
Vous
souhaitez faire appel à des investisseurs externes pour le financement
de vos activités ?
Si cela avait été
le cas, vous n'auriez pas entendu parler de Nerim.
Vous avez suivi les
péripéties de Free avec Wanadoo autour du peering la semaine
dernière ? (Lire l'article
de JDNet Solutions du 24/01/03)
Oui. Le dénouement
m'a beaucoup amusé. Jusqu'ici, Free avait des relations très
particulières avec France Telecom concernant le peering. France
Telecom prend parfois des positions très contractuelles et très
bornées et Free, des positions en général très
bornées. Dès qu'il s'agit de changer les relations, ça
fait du bruit.
Et chez Nerim, quelles
relations avez-vous avec France Telecom ?
J'essaie d'entretenir de bonnes relations. Mais, vu l'état
du marché, les conditions contractuelles se durcissent et je ne
suis pas en position de force pour négocier.