JDNet Solutions: Il semblerait
que la panne de longue durée que nous avions comptabilisée
pour Internet Fr dans le précédent classement n'en soit
pas une. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet ?
Domenico Surace:
Comme vous pouvez l'imaginer, nous n'avons pas eu une panne de trois jours
et demi consécutifs. Chez nous, chaque client dispose de son propre
serveur web Apache. Tous les autres serveurs Apache ont démarré
sans problème. La page testée par Witbe est la seule à
ne pas avoir été rétablie de façon immédiate.
Or, nous ne générons pas d'alerte spécifique vis-à-vis
de ce type de sites. Nous ne nous en sommes pas aperçu tout de
suite car Witbe nous plaçait en tête de position quand nous
avons vérifié sur le moment. Et c'est seulement en fin de
semaine que nous avons remarqué que les résultats avaient
changé.
De plus en plus d'hébergeurs sur plates-formes
mutualisées évoluent vers la mise à disposition de
serveurs dédiés pour leurs clients. Quel est votre positionnement
actuel ?
Pour nous, l'hébergement partagé
représente une petite portion de notre CA. D'une manière
générale, nous nous positionnons sur le haut de gamme de
l'hébergement qu'il soit dédié, critique, ou un certain
type de formule partagée avec un service de qualité. Dans
cette dernière catégorie, les prix du marché varient
entre 35 et 150 euros par mois. Cette différence s'explique par
le nombre de clients sur une seule plate-forme exploitant les mêmes
ressources mutualisées. Certains hébergeurs pratiquent l'overbooking
sur leurs machines. Ceux qui affichent un prix de 35 euros sont obligés
de placer 500 clients sur un même serveur. Cela remet en question
la qualité de service, nuit à la disponibilité du
site, et suppose des contraintes importantes en matière de sécurité
liées à la présence commune d'une multitude de clients.
Quand Internet Fr dit proposer de l'hebergement partagé, ce n'est
pas dans cette optique mais avec une approche différente. Nous
fournissons à nos client un service haut de gamme comprenant la
sécurité et la supervision d'applications. Cela veut dire
que, pour chaque site, nous supervisons l'application du client. D'autre
part, nous nous engageons sur un nombre maximum de sites mutualisés
sur la plate-forme en vue de garantir la qualité de service et
la disponibilité. Donc, là où nos prix sont de 150
euros par mois, un autre que nous hébergera dix fois plus de clients
sur la même plate-forme.
D'une manière générale, "haut de gamme"
signifie que nous offrons une externalisation complète des plates-formes
pour le compte de nos clients. Dans ce cadre, nous prenons aussi bien
en charge l'hébergement pur que la sécurité, l'administration,
le réseau et la connectivité. Maintenant, cela ne nous intéresse
pas de revendre de l'infrastructure et de la bande passante. C'est pourquoi
nous offrons une gestion complète de la sécurité,
des sauvegardes internes et externes, ainsi que la mise en place des systèmes
de distribution des applications et la supervision de ces dernières
en 24/7. Ceci représente notre core business dans lequel nous réalisons
la plupart de notre CA.
Lorsque vous dites supervision, et externalisation,
comprenez-vous une notion d'automatisation que l'on retrouve plus généralement
chez les MSP
? D'autre part, quel système de supervision avez-vous choisi ?
Chaque client vient avec sa propre application.
En ce qui nous concerne, nous ne nous occupons que des systèmes
de bases de données. Nous avons un logiciel spécifique pour
qu'elles soient tout le temps disponibles. Celles-ci sont aussi bien être
du Oracle, que du IBM DB2 ou SQL Server, et elles fonctionnent sur les
systèmes d'exploitation Windows, Linux, Solaris, etc. En tant que
système d'administration, nous avons choisi Freshware qui permet
de superviser les applications. Après, nous modulons en fonction
de nos besoins.
Pourquoi ne pas avoir choisi BMC Patrol, Tivoli,
HP OpenView ou Computer Associates qui sont pourtant les plus en vue ?
Parce que ce sont aussi nos outils qui font la
différence en compétition face à la concurrence.
En ce qui concerne Patrol, nous n'avons pas vu l'utilité effective
de le déployer sur notre réseau. Ce n'est pas un produit
que nous jugeons suffisamment concret et efficace pour gérer les
applications. Il ne remonte pas toujours correctement les alertes. Des
fois les applications tombent et Patrol voit tout fonctionner correctement.
En ce qui nous concerne, nous surveillons
des scénarios, y compris en terme de load balancing (répartition
de charges). Dans ce domaine, tout le monde utilise les mêmes équipements
de Foundry, Cisco, etc. Notre force est que nous en connaissons bien le
paramétrage. La plupart des opérateurs se limitent à
surveiller le bon fonctionnement des ports. De notre côté,
si l'application rencontre un problème, le load balancer continue
à servir des sessions. C'est cela qui fait la différence
entre un hébergeur et un autre. Ce n'est pas seulement le logiciel
et le matériel, mais la façon de gérer tout cela
avec l'expérience, et cela fait sept ans que nous développons
notre savoir-faire.
Même avec Patrol, certains arrivent à définir des
paramétrages pour que cela fonctionne, mais ceux-ci sont très
complexes à connaître. Aujourd'hui, il faut des outils puissants,
mais aussi simples à utiliser. Dans ce domaine, le choix est fondamental
pour notre activité. Il faut de bons outils, mais il faut aussi
savoir s'en servir. Beaucoup de nos clients ont utilisé du Patrol
et ont été frappés par son niveau de complexité.
Maintenant, Tivoli est encore plus complexe que Patrol. HP OpenView est
très bien. Quant à Computer Associates, je n'ai pas regardé.
Mais pour moi, ce n'est pas un vrai éditeur. Ils achètent
les codes sources et les exploitent sans vraiment les connaître,
en les imbriquant dans leurs solutions globales. Après, cela donne
des produits hybrides qui sont parfois sans queue ni tête. Ils ont
des développeurs pour faire de l'assemblage, et cela tout le monde
le sait.
Quel est votre vision actuelle du marché
de l'hébergement dans lequel vous évoluez ?
Le marché est plutôt dur en ce moment,
dans le sens où il y a des projets intéressants mais une
concurrence féroce. Certains principes de compétition sont
même aujourd'hui assez surprenants. Par exemple, nous sommes constamment
sollicités pour faire des devis. En face, nous retrouvons les grands
opérateurs qui à chaque fois sortent leurs prix publics
au début. De notre côté, nous proposons nos prix classiques
qui sont généralement en dessous des leurs. Après,
les opérateurs appellent les clients pour leur suggérer
un prix moins fort. Malheureusement, cette tactique est négative
pour la bonne tenue du marché. Selon moi, ces opérateurs
vendent à perte certains services, qu'il s'agisse d'hébergement
sur serveurs dédiés ou de prestations à plus forte
valeur ajoutée.
Aujourd'hui, tout le monde est à la chasse aux clients. Les très
gros du secteur n'hésitent pas à casser les prix, mais je
ne pense pas que derrière, ils proposent la même qualité
de service. Pour mettre en place un service de qualité, en particulier
sur la supervision des plates-formes, il ne suffit pas d'exploiter une
infrastructure et des logiciels. On ne peut pas casser le prix de vente
du savoir-faire des hommes, sinon il n'y a plus de marge possible. Sur
un produit d'infrastructure ou sur la bande passante, la marge est minime.
Nous sommes donc positionnés sur les services à valeur ajoutée
en terme de sécurité et d'administration. Et si
nous cassons nos tarifs là-dessus, nous n'avons plus aucune marge.
Du reste, ce n'est pas le métier d'un opérateur d'administrer
des plates-formes. Leur activité se concentre sur la gestion du
réseau et de la bande passante. Comme les prix de vente de la connectivité
ont baissé, ils ont du monter dans la valeur ajoutée. Mais
ce sont eux qui ont baissé les tarifs de la bande passante. Aux
Etats-Unis, les hébergeurs à forte valeur ajoutée
ne sont ni des opérateurs, ni des câblo-opérateurs,
mais des sociétés spécialisées qui ont parfois
été rachetées mais sont en général
restées indépendantes. D'autre part, cela soulève
un autre exemple basé sur la théorie américaine.
Un opérateur qui gère un datacenter critique avec sa fibre
ne peut pas garantir une connectivité complète hors de son
réseau.
Faut-il en conclure que l'hypothèse d'un
rachat d'Internet Fr par un gros opérateur ne serait pas aberrante
?
Internet Fr fait partie d'un groupe privé,
EurAfNet, qui détient aussi l'hébergeur italien à
valeur ajoutée Level IP avec un datacenter à Milan, et NameBay,
un registrar de noms de domaines. Notre stratégie est d'évoluer
et de grandir, ce qui est en train de se faire. Concernant l'évolution
de nos offres, l'année en cours devrait être concentrée
sur nos offres de sécurité. Nous constatons que 80 % des
sites web sont facilement piratables. La plupart de ces sites tournent
sur des applications délaissées par les clients.
Aujourd'hui, de plus en plus de prestataires proposent des serveurs dédiés.
Mais assez souvent, ils vendent juste une machine et de la bande passante
sans vendre avec les mises à jour des systèmes et des applications.
Au bout d'un ans, celles-ci sont devenues très vulnérables,
ce qui explique le fait que beaucoup, beaucoup de sites sont piratables.
En ce qui nous concerne, nous expliquons aux clients qu'un firewall ne
suffit pas car aujourd'hui la plupart des attaques les dépassent
en intervenant à la couche 7 du modèle OSI (lire
notre questions/réponses). Et c'est pourquoi Internet Fr a
prévu de placer son atout sur la sécurité en 2002.
En novembre 2001,
Domenico Surace devient président-directeur général
de Internet Fr, à la succession de Marco Rinaudo parti diriger la
nouvelle filiale italienne LevelIP. Entré comme directeur général
à la création en 1995 du fournisseur de services d'hébergement
de sites web, il est notamment titulaire d'une maîtrise en informatique
et réseaux.
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