JDNet. Quelles sont
les attributions d'Amazon Europe et quelle est la latitude d'organisation
de chaque pays ?
Philipp Humm.
Amazon est organisée de manière fonctionnelle. Chaque fonction,
c'est-à-dire la logistique, la technique, le marketing ou le commerce,
est présente au niveau global comme au niveau des différentes
filiales. Chaque équipe nationale gère de manière
assez indépendantes ces différentes fonctions de façon
à bien s'adapter aux spécificités du marché.
En revanche, au niveau global, nous optimisons la gestion des outils informatiques
et exploitons la notoriété de la marque. Amazon Europe est
davantage une structure de coordination, de partage et de définition
d'objectifs communs. L'exécution dans chaque pays tient compte,
elle, de la réalité du marché, en fonction des fournisseurs,
des comportements ou du niveau du commerce électronique. C'est
pourquoi, les responsables d'Amazon Europe ont une double fonction. Je
suis moi-même directeur général d'Amazon Allemagne.
Pour la France, personne encore n'assure cette double fonction, car le
marché est plus jeune.
Puisque Amazon Europe
est une structure de coordination et d'échanges, avez-vous des
projets communs au niveau européen et quels sont-ils ?
En fait, ce ne sont pas uniquement des projets européens. Ce sont
surtout des projets globaux concernant la personnalisation du site ou
des rubriques. Cette technologie apporte une déjà véritable
valeur ajoutée au site américain. Elle fait d'ailleurs partie
des éléments que nous fournissons à AOL aux Etats-Unis
dans le cadre de notre partenariat (Lire l'article
du JDNet du 28/09/01). L'idée est de commencer à la déployer
cette communication one-to-one sur l'ensemble des sites. La "Wish-List",
que nous avons lancée la semaine dernière en France, fait
partie de ces projets communs. Autre exemple : la possibilité de
voir apparaître l'historique des achats de la personne qui s'est
connectée ainsi qu'une page de suggestions d'articles spécifiques
au client en fonction, non plus seulement de ses précédents
achats, mais aussi de ce qu'il a regardé lors de ces précédentes
cessions. Nous pouvons également proposer des produits, de manière
dynamique, en fonction du contenu du panier du client. Toutes ces nouvelles
fonctionnalités ont été ajoutées au site allemand
et français il y a moins d'une semaine. L'objectif étant
à terme de proposer, comme sur Amazon.com, un magasin personnalisé
pour chaque internaute.
Quelle est la latitude
d'Amazon Europe par rapport aux Etats-Unis ? Et ressentez-vous de la même
manière la pression que font peser les marchés financiers
sur Amazon.com ?
Comme toutes les filiales de sociétés américaines
qui font un reporting trimestriel de leur activité, nous avons
une certaine pression. Maintenant, en Grande-Bretagne comme en Allemagne,
nous avons annoncé qu'au quatrième trimestre 2001, nous
serions rentables. Un résultat que nous avons atteint sur une période
assez courte, trois ans. Ce qui est tout à fait comparable avec
les rythmes de la vieille économie.Concernant la latitude par rapport
aux Etats-Unis, celle-ci se manifeste surtout au niveau de la réactivité
face aux marchés.
Début 2001,
l'international représentait 18,8% du chiffre d'affaires du groupe
Amazon ? Qu'en est-il aujourd'hui, et que représentent les différentes
filiales européennes ?
Les sites non-américains génèrent aujourd'hui 21%
du chiffre d'affaires d'Amazon. Ce chiffre comprend évidemment
le Japon. Je ne peux pas vous révéler la part que représente
chacune des filiales européennes, ni l'ensemble de celles-ci.
Et pour chacune des
filiales européennes, que représente l'international ?
La part de l'international en France et en Grande-Bretagne est beaucoup
plus élevée qu'en Allemagne, en raison de l'ancienne implantation
de ces pays outre-mer.
Selon la presse américaine,
rapportent qu'Amazon perdrait du terrain sur la vente de livres aux Etats-Unis.
Est-ce exact et comment expliquer cette situation ?
Je n'ai pas pu vérifier encore cette information. Nous estimons
que la part de marché d'Amazon sur le livre aux Etats-Unis est
d'environ 5%. Sur le troisième trimestre, étant donnée
la forte rentabilité d'Amazon dans le livre, c'est-à-dire
plus de 10%, nous avons décidé de réduire les prix
d'environ 30% sur les livres de plus de 20 dollars. Ceci afin d'être
plus agressifs sur ce marché. Maintenant, il est vrai que le positionnement
initial d'Amazon.com s'est doucement déplacé d'un site de
vente de livres, vers un site de produits culturels, puis aujourd'hui
vers une plate-forme de e-Commerce. La vente de produits culturels ne
représente plus que 55% du chiffre d'affaires d'Amazon.com, dont
le métier est davantage aujourd'hui d'être l'intermédiaire
entre le produit et le consommateur. Nous n'avons pas vocation à
tout faire nous-mêmes, mais à exploiter le potentiel de notre
plate-forme, avec des partenaires qui sont soit des particuliers, comme
pour les produits d'occasion, soit des sociétés comme Borders
ou Target. Et dans ce cadre, il n'y a pas vraiment de limite de produits.
Ce positionnement définit notre stratégie globale actuelle.
Notre volonté étant de l'étendre aux autres pays.
Votre objectif au niveau
européen est donc de vous conformer à ce modèle ?
Tout à fait. C'est un modèle qui a une logique universelle
et peut s'adapter à tous les pays. En Angleterre, par exemple,
nous avons passé un accord avec Virgin Wine pour vendre du vin
sur Amazon. Même chose avec Expedia pour vendre des voyages. Maintenant,
est-ce que nous allons étendre ces accords en Allemagne ou en France
? Celà dépendra de la situation dans chaque pays et de notre
capacité à trouver des partenaires qui puissent nous apporter
la complémentarité produits mais aussi la même qualité
de produits que si nous vendions nous-mêmes ces articles en direct.
La décision finale sera toujours à prendre pays par pays,
en fonction de ce qui existe sur le marché, des besoins sur celui-ci,
de l'offre et du fournisseur. Nous choisissons toujours des marques reconnues
et respectées.
Quels sont à
vos yeux vos principaux concurrents dans les différents pays européens
?
L'origine et le profil de nos concurrents sont assez différents
d'un pays à l'autre. En France, je citerais la Fnac et Casino,
qui vient de l'univers de la distribution alimentaire. En Allemagne, la
concurrence vient surtout de la VPC, de Bol et de Mediantis. Tandis qu'en
Angleterre, nos principaux concurrents sont Barnes & Noble et Tesco,
également originaire de l'alimentaire. Les réponses que
nous devons trouver sont donc très locales et ne peuvent être
décidé au niveau global.
Où situez-vous
aujourd'hui vos différentes filiales dans leur environnement concurrentiel
?
La situation de l'Angleterre et de l'Allemagne est assez similaire. En
Allemagne, nous sommes aujourd'hui clairement le leader en terme de e-Commerce
tous secteurs confondus, selon le panel GFK. Nous générons
40% de chiffre d'affaires de plus que notre concurrent immédiat.
Et sur le marché des produits culturels, nous faisons 6 fois plus
de chiffre d'affaires que notre concurrent le plus direct. Sur le marché
global du livre en Allemagne, la part de marché d'Amazon.de pour
la première moitié 2001, toujours selon GFK, était
de 3,7%, et de 48% par rapport au marché du livre sur Internet.
En Grande-Bretagne, les parts de marché sont assez semblables,
avec une position un peu plus forte surtout dans le online. Ces chiffres
montrent qu'Internet devient un secteur établi, une alternative
qui est utilisée par un nombre de plus en plus grand de consommateurs.
Et en France ?
En septembre, selon les chiffres d'audience donnés par MMXI et
nos estimations qui tiennent compte de l'international, nous arrivons
tout juste devant la Fnac avec 858.000 visiteurs uniques, contre 849.000.
Comment évoluent
ces trois filiales les unes par rapport aux autres ?
Je ne peux pas, hélas, vous donner ces chiffres.
Mais comment expliquez
vous les écarts entre les différents pays ?
Le principal écart vient pour nous du degré de maturité
du marché. Le nombre d'internautes
et d'acheteurs varie beaucoup d'un pays à l'autre. En Grande-Bretagne,
selon Jupiter, on dénombre 22,8 millions d'internautes, dont 7,8
millions sont des acheteurs. En Allemagne, il y a 28,8 millions d'internautes,
dont 10 millions achètent en ligne. Et en France, sur 13,8 millions
d'intenautes, 4,1 millions sont des cyberacheteurs. La France, habituée
au Minitel, subit seulement un décalage dans le temps, d'environ
un an et demi, voire deux ans. Mais l'évolution est sensiblement
la même. Les croissances sont plus fortes, car la base en plus faible.
Mais Amazon France se développe normalement et suit le même
chemin que l'Allemagne et la Grande-Bretagne. C'est pourquoi, en France
plus qu'ailleurs, nous sommes attentifs au développemnt de la concurrence
et du marché.
En France, le management
a beaucoup changé. Est-ce le cas dans les autres pays européens
?
Oui. En général, ces changement interviennent entre la première
et la deuxième années. Nous démarrons en général
avec un fonctionnement de start-up. Ensuite, comme la croissance est rapide,
les besoins de la société changent en matière de
profils. Et les profils changent d'eux même également.
Comment envisagez-vous
la période de Noël 2001?
Au niveau international, nous nous attendons à des fêtes
de Noël très fortes. Les indications de Forrester sont sensiblement
celles sur lesquelles nous tablons, à savoir que les internautes
se déplaceront moins pour acheter leurs cadeaux et auront peut
être plus tendance à acheter en ligne et à se faire
livrer. Au niveau des chiffres, nous nous attendons en France à
des pics de livraison situés entre 15.000 et 20.000 commandes par
jour. Ce qui suit un tendance assez logique, puisqu'en septembre, le maximum
de commandes que nous avons enregistré est de 9.500 commandes par
jour. On peut s'attendre à une augmentation du chiffre d'affaires
sur octobre, novembre et décembre de plus de 40% par rapport à
ce que nous réalisons sur un trimestre normal.