Samedi 22 - Mardi 25 avril 2000
Les acteurs du capital-risque tirent les leçons de
la correction boursière
Malgré la correction des valeurs technologiques, les acteurs
de l'investissements en France restent confiants même s'il la vigilance prédomine.
"Je pense que les petits projets ont peu de chance de
survivre désormais. C'est un peu la fin du 'small is
beautiful' et un retour à la sélectivité.
Mais c'est logique car il était un peu désespérant
de voir toutes les sociétés internet sur un
pied d'égalité". Avec ce constat cinglant,
Maurice Khawam, le responsable des investissements d'Apax
Partners résume un peu l'opinion générale
des acteurs du capital-risque en France après la correction
subie sur les marchés boursiers par les valeurs internet
lors des quinze derniers jours. Qu'ils soient incubateurs,
spécialistes des fusions acquisitions, leveurs de fonds
ou capitaux risqueurs, tous soulignent désormais que
les règles ont ou vont un tantinet changer en matière
d'investissements.
"Les pressions sur la valorisation des sociétés
va être terrible. Et cela favorisera plutôt les
projets de très grande envergure avec des équipes
de très haut niveau" poursuit Maurice Khawan.
Malgré la
correction, les financements ne vont donc pas s'arrêter
pour autant et les montants investis devraient même
rester appréciables selon Pascal Mercier de Chausson
Finance. "Un projet qui méritait 50 millions
de francs pour son développement il y a trois mois,
méritera toujours 50 millions de francs. "
Selon Ariel Ohana, spécialiste des fusions-acquisitions
chez
Media Invest, on va d'ailleurs vers un rééquilibrage
dans les rapports entre investisseurs et porteurs de projets.
"Cette chute est évidemment favorable aux capitaux-risqueurs.
Avant, avec les perspectives juteuses de sorties, les porteurs
de projets faisaient un peu de surenchère auprès
des investisseurs. Maintenant les capitaux-risqueurs investiront
les mêmes montants mais prendront une plus grande part
du capital".
Quant à Daniel
Sfez, co-président de l'incubateur
Start-up avenue "cette nouvelle sélectivité
va être profitable aux incubateurs. Car nous prenons
les dossiers très en amont et les investisseurs auront
désormais besoin de projets bien formatés dès
le départ. En revanche, il est clair que certaines
sociétés au second tour de table ou en phase
de pré-IPO vont souffrir dans les mois qui viennent".
Le but est donc maintenant de répérer très
tôt les bons projets pour éviter les désagréments
futurs. Et tous les regards se tournent évidemment
vers le B to B réputé moins risqué. Mais
comme pour le B to C il y a un an, tout le monde avance à
l'aveuglette sans vraiment connaître la valorisation
exacte de ces nouveaux projets.
"Je voudrais me tromper mais j'ai l'impression que certaines
erreurs du passé vont être reproduites sur ce
modèle. Tout le monde se rue dessus sans faire de distinction",
lâche Thierry Chetrit d'Intuitu
Capital.
Une analyse confirmée par Maurice Khawam : "Il
est très possible que des erreurs soient effectivement
commises dans ce domaine. D'ailleurs quand on regarde le nombre
de projets qui émerge, il est quasiment impossible
que tous soient encore présents dans deux ans".
"Certes, concède
Pascal Mercier, mais le risque est quand même moindre
notamment en matière de coûts d'acquisition des
clients".
Finalement tous
sont d'accord pour affirmer que les deux années qui
viennent seront plutôt fertiles en fusions et acquisitions.
"Avec
la chute des valorisations on pourrait désormais assister
à l'acquisition de sociétés internet
par des grands groupes traditionnels", explique Thierry
Chetrit. "J'imagine par exemple que les grands groupes
de la communication, peu implantés sur internet, peuvent
désormais s'offrir une web agency en cash à
moindre coût".
Même si, selon Maurice Khawam, "les capitalisations
restent quand même appréciables pour les valeurs
internet. Il y a toujours une prime pour ces valeurs".
D'ailleurs selon Ariel Ohana, ces fusions-acquisitions ne
se feront pas à l'emporte-pièce. "Avant,
toutes les acquisitions étaient considérées
comme bonnes dans le monde de l'internet. Aujourd'hui, les
sociétés vont peut être se poser un peu
plus de questions. Il y aura aussi de la sélectivité
à ce niveau", note-t-il. Mais il est clair qu'à
terme " tout click trouvera son mortar et tout mortar
trouvera son click" conclut Pascal Mercier.
[Jérôme
Batteau, JDNet]
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