Monsieur Jaune voit passer monsieur
Vert, il le poursuit en courant. La scène se passe
au First
Tuesday Paris. L'événement de la Net-Economie
fête ce mardi 3 octobre son premier anniversaire, sous
la très chic coupole du Printemps, tapissée
de vitraux colorés. Comme d'habitude, les entrepreneurs
arborent un autocollant jaune à leur veston, les investisseurs,
une pastille verte. Le First Tuesday pourrait se résumer
à la traque des Verts par les Jaunes. L 'enquête
Sofres réalisée pour le First Tuesday et "Libération"
vient de confirmer la volonté de la majorité
des dirigeants de start-up (58%) d'effectuer un nouveau tour
de financement. D'un côté donc, des idées
et autres concepts plus ou moins révolutionnaires,
de l'autre, de l'argent. Mais l'équilibre n'est pas
de rigueur : pour dix Jaunes, un Vert. Ils parlent. Beaucoup.
Ils s'écoutent parler. Enormément.
Le moins qu'on puisse dire,
c'est que l'événement n'est plus le même
qu'à ses débuts. Ne pénètre plus
qui veut dans le gotha des acteurs de la nouvelle économie.
Un
entrepreneur confirme cette évolution. "Au tout
début, le First Tuesday était une réelle
Net-Party. Il y avait une foule incroyable. Les gens buvaient
énormément, draguaient...". Delphine
Eyraud, organisatrice, explique: "Au CNIT de la Défense,
nous avons accueilli 1.800 personnes. C'était beaucoup
trop. Nous avons souhaité nous recentrer car l'événement
devenait trop ouvert. Il y avait clairement un risque de déviance".
Effectivement, ce First Tuesday accueille seulement 700 personnes,
alors que 2.300 s'étaient inscrites. Avant le "Netmeeting",
350 privilégiés ont pu assister aux interventions
d'Eric Archambeau (Benchmark Capital UK), de Rob Heyvaert
(The Capital Markets Company Belgique) et d'Andreas Gerdes
(IWorld, Allemagne). En français et en anglais, avec
un savant mélange des deux pour Eric Archambeau "By
the way, si vous n'avez pas lu ce livre..."
Vert ne dit plus à Jaune:
"Qui veut des millions?". C'est Jaune dit à
Vert: "Bonjour, je cherche des millions." C'est
que les temps ont changé. La
prise de concience des capitaux risqueurs après le
krach de mars est palpable à ce First Tuesday. Un
investisseur confirme: "Au CNIT, sur les 1.800 participants,
il y avait des entrepreneurs qui cherchaient 100 millions,
et des gars qui n'avaient pas encore créé leur
start-up. On rencontrait vraiment tout le monde et n'importe
qui." L'événement s'est très nettement
professionnalisé. Un autre ajoute: "J'ai rencontré
deux étudiants d'HEC qui avaient embauché un
chasseur de têtes. La raison: ils ne pouvaient plus
se charger seuls du recrutement parce qu'ils reprenaient l'école
après les grandes vacances..."
Un Jaune
erre parmi la foule à l'affut d'autres Jaunes. Cette
réunion lui permet de prendre des contacts avec de
futurs partenaires et de s'entretenir -de visu pour une fois-
avec des sociétés avec qui il travaille. "C'est
plus simple de venir ici une fois par mois que de s'acharner
à essayer de bloquer des rendez-vous."
"Je
vous laisse ma carte, je pense qu'on peut vraiment faire quelque
chose ensemble." Chargée des relations presse
d'une start-up, une jeune femme aborde et re-aborde, pratiquant
allégrement le lacher de cartes de visites. Elle se
rejouit du tournant que prend le First Tuesday. "Au début,
c'était une effervescence incroyable, doublé
d'une fiévreuse fébrilité. Maintenant
les contacts sont de plus grande qualité." En
juin, elle a mis en place un processus infaillible. Elle récoltait
des cartes de visite pendant toute la soirée, et, une
fois rentrée chez elle, se ruait sur son ordinateur
et passait la nuit à envoyer des mails à tous
les nouveaux contacts en leur remémorant leur courte
-mais efficace- discussion et en proposant une collaboration.
Sur la cinquantaine de cartes de visite récoltées,
une dizaine aboutissent à un accord. "Même
quand on ne conclut rien, c'est très important de venir
au First Tuesday. Certains contacts n'ont jamais débouché
sur un partenariat, mais m'ont apporté un réseau
primordial pour échanger informations et conseils."
Si elle arpente souvent ce type de réunion, des "Cyber-elles"
(groupe de femmes exerçant dans la nouvelle économie)
aux "Go Between", en passant par les soirée
"Up-e", et les "Net working talks" parrainés
par Arthur Andersen, elle confirme: "S'il n'y en avait
qu'un, ça serait le First Tuesday".
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