Béatrice
Isal-Chriqui est à la tête du nouveau département
interactif de la régie publicitaire IP France. IP France
est la première régie publicitaire pour l'univers
de la radio (RTL, RTL 2, Fun Radio, Sud Radio et RMC) et se développe
sur les nouvelles chaînes de télévision (la
Cinquième, RTL9, Fox Kids, MTV...). Le chiffre d'affaires
annuel pour la partie radio s'est élevé à
1,3 milliard de francs pour 1998 et à 150 millions pour
la télévision. Depuis 1998, IP France s'est tournée
vers l''Internet et sa nouvelle branche, IP Interactive, devrait
dégager un chiffre d'affaires 4 millions de francs en 1999
avec notamment en portefeuille les sites de Dégriftour.
Sa directrice, Béatrice Isal-Chriqui, raconte les premiers
pas d'une régie traditionnelle sur le Web.
Propos recueillis par Benoît Grange le 11
juin 1999 .
JDNet:
Présentez-nous IP Interactive...
Béatrice Isal-Chriqui: C'est un département
d'IP France qui appartient au groupe luxembourgeois audiovisuel
CLT-UFA. La régie traditionnelle existe depuis de nombreuses
années. En revanche, IP Interactive a été
créée il y a un an, en juin 1998. Nous sommes quatre
personnes pour l'instant et nous prévoyons de renforcer
très rapidement notre équipe commerciale.
Quels sont les sites que vous avez
en régie?
Nous
en avons six pour le moment. Les sites des radios du groupe, Fun
Radio, RTL
et RTL 2 depuis
juin, Fox Kids
depuis septembre. Et nous venons de prendre en régie les
webs du groupe Dégriftour, Dégriftour
et Réductour.
Sur
quels sites la publicité marche-t-elle le mieux?
On
s'est rendu compte qu'on était sur un marché de
"niches médias" puisque la totalité
du trafic des sites médias d'IP Interactive correspond
à un million de PAP (pages vues avec pub) par mois. Avec
l'acquisition récente de sites de commerce électronique
comme Dégriftour et de Réductour, on a fait un
bond à plus de 8 millions de PAP. Avec ces deux sites
importants, on acquiert un réel savoir faire dans le
domaine du commerce électronique. Les sites médias
enregistrent des taux de clics extrêmement importants
par rapport à des sites "classiques" de services
ou de commerce électronique dans la mesure où
on y vient pour rechercher de l'information, on s'y balade,
on zappe, on revient sur des pages... En revanche, quand on
vient sur un site de commerce électronique comme Dégriftour,
la motivation n'est pas la même: on est là pour
commander quelque chose de très précis. Mais sur
Réductour, les taux de clics sont très élevés,
bien supérieurs à la moyenne, de l'ordre de 3%
au mois d'avril 1999 (source DART). On a été très
surpris.
Quels
sont les formules de publicité que vous proposez?
Au départ la plupart des campagnes se
faisait sous la forme de bandeaux publicitaires classiques.
Depuis quelques mois, on s'aperçoit qu'il y a une évolution
vers le parrainage et le partenariat. On essaye de travailler
en partenariat annuel, par exemple avec la Fnac qui annonce
sur le site de RTL à l'année. Nous privilégions
le partenariat à long terme qui apporte véritablement
un "service" aux internautes de RTL. L'annonceur devient
un véritable client du site. On a travaillé de
cette même façon avec Wanadoo sur une période
un peu plus courte. Sur les sites de voyage américains
Travelocity ou Expedia, beaucoup d'annonceurs travaillent de
la même façon en immobilisant l'espace pour éviter
la concurrence. Deuxièmement, on commence vraiment à
voir maintenant de l'achat thématique, non pas horizontal
mais transversal. Par exemple un annonceur de la santé-beauté
qui va acheter la rubrique "thalasso" du site Dégriftour
ou Château on Line qui achète la rubrique "grandes
tables" de Dégriftour. Cela a mis un peu de temps
à venir. On commence vraiment à avoir des démarches
dans ce sens.
Quel
type de ciblage conseillez-vous?
Je conseille toujours pour des sites qui n'ont pas un trafic
très important de mixer une campagne classique générale
et du parrainage sur des cibles précises. C'est par exemple
un annonceur qui achète la rubrique économique
du site RTL et qui en plus "sur-pondère" sa
visibilité par une campagne classique. Clairement, lorsqu'on
n'achète que du parrainage, il y a un problème
de visibilité en terme de trafic. C'est le "mix"
sur des médias éditoriaux et sur des gros sites,
car le but, c'est d'être extrêmement proche de la
cible de l'annonceur. On a eu par exemple des campagnes SFR
très ciblées, avec uniquement les pages "luxe"
de Dégriftour. Troisième opportunité, c'est
l'offre combinée pour les sites médias entre antenne
et web. Maintenant, on commence à réaliser des
"process" intelligents qui mêlent par exemple
le web et la radio. Des annonceurs informatiques bien implantés
sur le Web commencent à vouloir élargir leur support
et veulent avoir une caisse de résonance sur l'antenne
pour projeter leur "territoire" de marque. La radio
à ce niveau est un tremplin idéal. Microsoft a
par exemple voulu être présent à la fois
sur le site et l'antenne de Fun Radio, et Wanadoo de la même
façon sur RTL. Par contre, il est important de ne pas
diluer la promotion. Tout dépend du budget. Il vaut mieux
être 100% sur Internet si on a un budget qui n'est pas
extensible. En revanche, si le budget est élastique,
il est idéal d'avoir un prolongement dans la presse et
sur d'autres supports.
Que pensez-vous du marché
de la publicité en ligne en France?
C'est
à peine 1% des recettes publicitaires pluri-médias
mais avec un taux de croisssance de 300%. C'est encore extrêment
faible, mais comme la croissance est exponentielle... Le web
peut être le relais de croissance des médias traditionnels.
Il permet à des entreprises comme IP de prendre des parts
de marché sur des médias où il n'était
pas présent. Par le biais d'Internet, on va pouvoir diversifier
nos solutions de communication... Quant aux annonceurs, ils
ne se posent plus la question de savoir pourquoi il faut êre
présent sur le web, mais de quelle manière. Ce
qui est important et révélateur, c'est la hausse
des budgets moyens pour les campagnes interactives. Internet
est véritablement devenu le sixième média
aujourd'hui. Beaucoup de budgets tournent autour de 200.000
francs dorénavant.
Le
"rich média" est-il l'avenir de la publicité?
C'est clair que le "rich media" apporte une réelle
valeur ajoutée. Le taux de clic est très bon sur
ce type de campagne. Mais il ne faut pas non plus phagocyter
le site. Les éditeurs doivent être vigilants car
c'est une forme de publicité très "intrusive".
Quel
est selon vous l'avenir des régies en France?
Je
pense qu'il y a plusieurs positionnements. Certaines régies
commercialisent deux ou trois sites moteurs. D'autres ont un
petit portefeuille et essaient de recréer des bouquets
à l'intérieur de leurs offres, des bouquets économiques,
des bouquets sports par exemple. Certaines régies, américaines
vendent aujourd'hui en réseau. Et puis il y a des régies
traditionnelles comme nous qui se développent sur les
métiers porteurs de l'Internet. Depuis un an, on voit
qu'il y a une réelle volonté de la CLT pour prolonger
tout le métier, le savoir-faire de la radio sur les médias
interactifs. Je pense qu'on se dirige vers une concentration
de "gros" acteurs, avec une internationalisation des
réseaux. Seuls resteront ceux qui s'internationalisent
et ceux qui auront des clients prestigieux. Si vous êtes
seul dans ce métier, vous êtes mort...
Une
bonne publicité sur Internet, c'est quoi?
Une bonne campagne de publicité sur une vague 15 jours,
avec au minimum 5 bandeaux. C'est une création
à plusieurs tiroirs, car il faut prendre en compte les
effets d'usure. C'est une création qui s'adapte à
la cible. Sur Fun Radio, on observe des taux de clic extrêmement
différents, suivant l'adéquation du message, de
la création et de la cible. Le "décalé"
marche très fort sur ce type de site, alors que "l'institutionnel"
est mieux adapté à Dégriftour. Pour un
même annonceur, il faut adapter tous ces paramètres
suivant les sites supports.
Quel
est votre site préféré?
Si je dis RTL, c'est pas du jeu ! (rires), alors CNN.
J'aime
beaucoup les sites américains et les sites de vente aux
enchères et de voyages. Mon surf est aujourd'hui est
assez in-objectif, car très professionnel...
Que
détestez-vous sur le Net?
C'est le temps de téléchargement qui dure trop
longtemps.
Je n'aime pas tellement les sites tout en flash, qui se coupent
d'une part très importante d'un bassin d'internautes,
car tout le monde n'a pas tous les plug-in nécessaires
Vous
achetez sur Internet?
J'ai
acheté une fois, sur le site de la Fnac
Béatrice
Isal-Chriqui, 34, ans est titulaire du DESS Gestion des Télécommunications,
de la Télématique et de la télévision
de l'université Dauphine. Après un passage à
"Télé Star" et "Top Santé"
pendant quatre ans, elle devient chef de produit à RTL
puis responsable des études et de la prospective au sein
du groupe IP France dans le domaine de la radio, télévision
et presse. En juin 1998, elle prend la tête d'IP Interactive.
IP Interactive: