Getty Images, du nom du fondateur Mark Getty (fils d'un magnat
américain du pétrole), est l'une des deux "majors"
mondiales spécialisées dans les banques de données
d'images. Elle tente de s'imposer dans le domaine de la commercialisation
des photographies sur Internet en acquérant des agences:
Tonystone, Photodisc, EyeWire... et plus récemment Image
Bank. La société dispose ainsi d'un catalogue de
60 millions d'images. Et poursuit une course à la croissance
avec son principal rival, Corbis, la banque d'images de Bill Gates.
Propos recueillis par Philippe Guerrier le 11
octobre 1999 .
JDNet : Quelle est la stratégie
globale de Getty Images en Europe?
Michel Perrin : Getty Images a d'abord une stratégie
mondiale, mais il est vrai que le marché américain
est le plus avancé. Nous avons engagé depuis six
mois une stratégie transversale de segmentation de marché:
créatifs, édition, business-marketing et grand public.
Et
pour la France, qu'en-est-il ?
Il faut d'abord se placer d'un point de vue européen, où
nous misons sur le plus gros marché: le design. Nous l'attaquons
via notre division professionnelle "Creative professionnals",
qui comprend notamment Tony Stone Images, PhotoDisc et EyeWire.
Ces trois services représentent 80% du chiffre d'affaires
réalisé en Europe. PhotoDisc et Tony
Stone disposent de versions françaises. Photodisc.fr
est ouvert depuis six mois. Les transactions sont effectuées
en dollars mais la recherche par mots-clés est en français.
Idem pour Tonystone.com, dont la partie française a été
lancée il y a un mois et demi.
Pourquoi
ne lancez-vous pas des partenariats avec des sites français?
Nous n'avons pas d'accord avec un service du type Wanadoo en France.
Mais, en Grande-Bretagne, PhotoDisc a entamé un partenariat
avec Amazon.co.uk mais aussi avec Apple et Macromedia. Nous sommes
clairement sur un marché professionnel, avec une ouverture
sur le marché des "soho" (travailleurs indépendants).
Quels
sont vos résultats en France?
PhotoDisc.fr réalise 8% du chiffre d'affaires global de
PhotoDisc. Nous disposons, Tony Stone compris, de 15.000 clients
en France. Le nombre de visites nous importe peu. Nous préférons
prendre en compte le taux de transformation, qui est très
important en Europe: 30%.
Sur
quels projets travaillez-vous?
Nous sommes en train d'élaborer un portail vertical de
Getty Images. Le projet s'appelle Gettyone et servira le marché
des professionnels de la création. Il sera lancé
aux Etats-Unis en fin d'année. Il desservira ensuite les
pays européens (Grande-Bretagne, Allemagne, Pays-Bas) avec
différentes versions linguistiques. Il arrivera en France
fin 2000.
Avez-vous
l'intention d'acquérir une agence photo, comme l'a fait
votre concurrent Corbis avec Sygma?
Nous connaissons très bien l'agence Gamma car nous avons
racheté aux Etats-Unis sa structure de distribution, l'agence
Liaisons. Nous les avons approchés mais l'"héritage"
n'est pas très clair. Et puis, je crois que le groupe Lagardère
se porte également acquéreur...
Quelles
relations entretenez-vous avec le photojournalisme?
Nous collaborons avec une trentaine de photographes en France.
Getty Presse dispose d'entités dans ce domaine: Allsport,
Hulton Getty, Online USA... Mais il est vrai que le marché
des photos de création est beaucoup plus important. Les
photos d'actualité représentent entre 10 et 15%
du marché de la création. Ce n'est pas notre marché
le plus important.
Que
répondez-vous à vos détracteurs qui estime
que vous proposez des images aseptisées?
C'est un domaine très marketing. Si les gens ont besoin
de photos aseptisées, Getty Images les vendra. Vous savez,
nous ne faisons que ce que le marché nous réclame.
Considérez-vous
qu'une "guerre des images" a été déclenchée
entre Getty Images et Corbis?
Non, car les stragégies sont différentes: Getty
Images mise clairement sur le BtoB tandis que Corbis veut s'appuyer
sur la grand public. Et puis, le chiffre d'affaires de Corbis
est relativement plus petit que le nôtre. Mais nous considérons
Corbis comme potentiellement dangereux.
Certains
experts disent que les services en ligne de Corbis sont plus avancés
que ceux de Getty Images...
Corbis dispose d'un bon site mais son service ne tourne qu'autour
d'acquisitions de droits multimédia. Il ne peut être
exploité que dans un environnement digital. La reproduction
papier est impossible. J'ai l'impression que Corbis a brûlé
les étapes.
70%
du commerce des photos provient de centaines d'agences généralistes,
spécialisées ou d'archives. Comment Getty Images
compte gagner des parts de marché?
Il est vrai que la plus grande production provient du monde des
photographes. Nous misons d'abord sur des segments, par exemple
les "business users" (utilsateurs profesionnels). Et
puis, nous comptons récupérer des parts de marchés
au dépens d'agences pas toujours très bien organisées.
Getty
Images a-t-elle des activités rentables ?
Nous sommes rentables en terme d'EBITDA (résultats avant
intérêt, amortissement et impôts). Mais nos
acquisitions successives de banques d'images demandent des investissements
importants.
Michel
Perrin est diplomé de l'Ecole supérieure de gestion. Il
a passé onze ans dans la division Marketing Europe chez
Microsoft avant de devenir directeur général pour le secteur de
la Méditerranée. Il a ensuite collaboré deux ans chez Infonie
où il était directeur général. En juillet 1997, il a été
nommé vice-président et directeur général de PhotoDisc
Europe. Suite à une réorganisation des différentes filiales
de Getty Images, il occupe dorénavant les fonctions de
Senior Vice President for Europe and ROW (Rest Of the World).
Getty Images
en chiffres
Date
de création
|
1994
|
Effectif
|
2.000
|
Base
de données Images
|
60
millions d'images
(1,2 million disponibles en ligne)
|
Les
divisions
|
-
Création (Tony Stone Images, PhotoDisc, Energy
Film Library, Eye Wire)
-
Presse (Allsport, Hulton
Getty, Liaison Photo, Online USA)
-
Utilisateurs
pro (Powerpics, EyeWire)
-
Grand public (Art.com)
|
Site
corporate
|
|