JDN. A quoi sert un
prix de plus ?
Eric Morgain.
Ce n'est pas un prix de plus. D'abord, il est unique dans le domaine des
sociétés technologiques, car il concerne vraiment les sociétés productrices
de technologies, pas les utilisatrices. Par ailleurs, c'est le seul palmarès
international.
Qu'est-ce
qui caractérise à vos yeux une entreprise technologique?
Ce sont les entreprises qui apportent une innovation dans
le domaine technologique, qui ont un fort taux d'investissement en recherche
& développement et qui déposent des brevets. Nous visons les producteurs
de technologie, pas les distributeurs. Pour nous, il est évident que depuis
toujours les technologies sont à la source du développement. Dans ce cadre,
nous allons assez loin : cela recouvre effectivement les NTIC, mais aussi
toutes les technologies de l'ingénieur (mécanique, optique, chimie
).
Considérez-vous qu'une
forte croissance est le signe d'une bonne santé ?
Le palmarès est fondé sur un critère unique au départ :
la croissance du chiffre d'affaires sur une période de cinq ans (1998-2002
pour cette édition). On observe que les entreprises qui ont cinq
ans et plus sont saines à travers leur capacité de résistance aux aléas
du marché. C'est notre troisième édition et très peu d'entreprises du
Fast 50 ont échoué. Cette année, 80% des entreprises déjà inscrites sont
rentables sur l'année 2002. Or; ce qui nous intéresse c'est la croissance
rentable. Nous avons aussi un prix spécifique sur la création d'emploi,
parce qu'elle nous semble être une question essentielle. Enfin, nous avons
créé un prix spécial pour les sociétés qui faisaient plus de 15 millions
d'euros de chiffre d'affaires en 1998, parce que certaines de ces sociétés
ont des fortes croissances, mais à des taux pas forcément aussi élevés
que des sociétés qui font 10 millions d'euros.
Quelles évolutions
marquantes avez-vous relevées parmi ces entreprises?
Nous sommes très agréablement surpris par la sélection
de cette année. Nous pensions que l'année 2002 n'allait pas être bonne.
Or on se rend compte que parmi les entreprises déjà inscrites (250 pour
l'instant), certaines ont fait en 2002 des performances incroyables. Par
ailleurs, dans les cinquante premières de l'année dernière, 80% se sont
réinscrites et beaucoup figurent à nouveau dans les 50 premières à ce
stade.
En quoi les entreprises
françaises se caractérisent-elles ?
La différence importante, et elle est symptomatique, concerne
les taux de croissance. Les deux dernières années, ils étaient infiniment
plus importants en Angleterre et aux Etats-Unis qu'en France. Aux Etats-Unis,
cela s'explique par la taille du marché, ce qui n'est pas le cas en Angleterre,
où l'on voyait des taux parfois dix fois supérieurs aux nôtres. D'un autre
coté, lorsque l'on consolide les classements au niveau européen, la France
est le deuxième pourvoyeur de candidats classés. Sur les 500 premières
sociétés européennes, une centaine sont françaises, même si elles font
un peu le "ventre" du palmarès.
Par ailleurs, on constate une redistribution des cartes en termes de secteur
d'activité. Sur les premières éditions, le secteur logiciels réalisait
les meilleures performances. Cette année, il correspond à un tiers des
dossiers déjà reçus, mais on observe un retour en force des télécoms,
qui représentent la plupart des meilleurs dossiers. Tout le monde les
avait enterrées, et notamment les services à valeur ajoutée pour la téléphonie
mobile. Pourtant, on voit que dans l'ombre, des gens ont fait un bout
de chemin assez spectaculaire et ont notamment trouvé un levier assez
fort en matière de développement international. C'est ce qui manque aux
entreprises de logiciels plus classiques pour passer de bons taux de croissance
à des taux exceptionnels.
Enfin, on observe une percée des entreprises liées à l'environnement (énergies
renouvelables, traitement des déchets, mesure de la qualité de l'eau ou
de l'air). Elles sont sur des marchés de niche qui leur permettent des
taux de croissance intéressants et surtout des taux de marge nette de
l'ordre de 15 à 20%. Et la plupart de ces sociétés sont en province et
sont de vraies locomotives du développement économique local.
Pour revenir à la high-tech,
comment jugez-vous la situation en France aujourd'hui ? Quel est votre
diagnostic sur une éventuelle reprise ou un éventuel frémissement ?
Nous n'avons pas d'indicateurs précis, mais il semble qu'il
y ait effectivement un frémissement. On le voit à travers le nombre de
contacts ou d'entreprises qui nous appellent, notamment dans le domaine
de la croissance via des fusions-acquisitions. Mais nous sommes de façon
générale très prudents chez Deloitte, et pour l'instant, ce n'est pas
vraiment un boom.
Comment Deloitte a-t-il
traversé la période difficile qu'a connue le marché de l'audit et du conseil
?
Nos performances sur l'année 2002-2003 (comptes clôturés
au 31 mai) ont été satisfaisantes. Dans le domaine de l'audit, l'année
dernière a été marquée par des gains de très grands mandats, le commissariat
aux comptes de France Telecom par exemple.
Qui sont vos grands
clients en France ?
Dans les TMT, France Telecom, Alcatel, Sagem, Prosodie,
Business Objects. Dans les médias, nous avons Le Monde, NRJ. Et puis Air
France, Carrefour, Alstom, Renault, Suez, Société Générale, Club Med
Et quelles sont leurs
préoccupations aujourd'hui ?
Il y a certainement eu un effet Enron dans le monde financier
et une préoccupation des sociétés cotées en général en termes de transparence,
de sécurité de l'information financière, etc. Chez les entreprises de
taille moyenne, on sent un besoin important de recherche de productivité
et une nouvelle problématique va arriver dans les entreprises patrimoniales,
la phase de succession et de changement de management. Par ailleurs, en
raison de la globalisation, les entreprises moyennes commencent à prendre
la mesure de la concurrence des pays émergents, des délocalisation. Elles
nous demandent de travailler sur la transformation et l'augmentation de
leur valeur ajoutée en termes de services, d'innovation...
Qu'avez-vous l'impression
d'apporter à vos clients?
Dans le domaine de la sécurité financière, nous apportons
vraiment tous les éléments indispensables pour une information financière
et un gouvernement d'entreprise au meilleur niveau du marché. Dans le
conseil, nous apportons des solutions très opérationnelles et concrètes
sur l'augmentation de la performance, la diminution des coûts, l'analyse
des process, avec par exemple des outils d'aide à l'accélération de la
sortie des produits, une problématique fondamentale aujourd'hui pour toutes
les entreprises qui innovent. Conformément à la Loi sur la sécurité financière,
nous séparons nos activités de conseil et d'audit [NDLR : il
est désormais impossible à une même société d'exercer les deux types d'activités
pour un même client].