Samedi 2 - Lundi 4 octobre 1999
Affaire Axa contre Infonie: un bon point pour les hébergeurs
Le
28 septembre dernier, le tribunal d'instance de Puteaux a
rendu un jugement très intéressant en matière
de responsabilité des hébergeurs. Il a dû
se pencher sur le sujet dans le cadre d'une plainte de deux
sociétés du groupe Axa (Axa Conseil IARD et
Axa Conseil Vie) à l'encontre du fournisseur d'accès
Internet Infonie. Axa a assigné en janvier 99 pour
"diffamation publique" en invoquant les textes qui
régissent le droit de la presse (articles 29 alinéa
1 et 32 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881) conjointement
Infonie et son abonné, un ancien salarié du
groupe d'assurance, qui avait mis en ligne une page personnelle
intitulée "Comment Axa prend les gens pour des
cons", fermée après la découverte
des propos jugés outrageants. Les avocats représentant
Axa se sont appuyés sur l'argument selon lequel la
responsabilité de directeur de publication revenait
à Infonie et que l'auteur des propos était considéré
comme complice.
La défense de son côté a plutôt
accentué sa plaidoirie sur le caractère immédiat
du transfert d'informations sur Internet, qui serait assimilable
"au direct" tel que défini dans la loi sur
la communication audiovisuelle de 1982 (article 93-3 de la
loi du 29 juillet 1982).
Dans son jugement, le tribunal d'instance de Puteaux a débouté
les deux sociétés du groupe Axa et a refusé
de condamner Infonie en qualité d'auteur principal
de "diffamation publique". Le tribunal considère
que l'hébergeur n'a aucune maîtrise sur le contrôle
des informations avant que celles-ci ne soient diffusées
sur l'Internet et qu'il ne peut être considéré
comme directeur de la publication. L'auteur de la page personnelle,
dans le cadre de la procédure engagée ne pouvait
dès lors pas être condamné non plus. A
ce jour, le groupe Axa n'a pas encore émis le souhait
de faire appel de ce jugement.
La décision, qui alimente la jurisprudence sur le sujet,
est importante car elle considère que l'hébergeur
n'est pas responsable du contenu des pages qu'il accueille.
Il est tentant de faire un lien avec l'affaire Altern/Estelle
Hallyday mais les circonstances sont assez différentes:
le chef d'accusation portait sur l'atteinte au droit à l'image
et à l'intimité de la vie privée, et la procédure avait
été initiée en référé.
La décision du TI de Puteaux rejoint sur le fond l'amendement
déposé par le député Patrick Bloche (PS) dans le cadre du
projet de loi sur l'audiovisuel. Cet amendement vise "à clarifier
la responsabilité des intermédiaires techniques de la communication
par réseau" et à combler un vide juridique en attendant
l'adoption par le Parlement français d'une directive européenne
sur le sujet. Il stipule que la responsabilité des
hébergeurs n'est engagée sur le contenu qu'ils
hébergent qu'à partir du moment où ils
ont eu connaissance de son caractère potentiellement
délictueux et qu'ils n'ont pas pris les mesures nécessaires.
[Philippe
Guerrier, JDNet]
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