Le
Web est-il un média permettant de suivre l'actualité à chaud
? Peut-on se reposer sur le Web pour retransmettre de "
l'événementiel " ? Jusqu'à présent, les limites techniques
inhérentes à l'Internet avaient imposé une réponse, sinon
négative, au moins très restreinte à ces deux importantes
questions. Mais, avec les progrès techniques d'une part
et le réalisme des diffuseurs d'autre part, on est peut-être
arrivé à un tournant quant aux " capacités médias " du Web...
L'année dernière à pareille époque, j'avais essayé de suivre
le déroulement des 24 heures du Mans via le site Web de
l'organisateur. C'était aussi une bonne occasion de vérifier
si le Web pouvait désormais venir concurrencer les médias
traditionnels dans le cadre d'un événement à traiter " à
chaud ". Ma déception avait été à la hauteur des promesses
affichées ! En fait de tout ce qui était proposé sur le
site Web www.lemans.org,
seul le classement heure par heure était vraiment opérationnel.
Tout le reste souffrait de trop de bugs ou de lenteur de
fonctionnement pour être vraiment utilisable. C'est plutôt
dommage car il y a vraiment beaucoup de bonnes idées dans
ce qui était proposé aux passionnés : graphe de progression
de 8 voitures (et c'est vous-même qui définissiez la sélection),
écoute du speaker du circuit en RealAudio, communiqué de
presse multi-langues avec photo et même des séquences vidéo
(nécessitant un plug-in QuickTime). Une fois ma déception
avalée, j'en avais déduis qu'on était encore loin du but
(le Web comme média événementiel).
Pourtant, dans le cadre de " la surveillance de l'évolution
du Web " que nous menons mois après mois, j'ai renouvelé
l'expérience à l'occasion de l'édition 99 de la célèbre
course. Et cette fois, je peux dire que j'ai été comblé
!
L'Internet aurait-il tant évolué d'une année sur l'autre
? En fait, ce changement de perception provient de deux
facteurs : tout d'abord, l'organisateur a su concentrer
son site Web sur quelques fonctions principales plutôt que
de se disperser dans un festival de prouesses techniques
bancales. De fait, cette année, www.lemans.org
ne proposait que les classements heure par heure, le chronométrage
instantané, la radio du circuit (les commentateurs en direct
en Real Audio) et les dépêches d'informations (le tout en
trois langues). Moins de possibilités mais chacune bien
mieux maîtrisée (sauf pour la fonction de chrono instantanée
qui reposait sur une applet Java qui fonctionnait de façon
aléatoire mais rien d'étonnant à cela !). Ensuite, il semble
bien que l'organisateur ait su mettre les moyens adéquats
(capacités des serveurs, dimension de la connexion Internet,
etc.) pour faire face au trafic. Lorsque j'ai utilisé l'écoute
en direct de la radio du circuit (via le player RealMedia
G2), la qualité de service était particulièrement étonnante.
Je m'étais habitué à ces interruptions continuelles du flux
sonore (le fameux message " net congestion, rebuffering
") depuis que Real Networks diffuse son lecteur " Real Audio
" mais là, j'ai pu constater une diffusion quasiment fluide
pendant presque toute la durée de la course, une vraie performance
! Comment expliquer un tel progrès ?
Certainement que les moyens mis en place par l'ACO (l'organisateur
des 24 heures) ont sensiblement progressé. Sans doute que
la version G2 du lecteur Real Networks marque un net progrès
par rapport aux versions précédentes. Probable également
que l'infrastructure globale de l'Internet est de plus en
plus à même de gérer des flux continus (les caches eux-mêmes
commencent à savoir prendre en compte les fluxs de type
" stream "). C'est sûrement la combinaison de tous ces facteurs
qui explique le mieux ce [modeste] bond en avant. Donc,
à condition d'avoir une connexion de qualité et une configuration
adéquate (et que cela soit aussi vrai du côté des " auditeurs
"), on peut à partir d'aujourd'hui tabler sur une diffusion
sonore en continue sur l'Internet et espérer toucher un
public de plus en plus large. C'est une vraie nouveauté
dans l'univers du Web mais cela ne le met pas [encore] au
niveau de la télévision pour le suivi événementiel...
[Alain
Lefebvre, vice-président du groupe SQLI]