Interviews

Jean-Marc Dumesnil
Président
MGT


Spécialisée dans la levée de fonds, la société MGT s'adresse aux entreprises cherchant à développer leurs activités et à des start-ups en phase d'amorçage. Son PDG, Jean-Marc Dumesnil, juge les start-ups françaises de plus en plus professionnelles et prévoit le boom des valeurs internet en Bourse pour 2000.

Propos recueillis par Gaëlle Hassid le 13 octobre 1999 .

JDNet : L'ambiance des capitaux-risqueurs a l'air plutôt frénétique. Qu'est-ce qui a changé depuis six mois pour les start-ups du net ?
Jean Marc Dumesnil : Les investisseurs ont simplement pris conscience que l'économie a basculé sur le net. Il y a eu une prise de conscience de l'ensemble des entreprises. Internet recouvre l'ensemble des secteurs de l'économie, et pas seulement un segment de l'économie. Quand on est à la recherche d'un travail, par exemple, on va sur le net. Le processus va bien plus vite.

En quoi cela a affecté MGT? Quel est le rôle d'un "leveur de fonds"?
C'est très positif pour nous naturellement. Nous avons fait le pari en 1998 que la France suivra la même direction que les Etats-Unis. Nous avons lu une étude écrite par des capitaux-risqueurs américains pour comprendre les critères et les facteurs clés qui sont déterminants pour appréhender le concept des levées de fonds des entreprises de l'Internet. Ensuite, nous avons fait réaliser nous-même une étude pour la France. En fait, le rôle d'un leveur de fonds est simple: nous sélectionnons des dossiers, nous assistons le chef d'entreprise dans la rédaction de son business plan (BP) et nous l'interpellons sur sa stratégie. Nous travaillons beaucoup aussi sur le côté ressources humaines de l'entreprise.

Comment vous rémunérez-vous?
Nous ne demandons aucun honoraire fixe, il n'y a pas de frais de dossiers. En revanche, nous prenons 5% sur le montant de la levée. Nous n'avons aucun filet: si on travaille sur un dossier pendant des semaines et que nous ne concluons pas le deal, alors, c'est tant pis pour nous.

Combien de dossiers de start-ups du net recevez vous par jour?
Nous recevons deux à trois dossiers par jour. Nous traitons deux dossiers par mois, soit une vingtaine par an. Nous réalisons au final un certain nombre de deals, notre étant de se maintenir au dessus de 75%. Nous travaillons deux à trois mois sur un dossier.

Quels sont les critères de sélection? Comment estimez-vous la valeur d'un projet?
Le projet doit être pertinent. Le porteur du projet doit être capable de bien s'entourer et qu'il sache saisir les opportunités. L'équipe doit être compétente. En ce qui concerne le marché, celui-ci doit être un vrai marché et pas une niche. Il faut également -c'est très important- qu'il y ait une légitimité métier/produits. Le but n'est pas de reproduire un schéma américain mais il faut que le porteur du projet connaisse son métier. Prenons l'exemple d'Aquarelle: les deux associés vendaient des fleurs avant même leur lancement du site. Il est essentiel que le chef de l'entreprise ait la culture du métier. Enfin, il faut être pionnier, soit leader, soit numéro deux de son créneau.

Est-ce qu'il vous est déjà arrivé d'avoir un coup de cúur pour un projet qui semblait financièrement non viable?
Si on choisit de travailler sur un projet, on y croit. Sinon, nous ne choisissons pas le dossier. La logique, c'est d'être présent sur des opérations entre 10 et 20 millions de francs, ou 50 et 100 millions de francs. La plupart des entreprises avec qui nous avons travaillées reviennent nous voir pour réaliser des deuxième tours de tables. J'estime que nous sommes "mariés" avec le chef d'entreprise, nous sommes dans le même bateau.

Si vous aviez un seul conseil à donner à une start-up Internet qui cherche des fonds, quel serait-il?
Il faut que le chef d'entreprise ne soit pas indulgent et qu'il ait la capacité de mener le projet à son terme. Sinon, il doit accepter d'embaucher quelqu'un. Il existe d'ailleurs des PDG spécialisés dans des sociétés en phase d'amorçage, d'autres dans des phases de croissance. Chacun est adapté à un type de situation.

Les investissements se déplacent des logiciels au commerce électronique. Quel est selon vous le créneau à venir, le plus porteur
Je dirai le commerce électronique et les communautés virtuelles, qu'elles soient généralistes ou segmentées.

Comment trouvez-vous l'attitude des start-ups françaises?
C'est une véritable évolution: les gens sont de plus en plus professionnels. Nous tendons vers des business models à l'américaine. Dans l'ensemble, les gens sont prêts à recevoir des conseils. L'atmosphère est très dynamique.

Quels ont été vos dernières transactions?
E-sual, Net Trans, Kazibao, Aquarelle (cf. notre dossier capital-risque et Internet, NDLR). Nous avons levé près de 100 millions de francs dans les neufs derniers mois et notre objectif est d'atteindre les 150 millions de francs.

Il existe de plus en plus de fonds régionaux. Pensez vous que l'on tend vers des levées pour des start-ups locales venant de fonds régionaux et des levées pour des sociétés déjà "confirmées" venant de fonds plus importants ?

Les fonds régionaux vont effectivement se spécialiser dans les sociétés en phase d'amorçage ou seront partie prenante avec d'autres sociétés fonds en deuxième levées.

Que pensez vous de la valorisation des sites et notamment des 320 millions de francs payés par France Télécom pour Alapage ?
Considérant le positionnement d'Alapage, je ne pense pas que c'est un business qui sera à échelle mondiale. Cela étant, je ne connais pas le dossier.
Le sujet de la valorisation est délicat et celle-ci est fonction du business model. Si celui-ci est à vocation mondiale, alors, on peut vraiment parler de valorisation importante. Les sites à vocation nationale ne valent généralement pas autant q'un projet à vocation internationale.

Est-ce que l'arrivée de nouveaux types d'intervenants comme Intel ou Bernard Arnault va changer le paysage des VC?
Je trouve cela très bien car cela donne une autre point de vue de la situation, d'autres critères et d'autres ambitions que celle des capitaux risqueurs.

Les analystes financiers s'attendent à une explosion en Bourse des valeurs internet comme celle qui a eu lieu sur le Nasdaq. A quelle échéance attendez vous à voir ce phénomène en Europe?
Je pense que cela va se faire l'année prochaine, quand les levées dépasseront les 100 millions de francs.

Il y a de plus en plus d'associations telles que la Dream Team (cf article JDNet) ou le "cercle des business angels" de France Télécom. Est ce la fin des leveurs de fonds?
La Dream Team est une bonne idée en soi, mais, je crains que cette association n'ait aucune légitimité, et encore moins le temps pour venir en aide à des start-ups. Nous faisons un métier et non un loisir. Cette activité doit être perçue comme un vrai métier. La plupart des membres de ces clubs n'ont même pas levé de fonds...alors je ne vois pas comment ils vont conseiller les autres.

Que pensez vous des rencontres Capital IT?
Capital IT est en soi une très bonne idée. Tout le monde y gagne, aussi bien les capitaux risqueurs que les start-ups. Cela étant, les avis sont très partagés, certains reporchent à Capital IT d'être sous l'influence de Chausson Finance (le concurrent de MGT, NDLR).

Vous achetez sur le Net?
Oui, des fleurs sur Aquarelle.

Qu'est-ce que vous aimez sur le Net ?
C'est très pratique, on trouve tout. Pour s'informer, comme pour acheter.

Qu'est-ce que vous détestez sur Internet
Je ne déteste rien car quand je déteste, j'éteins mon ordinateur.

Jean-Marc Dumesnil est président de MGT. Il a travaillé en tant qu'associé dans la société de Bourse Bourse Courcoux Bouvet de 1980 à 1991. Entre 1991 et 1995, il a travaillé pour Paribas en tant que responsable mondial de la vente de titres tous marchés.

MGT en chiffres

BETC

Date de création
1995 (mais existe sous sa forme actuelle depuis fin 1996)
Effectifs
6
Marge brute
nc
Références
Aquarelle, Kasibao, Net trans, E-sual, Rouge et blanc, Studi.com.









Dossiers

Marketing viral

Comment transformer l'internaute en vecteur de promotion ? Dossier

Ergonomie

Meilleures pratiques et analyses de sites. Dossier

Annuaires

Sociétés high-tech

Plus de 10 000 entreprises de l'Internet et des NTIC. Dossier

Prestataires

Plus de 5 500 prestataires dans les NTIC. Dossier

Tous les annuaires