Le Groupe
Stratégies -désormais Stratégies tout court-
restructure ses activités et monte en puissance sur l'Internet.
Outre son site -inauguré en mai 1998- et la newsletter
quotidienne (Stratégies Newsletter) réservée
aux abonnés, Stratégies vient de changer l'url de
son site qui devient Strategies-online.com,
du nom également d'un cahier de 16 pages consacré
au marketing de la nouvelle économie, chaque semaine dans
l'hebdomadaire papier. Premier bilan, projets et analyse du marché
publicitaire par Philippe Larroque, directeur général
de Stratégies, une division de Elsevier Business Information.
Propos recueillis par Rémi
Carlioz
le 1er mars 2000
.
JDNet.
En premier lieu, pouvez-vous nous expliquer ce que recouvre la
marque "Stratégies"?
Philippe Larroque: Historiquement, Stratégies
est un hebdomadaire, fondé en 1971. Aujourd'hui, la marque
Stratégies regroupe une soixantaine de salariés.
Stratégies est une division du groupe EBI (Elsevier Business
Information SA), filiale à 100 % de Reed Elsevier, huitième groupe
mondial de communication. En France, EBI est présidé
par Marianne van Leeuwen. Je suis pour ma part directeur général
de Stratégies et directeur des rédactions.
Depuis le 1er janvier, EBI en France regroupe d'une part Stratégies
et d'autre part Prat ESF Editions, qui publie de nombreux ouvrages
de référence en pédagogie, des guides pratiques
et juridiques, etc.
Comment
se ventilent les différentes activités de EBI?
EBI fait un chiffre d'affaires en France d'environ 210 millions
de francs. Stratégies au sein de EBI compte pour 70 millions
de francs en 1999. Stratégies est revenu à l'équilibre
en 1998, et sommes devenus bénéficiaires en 1999.
Et
que fait plus globalement le groupe Reed Elsevier?
C'est un groupe anglo-néerlandais coté à
Londres et à Amsterdam. Un nouveau directeur général
monde a été nommé en la personne de Chrispin
Davis. Le groupe comprend différents pôles : édition
scientifique et juridique, presse business et professionnelle,
des salons tels que le Mip TV, le Mip Com, le Midem, le Milia
etc., et Reed OIP qui organise en France par exemple la Fiac,
le Salon du Livre, le Salon Nautique, celui du design, etc.
Et
où en est aujourd'hui Stratégies en termes de diffusion?
Concernant Stratégies Hebdo, pour la période de
juillet 1998 à juin 1999 (la nouvelle DSH 1999 est en cours),
nous sommes à 13.636 en diffusion totale, et à 9.515
exemplaires en diffusion totale payée. Stratégies
Newsletter, réservée aux abonnés de l'hebdomadaire,
comptait 5.006 abonnés au 23 février dernier. Il
faut savoir qu'en novembre 1998, nous n'avions que 800 abonnés
à ce service. Il y a donc une vraie demande et, je pense,
encore une marge de manoeuvre de 1.000 à 2.000 abonnés
sur la Newsletter.
Quels
autres services ou produits proposez-vous?
Nous éditons neuf guides par an (Agences en deux tomes,
médias, corporate, marketing opérationnel, design,
études, santé et multimédia). Nous organisons
aussi six grands prix, dont le grand prix de la communication
publicitaire, celui des relations publiques, celui du design,
etc. Enfin, nous développons une activité "Stratégies
direct data", de ventes de bases de données, hors
abonnés évidemment. Il y a bien sûr aussi
le site sur lequel nous reviendrons j'imagine.
Aucun
prix du multimédia?
Si. A l'origine, le grand prix du multimédia était
accolé à celui de la publicité, décerné
en juin dernier. A l'avenir, nous allons "sortir" le
multimédia pour en faire un grand prix à part, le
Grand Prix Stratégies de l'Internet. Il récompensera
les actions de communication et de marketing en ligne.
Parlons
du site, qu'en est-il?
La première version de notre "portail" date de
mai 1998, la V2 de novembre 1999. Aujourd'hui, nous changeons
d'Url, qui devient Strategies-online.com.
Cela reflète à la fois une évolution et un
enrichissement, ainsi qu'une cohérence avec le contenu
rédactionnel. Nous lançons parrallèlement
un cahier hebdomadaire de 16 pages, broché dans Stratégies,
d'un format un peu plus petit, qui s'intitule également
Stratégies Online.com et qui couvre tout le marketing de
la nouvelle économie.
Le site quant à lui s'enrichit entre autres de fonctionnalités
audio, de la mise en ligne des guides, etc.
Comment
ces évolutions sont-elles prises en compte au niveau éditorial?
La rédaction dédiée est de 4 personnes, sans
compter les pigistes et les synergies avec la rédaction
de Stratégies dans son ensemble sur des thèmes plus
pointus comme le marketing opérationnel ou la relation
client.
Comment
se répartissent les rôles entre le site, la newsletter,
le cahier "papier", etc.?
La newsletter, c'est l'actu pure et dure. Le cahier hebdo traite
des dossiers, des enquêtes, de l'actualité, etc.
L'info se retrouve en partie, mais en partie seulement sur le
site. Celui-ci est plus grand public. Globalement, il n'y a pas
de duplication ni de doublon entre le site et l'hebdo. Ce sont
différents canaux qui délivrent différentes
infos. Nous fonctionnons en termes de gamme de produits.
Votre
site ne manque-t-il pas d'ambition ?
Ecoutez non, et on commence. Il faut juste de l'énergie
et des moyens. Ma priorité restait avant tout de renforcer
le journal, de développer notre portefeuille d'abonnés
et nos recettes publicitaires. Le site a tout de même fait
260.000 pages vues en janvier. La newsletter également
concentre beaucoup d'efforts. Il est tout de même normal
de privilégier les abonnés. Les abonnés,
ce sont le nerf de la guerre pour Stratégies. Mais le site
reste une priorité, en termes d'enrichissement du contenu
en particulier.
Accueillez-vous
beaucoup de pub sur vos supports électroniques?
Nous sommes prudents. Sur Stratégies Newsletter oui, et
quelques bandeaux sur le site. Mais c'est limité. Nous
sommes tous suffisamment bombardés de messages, cela nous
incite vraiment à la prudence.
Il est vrai cependant que la newsletter en particulier est un
outil de ciblage idéal et adapté pour les annonceurs.
Et
qui sont vos annonceurs sur l'ensemble des produits du groupe?
Il y a bien sûr les médias traditionnels, prédominants
au sein de nos annonceurs. Mais les "dotcom" arrivent.
Elles cherchent des contacts ciblés et utiles. Nous avons
aussi des conseils et des régies, ainsi que des marchés
"hors captifs" tels que la téléphonie
ou l'informatique.
Que
pensez-vous de la création publicitaire sur le Net?
Je dois bien avouer que c'est décevant pour l'instant.
Mais on va voir vite venir des choses plus intéressantes.
Pour l'heure cela reste factuel, plus de l'ordre de l'information
que de la publicité. Mais à la décharge des
annonceurs, les limites technologiques jouent aussi.
Pensez-vous
que la pub se résume à des bandeaux?
Non, Internet ne se résume pas à des bannières.
Il y a beaucoup d'autres choses, telles que le viral marketing.
On voit par exemple des dirigeants d'agences de marketing direct
qui passent patrons de structures interactives.
Vous
pensez à Xavier Romatet, patron de DDB Interactive et de
Rapp Collins?
Oui, c'est intéressant. Il se placent dans une logique
de conquête de volumes et de qualification de bases de données,
grâce à ce vecteur supplémentaire.
Et
votre analyse de la "mutation" des agences de pub?
Avant, le Net pour eux n'était pas rentable, c'était
vraiment epsilon par rapport aux marges sans commune mesure qu'ils
pouvaient faire par ailleurs. Aujourd'hui, les agences se rendent
compte qu'elles ne peuvent plus se passer des compétences
multimédia et commencent à racheter des structures.
Ont-elles
une carte à jouer?
Oui, car elles ont la relation avec l'annonceur. La réflexion
est entre leurs mains. Et cela commence à bouger, regardez
ce qui se passe en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, où
des réseaux créent de grosses structures.
Les agences ont une autre force, ce sont des gestionnaires de
marques. Le travail de stratège de marque reste un très
gros travail, quel que soit le média.
Mais
Internet a des spécificités, non?
Oui, Internet est à mes yeux le seul média avec
deux atouts: une capacité de puissance et d'irradiation
mondiale d'une part, la personnalisation d'autre part. Internet
permet de réconcilier le média et le hors-média,
voire plus encore. Ce n'est clairement pas qu'un support publicitaire.
Vous
parliez des agences, et du côté des marques ?
C'est un peu la jungle, et les marques sont complétement
diluées. Tout l'enjeu est d'exister, d'avoir une capacité
de visibilité sur la durée. Exister au milieu de
tout ce bruit ... Et combien font du bruit ?
Que
pensez-vous de la campagne Kelkoo par exemple?
C'est une mécanique mnémotechnique. On martèle
pour que cela reste présent à l'esprit. L'agence
Business, très décriée par ses concurrents,
est spécialiste de ce type de format. Elle a un credo et
cela fonctionne. On en revient à la difficulté d'émerger
dans le bruit généralisé.
Quels
sites fréquentez-vous?
Je vais bien sûr regarder mes produits, ou d'autres comme
Cadres Online. Je regarde aussi ce que font mes confrères
étrangers tels que Ad Age ou Ad Week. Sinon, c'est au gré
de l'actualité. Je suis allé voir Houra.fr, puis
Kelkoo, je regarde les nouvelles campagnes et les nouveaux sites.
Mais je ne navigue quasiment pas à titre personnel.
Et
vos enfants?
Ils commencent un peu à nous mettre la pression, mais pour
l'heure, ce sont plus les CD Roms éducatifs et les jeux
qui occupent leur attention.
Vous
achetez en ligne?
Je suis allé voir bien sûr, mais je n'ai pas acheté
pour l'instant. J'aime les boutiques "physiques". Ce
n'est pas une question de peur, je n'ai simplement pas franchi
le pas. Et comme j'ai assez peu de temps pour mes loisirs, j'aime
en profiter pour flaner, à la Fnac par exemple, ou ailleurs,
trainer dans les magasins.
Qu'est-ce
qui vous séduit dans le Net ?
Ca va vite, on peut se faire son propre menu, la capacité
de personnalisation et le gain de temps.
Et
a contrario, ce qui vous déplait?
Il faut que les mails se calment et que les gens apprennent à
ne pas tout dupliquer par voie de mail, de fax, de courrier, etc.
Et puis parfois je trouve que le mail a un côté un
peu perfide, cela peut être un moyen assez facile de se
repasser la "patate chaude", de se déresponsabiliser.
C'est aussi -il faut le dire- parfois un peu le bordel. On est
bombardé en permanence et il y a sur-abondance. Ce sont
les grands inconvénients liés aux grands avantages
du Net. Parfois, c'est bien de relire un magazine ...
Philippe
Larroque est né un 29 février, en 1960. Il est à
Stratégies depuis un peu plus de trois ans, où il
a successivement occupé les postes de Directeur de la Rédation,
éditeur puis directeur général de Stratégies.
Auparavant, il a été actionnaire et cofondateur
de "Décisions Médias". Plus tôt,
il travaillait déjà pour Stratégies en région,
notamment en Rhône-Alpes. Il a commencé sa carrière
à "L'Echo de la presse et de la publicité",
fondé par son grand-père Noël Jacquemart, titre
au sein duquel il était documentaliste .