Manuel
Chaves de Oliveira (Crédit Agricole Asset Management)
: "L'OPA d'Oracle est hostile et avec une prime dérisoire
!"
D'un point de vue strictement boursier, l'OPA d'Oracle sur PeopleSoft est très peu conventionnelle, voire incongrue. Eclairage d'un spécialiste. (Jeudi 12 juin 2003)
JDNet
Solutions. En tant que gérant de portefeuille TMT, comment
réagissez-vous à l'OPA d'Oracle sur PeopleSoft ? Manuel Chaves de Oliveira.
L'offre d'Oracle me laisse perplexe pour l'instant,
je ne suis pas encore convaincu de leur véritable objectif
: réussir cette acquisition ou affaiblir deux concurrents
sur le point de s'allier. L'acquisition serait en tous
cas réalisée afin d'éteindre purement et simplement la
ligne de produits Peoplesoft et de récupérer une base
de clients. De plus, la façon de procéder d'Oracle
sort vraiment de l'ordinaire. Il s'agit d'une OPA hostile
avec une prime dérisoire ! On ne fait pas une offre à
16 dollars pour un titre qui en vaut déjà
plus de 15 la veille... La démarche même
vis-à-vis des clients de Peoplesoft me paraît
également discutable car, comme je le disais, il
me semble que la volonté de faire mourir les produits
PeopleSoft dans des délais brefs soit bien réelle
chez Oracle.
A
qui profite le crime ? Il n'y a pas de
certitude en la matière mais tous ces facteurs
sont plutôt favorables au leader SAP, ce sont des
aveux de faiblesse et d'insuffisance de taille critique
par rapport à lui. Face à ce qui se prépare,
certaines entreprises en phase de réflexion vont
peut-être se reporter sur SAP, pour plus de sécurité.
Peut-être vont elles en effet préférer
ne pas prendre le risque de choisir un éditeur
dont les développements seraient arrêtés
quelques temps plus tard. Bien entendu, le processus de
décision des entreprises pour implémenter
un ERP ne se fait pas en trois jours, elles ont donc encore
le temps de voir ce qui va concrètement se passer
mais cela peut les influencer d'une manière ou
d'une autre.
SAP a toujours fondé son développement sur
une croissance organique et le développement de produits
en interne. Il est d'ailleurs paradoxal de constater comment
cette société a bénéficié
de la baisse des dépenses d'investissements des
entreprises survenue dès l'an 2000. Sur le terrain
du CRM par exemple, SAP était à ce moment
là clairement en retard par rapport à ses
concurrents, Siebel notamment. Mais grâce au report
des dépenses des entreprises, SAP a pu refaire
son retard et propose aujourd'hui des solutions recouvrant
les principaux besoins des utilisateurs.
Comment
voyez-vous l'évolution de cette affaire ? Rien ne peut se
passer pour le moment car le prix proposé est inférieur
au cours de bourse actuel. Ensuite, si le prix est révisé,
l'OPA pourra se faire car Oracle dispose des liquidités
nécessaires pour réaliser l'opération.
L'offre d'Oracle est valable 20 jours mais ses actionnaires
doivent approuver cette décision. Ce qui est probable
de toutes les façons, c'est que cette OPA relentisse
le processus de fusion entre PeopleSoft et J.D. Edwards.