Corel
passe aux mains de financiers dans la controverse
L'éditeur canadien passe aux mains du fonds d'investissement Vector, malgré l'opposition de son fondateur et d'actionnaires dissidents. Retour sur une longue descente aux enfers. (Mardi 26 août 2003)
L'éditeur canadien
Corel,
connu pour ses suites graphiques CorelDraw et bureautiques
WordPerfect, vient de passer sous contrôle du groupe
financier américain Vector.
Ce dernier - déjà propriétaire de
RealNetworks et de Landesk Software - a en effet reçu
la bénédiction de la Cour Supérieure
de Justice de l'Ontario (Canada) pour acquérir
le reste du capital encore détenu par les actionnaires.
Microsoft avait déjà cédé
en mars dernier au fonds d'investissement les 20% du capital
qu'il détenait dans la société pour
un dixième de son investissement initial (13 millions
de dollars contre 135 millions en octobre 2000).
Un rachat qui n'est pas allé de soi, le fondateur
de la société et une poignée d'actionnaires
s'étant vigoureusement opposés à
l'opération.
Un
rachat malgré l'opposition d'un groupe dissident Débutées
début 2003, les tractations ont donc abouti le
22 août dernier, alors que la justice canadienne
donnait son aval au rachat des actions de l'éditeur
par Vector. A raison de 1,05 dollar par action, les actionnaires
réaliseront un "bonus" de 42% par rapport
au cours de bourse constaté au début des
discussions avec le fonds (0,74 $). Un bonus tout relatif
sachant que l'action a valu 25 dollars début 2000,
ayant même atteint les 50 dollars fin 1999... Elle
valait encore 4 dollars en août 2001.
Les conditions du rachat sont dénoncées
par le fondateur de la société, Charles
Golden, et quelques autres actionnaires. Ils ont d'ailleurs
créé le site Corelrescue.com
pour s'opposer à ce rachat, qui intervient selon
eux à un très mauvais moment, compte tenu
de la faiblesse du cours de bourse. La société
disposant de 75 millions de dollars de trésorerie
et n'ayant pas de dette, il aurait été opportun
selon eux d'attendre.
Selon le groupe dissident, même le très controversé
ex-PDG Michael Cowpland serait de leur avis. Mais la justice
canadienne a tenu compte du vote des actionnaires qui,
à 80%, ont approuvé le rachat.
Une
descente aux enfers amorcée à la fin des
années 1990 Corel a commencé
à voir sa réputation ternie par des ennuis
juridiques intervenus en 1999. L'Ontario Securities Commission
accusait en effet Michael Cowpland, alors P-DG de la société,
d'avoir profité d'informations internes pour vendre
14 millions de dollars d'actions avant l'annonce de résultats
moins bons que prévus au troisième trimestre
1997.
Sur le plan commercial, Corel n'a jamais su s'imposer
face au géant Microsoft sur le terrain des suites
bureautiques, alors que les produits de la gamme CorelDraw
ont dû faire face à une concurrence de plus
en plus exacerbée, celle d'Adobe notamment.
Quant à la volonté de l'éditeur de
s'orienter vers le monde Linux, elle fût avortée
en août 2001, à peine un an après
l'investissement de 135 millions de dollars de Microsoft
dans la société. La division Linux de Corel
fût alors cédée
au canadien Xandros. Quant à la vente des 20% du
capital détenus par Microsoft à Vector début
2003, elle sonne d'un autre côté peut-être
aussi le glas du développement de .Net au sein
des solutions de Corel.
Avec les rachats de Micrografx
fin 2001 et de SoftQuad Software début 2002, l'éditeur
s'est orienté vers XML, ce qui constitue très
certainement aujourd'hui une de ses principales cartes
maîtresses à jouer. La société,
après maintes vagues de licenciements, compte aujourd'hui
730 salariés.