Interviews  

Pierre Alzon
Directeur général
Lastminute France

Quatre mois après le rachat de Dégriftour par le britannique Lastminute.com, Pierre Alzon directeur général de la nouvelle structure française, dresse un premier bilan à l'occasion de l'annonce des résultats de Lastminute.com pour l'exercice achevé au 30 septembre dernier, c'est à dire avant le rachat officiel du voyagiste français. Lastminute a réalisé un chiffre d'affaires de 34,189 millions de livres, soit plus de 360 millions de francs, avec une marge brute de 9,8% et 380 millions de francs de pertes nettes. Le groupe a par ailleurs simulé ses résultats en supposant que Dégriftour aurait été acquis un an plus tôt. Dans ce cas, le chiffre d'affaires de l'ensemble serait de 961 millions de francs avec une marge nette de 14,1%.

Le dirigeant de Dégriftour, aujourd'hui à la tête de la filiale française de Lastminute, détaille la nouvelle organisation et présente les premières synergies établies sur le marché français entre les deux sociétés.


Propos recueillis par Fabien Claire le 08 décembre 2000 .

JDNet. Comment s'est passée l'intégration entre les équipes de Dégriftour et Lastminute ?
Pierre Alzon. Nous venons justement d'organiser une fête sur un bateau en plein Paris pour fêter la réussite de cette intégration. Il ne s'agit pas évidemment de nous jeter des fleurs, mais ce type d'union n'est jamais évident, or nous avons fait vite et bien pour répartir les rôles et organiser les équipes.

Pouvez-vous rappeler le déroulement de l'opération de rapprochement ?
Le deal a été signé mi-août et a été validé par les assemblées générales à la fin du mois de septembre. Nous avons annoncé en interne le projet de réorganisation des deux équipes aussitôt et nous avons mis en place des groupes de travail, par métier et par département, pour voir comment tout le mode travaillait. En novembre, les équipes se sont réparties physiquement entre le site de Paris pour les activités loisirs, restaurants, billetterie, cadeaux plus le pôle marketing, et le site de Cergy (ndlr: ville d'implantation de Dégriftour) pour les activités voyages et le call-center. Les gens se sont déplacés pour chaque unité et à fin novembre, tout le monde avait intégré son nouveau bureau. Nous sommes aujourd'hui au total une équipe d'environ 300 personnes, dont 260 issues de Dégriftour et 40 de Lastminute.

Et pour le management ?
Je suis devenu directeur général des activités françaises et Denis Philipon, ancien responsable de la filiale française de Lastminute, est devenu directeur général adjoint en charge des activités hors-voyage aux côtés de Frédéric Battut, en charge du secteur voyage.

Il n'y a pas eu de frictions?
On s'était évidemment rencontré avant de signer et l'aspect relationnel était un élément majeur dans la prise de décision. En gros: ils me plaisent, je signe, sinon je ne signe pas ! Or, nous avons signé (rires). Pour le reste des équipes, nous ne pouvions par rencontrer tout le monde, d'abord parce que les discussions initiales étaient confidentielles, mais nous avions organisé des réunions à Londres et Paris. Nous avons bien vu que nous partagions les mêmes visions de la vente en ligne et du marché. Nos cultures sont très proches.

Quelle sont aujourd'hui les conséquences du rapprochement pour les sites ?
La fusion des sites est une autre étape très importante. Aujourd'hui, les sites sont beaucoup plus interdépendants, même si les deux demeurent. Nous avons fusionné l'outil technique de façon à ce que les équipes ne managent plus qu'une seule et même base, qui se déploie dans nos deux sites web.
Le principe désormais est de pouvoir rentrer une nouvelle offre produit sur une base pour qu'elle puisse être ensuite déclinée sur les deux sites. Nous avons également harmonisé la charte graphique autour de trois couleurs, le bleu le blanc et le rose au lieu des bleus et orange de Dégriftour. En revanche, nous avons assez peu refondu les pages d'accueil, mais il suffit par exemple d'aller dans la chaîne voyage de Lastminute pour trouver la plate-forme Dégriftour dans un design Lastminute.

Quels sont les principaux enrichissements pour les deux entreprises ?
D'abord, pour Dégriftour, nous sommes sortis du seul univers voyage en élargissant notre relation avec le client. Un voyagiste n'a malheureusement de relations avec son client que deux à trois fois par an, nous ne passons pas encore nos vies en vacances (rires). Lastminute a pu grâce à nous, changer d'envergure dans le secteur voyage, en augmentant sa puissance d'achat et l'étendue de l'offre.

Comment êtes-vous parvenu à faire accepter l'idée de marier Dégriftour, une entreprise aujourd'hui rentable, avec une dotcom en pleine phase de croissance et donc largement déficitaire ?
Nous étions certes équilibrés cette année, mais sur Internet, nous avions besoin de faire des investissements colossaux. Je l'ai annoncé au début de l'année 2000. Notre rentabilité est une rentabilité opérationnelle qui ne prend pas en compte notre nécessaire développement stratégique. Nous devions développer l'international, développer les plate-formes de commercialisation et investir massivement pour le marketing. Notre programme d'investissement dépassait de toute façon notre capacité d'autofinancement. Nous avons simplement fait le choix de nous marier avec Lastminute plutôt que d'ouvrir notre capital à un partenaire minoritaire.

Que représente encore le Minitel dans votre chiffre d'affaires?
Nous avions prévu depuis plusieurs années une diminution de 50% du chiffre d'affaires Minitel et c'est à peu près ce que nous constatons. Mais le Minitel n'est pas encore mort et nous allons même lancer très prochainement un service Minitel pour Lastminute, qui réutilisera en partie le Minitel de Dégriftour. Le Minitel Dégriftour, même devenu très minoritaire dans notre chiffre d'affaires, reste un service à très fort trafic.

Lastminute est présent sur la TV interactive dans l'espace boutique de TPS. Une version est -elle envisagée pour Dégriftour ?
Avant la fusion, nous n'avions pas souhaité tenter l'expérience car c'est une plate-forme coûteuse, une technologie complexe à alimenter et lourde à gérer. Lastminute propose effectivement des offres de dernière minute mais le chiffre d'affaires est très faible et dépend largement de la promotion des boutiques assurée par TPS. Nous croyons d'avantage à court terme au système de reconnaissance vocale mis en place par Lastminute en Grande-Bretagne.

De quoi s'agit-il ?
C'est un système de réservation par téléphone à partir d'un système de reconnaissance vocale, évitant ainsi à l'utilisateur de sélectionner ses choix à partir d'un menu déroulant numérique. Ce système expérimental en Grande-Bretagne permet de proposer une cinquantaine de produits via ce canal de distribution. Parmi les nouveautés, nous avons également mis en place une alerte qui permet à l'internaute de formuler une demande: Je recherche un aller-retour Paris-New York à telle date et pour tel prix. Notre système nous permet de lui proposer une offre dès que nous l'avons identifiée.

Sur un plan plus personnel, vous utilisez beaucoup le Net ?
Je suis très intéressé par les sites dédiés au hacking, j'aime beaucoup par exemple le site Astalavista. La problématique de la sécurité informatique m'intéresse en général, parce que la technologie me passionne.
J'aime également beaucoup les sites consacrés à la BD, comme BD Paradisio, et tous les sites de moto. J'étais également fan des sites de jeu de rôle mais j'ai vraiment de moins en moins de temps pour ça.

Vous achetez souvent en ligne ?
J'achète parfois des produits culturels sur les sites Fnac, Cdiscount, amazon... Je suis un consommateur moyen sur le Net. Lorsque j'ai un peu de temps, je passe plutôt du temps à rechercher des softs liés à la sécurité, à l'analyse réseau. J'aime aussi beaucoup Napster, Gnutella. Je cherche à voir un peu ce qui se fait dans le domaine.

Et qu'est-ce que vous n'aimez pas sur Internet ?
J'attache une très grande importance au respect de la vie privée, or sur Internet, c'est aujourd'hui redoutable. Tout peut être traqué, c'est presque Big Brother et je trouve cela terrifiant. Tout le monde cherche à tout savoir sur l'internaute, dont le commerçant, sous prétexte de lui fournir le meilleur service. Cette curiosité peut être commerciale mais aussi étatique ou simplement malsaine. Il y a des moyens pour casser cette traçabilité et j'aime bien pour cela tester les moyens de rompre la chaîne qui permet de remonter à l'internaute.


Pierre Alzon a débuté sa carrière dans l'audit et le conseil, notamment chez Constantin, où il est intervenu pour les commissaires aux comptes d'Air France et Amadeus. Il rejoint ensuite Francis Reversé, le fondateur de Dégriftour pour lequel il développe lui-même le logiciel de réservation de croisières de l'entreprise. Pierre Alzon conduit Dégriftour vers ses premiers développements Minitel en 1991, avant la vente de voyages dégriffés. En 1996, il lance le premier site Internet de Dégriftour puis en 1997 la marque Reductour, abandonnée depuis. En août dernier, Degriftour annonçait son rachat par le groupe Lastminute.com. A l'issue de la fusion, Pierre Alzon prend la direction générale des activités françaises du nouveau groupe et siège au conseil d'administration de Lastminute.



 

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