Intr@net
99 était centrée sur les applications des intranets
et des extranets et destinée au monde professionnel, des
entreprises, des collectivités locales et des administrations.
Le président de l'AFUU (Association Française des Utilisateurs
d'Unix et des systèmes ouverts), organisatrice d'Intr@net
99 en janvier dernier, envisage les tendances d'intr@net
2000.
Propos recueillis le 25 août 1999 par Benoît
Grange
JI:
Présentez-nous l'AFUU ?
Pierre Faure: C'est une association qui a déjà 18
ans et qui regroupe les utilisateurs d'UNIX et des systèmes
ouverts à la base. Elle s'est créée en même temps que d'autres
associations dans le monde, Unix étant né à la même époque
d'Internet et que TCP/IP.
Les premiers pionniers de cette technologie se sont réunis
dans ces associations comme l'AFUU. L'AFUU a participé
au développement d'UNIX dans les entreprises pendant des
années, sachant que petit à petit les grands fournisseurs
de matériel ont lancé des offres industrielles UNIX, comme
Sun ou IBM ou Silicon Graphics. Par la suite, Unix s'est
complètement généralisé, donc la fonction d'une association
d'utilisateurs a perdu un peu de sa force.
Et
aujourd'hui ?
L'AFUU
s'élargit en direction de l'utilisation et de la promotion
de toutes les technologies informatiques, notamment Internet
tout en gardant une dimension forte dans la défense et la
promotion des systèmes ouverts comme Linux et la lutte contre
les systèmes propriétaires.
Pourquoi l'AFUU a-t-elle organisé
Intr@net 99 ?
L'AFUU
a participé de très près à la création et à l'organisation
de la Fête de l'Internet avec d'autres associations comme
l'AFI, l'ISOC ou le Club de l'Arche et il se trouve qu'à
l'époque l'AFUU avait des structures plus importantes que
les autres et était mieux organisée.
Mais la Fête de l'Internet n'est pas totalement la culture
AFUU, parce que c'est une dimension grand public. Le volet
"entreprises" de la Fête de l'Internet est donc devenu Intranet
99, qui s'est appelé un temps la Fête de l'Intranet. Intranet
99 était centré sur intranet et extranet, Intranet 2000
sera plus orienté vers Internet.
Quels
bilans peut-on faire d'Intr@net 99 ?
C'est
très satisfaisant. On s'est retrouvé dans une ambiance de
pionniers. Il y a eu une très forte mobilisation de beaucoup
de gens émanant de tous les milieux et pas seulement des
entreprises. Les collectivités locales, les associations
et les PME ont répondu présent. Le palmarès du concours
est très équilibré. C'est un signe que les nouvelles technologies
progressent partout. Il y a des réalisations exemplaires
dans les collectivités locales ou dans les organismes professionnels,
mais elles sont plus rares. Il y a un peu de retard de leur
côté. Par contre, dans les grandes entreprises tout le monde
a commencé.
Mais
les entreprises n'aiment pas montrer leurs intranets d'habitude...
Exactement:
contrairement au commerce électronique B to C, les intranets
et les extranets ne sont pas visibles. Or il s'agit d'applications
extrêmement importantes et structurantes pour les entreprises,
car elles touchent à l'organisation interne de l'entreprise.
Nous avons pu voir beaucoup de choses très intéressantes,
un grand nombre d'applications stratégiques ont été montrées.
Par contre, malgré la richesse des démonstrations des utilisateurs
des intranets des entreprises présentes, il n'y a pas eu
foule à l'exposition. Nous avons un problème de temps pour
communiquer en profondeur.
Quels
enseignements pour Intr@net 2000 ?
Il
aura lieu plus tard, fin mars. Nous avons déjà commencé
à travailler dessus. Le programme sera finalisé le 15 novembre.
Le grand public aura ainsi le temps d'être au courant de
ce type de manifestation. La forme de notre action ne changera
pas. On utilisera les réseaux de communication de nos partenaires
(DRIRE, MEDEF, CCI, Cigref, etc). L'an dernier nous avions
tout centralisé à l'AFUU. C'est l'équipe de l'AFUU qui avait
pris en charge l'essentiel de l'organisation. Pour la prochaine
édition, nous structurons les choses beaucoup plus fortement
en mettant en place des groupes de travail thématiques (Internet,
intranet, extranet, gestion des connaissances, stratégie
d'entreprises, etc). Le site intranet2000.net
est déjà opérationnel. Nous finalisons la partie groupe
de travail. Il y aura aussi une dimension commerce électronique
importante avec du B to B. Enfin, il y aura une présentation
des offres des partenaires. Notre positionnement, c'est
la présentation des réalisations des utilisateurs et le
concours et les partenariats avec des organismes ministériels
et publics.
Quelle
est votre vision des applications intranet en France ?
Il
y a trois étapes de maturité. Il y a l'intranet de communication
puis l'intranet des systèmes d'informations des entreprises
qui permet de développer certaines applications et qui est
fortement intégré avec des outils de travail de groupes.
L'intranet devient le système nerveux des entreprises.
Enfin, la troisième étape, c'est la généralisation à l'entreprise
étendu qui est l'extranet.
Où
en sont les entreprises ?
Tout
le monde a franchi la première étape. Il y a peu d'extranets
à l'heure actuelle. Dans le monde automobile et aéronautique,
on commence à voir émerger différents projets. Les extranets
dans les entreprises, c'est l'enjeux majeur. Car il faut
optimiser l'ensemble de la chaîne de l'entreprise et non
plus seulement un maillon. Il faut travailler en partenariat.
Les solutions EDI sont assez lourdes et limitées à des domaines
bien précis et à certaines fonctionnalités. L'extranet généralise
complètement la notion d'EDI à tout ce qui est messagerie
électronique, transferts de fichiers, partage d'applications,
Web. Dans ce domaine, il y a beaucoup de projets pilotes
qui restent à finaliser.
Quels
sont obstacles à la mise en place d'un intranet ?
L'intranet
révolutionne le mode de transmission de l'information dans
l'entreprise, un élément très structurant et très stratégique
et politique. Un Intranet remet en question les structures
de pouvoir, les rapports entre les directions. La culture
"réseau" s'oppose à la culture "pyramidale". Il y a une
problématique très forte entre l'organisation, le management
et l'intranet. Ce n'est pas un problème technologique, mais
un problème culturel. Il faut que les gens adhèrent à ce
nouveau projet et changent leur manière de travailler. C'est
une logique qui va plus vite que l'évolution des organisations
et des mentalités. Deux ans sont nécessaires pour que l'intranet
soit utilisé de façon efficace. Les gens doivent s'approprier
cette nouvelle technologie.
Les évolutions futures ?
La
tendance, c'est que l'intranet va devenir le véritable système
nerveux dans lequel on va trouver toutes les informations
nécessaires à la vie de l'entreprise. Pour une entreprise,
il est plus lourd et plus structurant de mettre en place
un ERP qu'un intranet. Il a beaucoup d'entreprises qui sont
tentées de mettre déjà en place un ERP, d'assurer le passage
à l'Euro et à l'an 2000 et seulement ensuite de passer à
l'intranet. Certaines entreprises mettent ces applications
en parallèle et en synergie, alors que certaines adoptent
une logique séquentielle. Comme c'est une "techno-passion",
il y a eu une sous-évaluation du coût des projets. On rentre
désormais dans une phase de rationalisation avec des démarches-projets
plus lourdes et plus structurantes.
Pierre
Faure, est Ingénieur de Mines de Paris et travaille depuis
1984 chez Dassault Aviation. De 1984 à 1993, il a été responsable
UNIX et des supports utilisateurs, puis adjoint DSI en prenant
la responsabilité du Département Architectures, de la Stratégie
et Communication et de la migration du SI vers les nouvelles
technologies. En 1999, Pierre Faure est devenu responsable
Internet, intranet et extranet. Depuis 1993, il est président
de l'AFUU.
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