Après d'âpres arbitrages
politiques et budgétaires, la loi pour l'initiative économique a finalement
été adoptée le 21 juillet 2003. Ses dispositions relatives à l'ISF font
néanmoins l'objet d'un recours devant le Conseil constitutionnel. C'est
donc sous cette réserve que nous commentons ici les trois mesures qui,
en matière d'ISF, allègent significativement la fiscalité des particuliers
détenteurs de participations dans des sociétés.
Les modifications du dispositif actuel prévoient
à compter de 2004 une exonération partielle des participations existantes
et totale pour les souscriptions réalisées au capital de PME.
1.
Exonération partielle des titres faisant l'objet d'un engagement de conservation
On sait que les dirigeants bénéficient
d'une exonération d'ISF sur les titres qu'ils possèdent dans la société
dans laquelle ils exercent leur activité. Mais les associés n'ayant pas
la qualité de dirigeant ou les dirigeants ne remplissant pas les conditions
pour bénéficier de l'exonération au titre des biens professionnels devaient
jusqu'à ce jour, intégrer leur titres de participation dans l'assiette
de l'ISF.
La nouvelle loi permet désormais à ces derniers
d'être exonérés d'ISF à concurrence de la moitié de la valeur de leurs
droits sociaux à condition de s'être engagés au préalable avec d'autres
associés à conserver pendant au moins 6 ans, une fraction du capital fixée
à 20 % pour les sociétés cotées et à 34 % pour les sociétés non cotées.
Cet engagement est assorti de certaines conditions.
- Les titres concernés sont ceux des sociétés ayant une activité industrielle,
commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Sont donc exclus les titres
de sociétés ayant une activité purement civile telle que par exemple,
la gestion d'un patrimoine immobilier. La frontière est plus délicate
pour les sociétés holdings. Les holdings pures dont l'activité se limite
à la simple détention de participations en sont exclues. Celles qui en
revanche peuvent être considérées comme animatrices de leur groupe peuvent
bénéficier de l'exonération partielle.
- L'engagement de conservation des titres est un engagement collectif
qui doit être signé par le redevable avec d'autres associés ; en outre,
l'un des signataires doit exercer dans la société une fonction de direction.
- L'engagement doit avoir été souscrit avant le 31 décembre 2003 et enregistré
auprès de l'administration.
- Certains évènements sont de nature à remettre en cause l'exonération
partielle d'ISF. Tel sera le cas de la cession à un tiers non signataire
du pacte. L'opération de cession entraîne pour le cédant la remise en
cause de l'exonération partielle depuis l'origine. Il devra donc acquitter
l'ISF dont il a été dispensé pour chaque année concernée assorti de l'intérêt
de retard de 0,75% par mois. Si la cession a eu pour conséquence d'abaisser
la participation des autres actionnaires en dessous des seuils de 20%
ou 34%, ils disposeront d'un délai d'un an pour conclure un nouvel engagement
de conservation de titres.
- D'autres évènements peuvent influer sur cette exonération. Ainsi, une
augmentation de capital ayant pour effet de diluer les signataires en
dessous des seuils de 20% ou 34% n'aura pas de conséquence sous réserve
qu'ils respectent l'engagement jusqu'à son terme. De même une fusion n'entraînera
pas de remise en cause sous réserve de conserver les titres remis en contrepartie
de l'opération jusqu'au terme de l'engagement pris pour les titres d'origine.
Conclusion : pour bénéficier de cette mesure dès 2004, il est
absolument impératif de commencer à négocier avec ses associés un engagement
de conservation de titres avant le 31 décembre 2003.
2. Exonération des titres
résultant de la souscription au capital des PME
L'autre mesure marquante de la réforme
consiste à exonérer d'ISF les titres reçus en contrepartie de la souscription
au capital d'une PME soit lors de leur constitution soit à l'occasion
d'augmentations de capital.
Les PME visées sont celles exerçant exclusivement
une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale
et ayant, lors de la souscription des titres, les caractéristiques suivantes
:
- Un effectif de moins de 250 personnes
- Un chiffre d'affaires inférieur à 40 millions d'euros ou un total de
bilan inférieur à 27 millions d'euros
- Etre indépendantes, c'est-à-dire avoir un maximum de 25% de leur capital
qui ne soit pas détenu par une ou plusieurs entreprises ne répondant pas
à la définition d'une PME
Conclusion : ces dispositions étant applicables aux souscriptions
réalisées à compter de la date de publication de la loi, l'exonération
s'appliquera donc pour la première fois à l'ISF 2004. Il n'est donc pas
nécessaire de différer jusqu'à cette date les créations de société ou
les augmentations de capital pour pouvoir en bénéficier.
3. Titres des sociétés
ayant le caractère de biens professionnels
Le dernier volet marquant de la réforme
de l'ISF consiste à abaisser le seuil permettant à certains dirigeants
ne détenant pas 25 % du capital de leur société d'être exonérés d'ISF
au titre des biens professionnels.
On rappelle en effet que pour les dirigeants,
sont considérés comme des biens professionnels les titres dont le propriétaire
:
- Exerce des fonctions de direction qui lui procurent plus de la moitié
de ses revenus professionnels
- Et détient plus de 25% des droits de vote de cette société. Toutefois
ce seuil n'est pas exigé si la valeur de ses parts représente plus de
75% de la valeur brute de son patrimoine.
La loi a pour objet de ramener à compter de 2004
ce seuil concernant la proportion relative des titres dans le patrimoine
de 75% à 50 %..
Conclusion : pour les détenteurs de participations, ces différentes
mesures sont l'occasion de procéder à une revue de leur portefeuille pour
se mettre en position, d'ici au 1er janvier 2004, date prise en compte
pour la détermination des bases de l'ISF, de bénéficier de ces nouvelles
mesures.
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[Rédaction, JDNet]