Réseaux sociaux et privacy, deux concepts définitivement irréconciliables
On le sait, l'usage des réseaux sociaux n'est pas sans conséquence. En rédigeant des commentaires, en publiant, en réagissant, en enrichissant son profil… les internautes laissent une empreinte numérique. Mais attention, car cette empreinte est souvent indélébile…
Si la sensibilisation autour de la protection des données personnelles est plus courante de nos jours, les politiques de confidentialité des plateformes sont toujours aussi peu claires. Alexandra Iteanu, avocate spécialisée dans la protection des données chez Iteanu avocats, qualifie ces settings de "documents à tiroirs". Avant d'accepter les conditions générales d'utilisation d'un réseau social, il faut les lire… mais surtout les comprendre. Ce qui n'est pas si évident.
Pour savoir de quelles informations les réseaux sociaux disposent sur vous, vous pouvez tout simplement leur demander. Sur Facebook cette demande est gratuite, seulement la première fois. Au-delà des frais supplémentaires doivent être engagés pour y accéder. Pour tester le service, Arnaud Rayrole, CEO de Lecko, un cabinet de conseil en transformation digitale, a téléchargé les data détenues par LinkedIn pour découvrir ce que le réseau social connaît de lui. Mauvaise surprise, "les données étaient en vrac, inexploitables. Aucun effort n'est fait de la part de la plateforme pour mettre à disposition ces données" indique-t-il.
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"Même les fondateurs méconnaissent le fonctionnement de leur algorithme."
Autre problématique lorsqu'il s'agit des réseaux sociaux : l'opacité des algorithmes utilisés pour cerner les intérêts des utilisateurs. D'après Arnaud Rayrole, "même les fondateurs méconnaissent le fonctionnement de leur algorithme en raison de la technologie du machine learning". L'apprentissage automatique est une forme d'intelligence artificielle, qui se forme en continu à partir d'un ensemble de données mathématiques et statistiques. Sur les réseaux sociaux, l'IA sélectionne le contenu qui génère le plus de réactions chez l'internaute et lui propose ensuite des publications similaires. Seuls des supports susceptibles de plaire à l'utilisateur lui sont présentés. Davantage intéressé par ces contenus, l'utilisateur utilise plus longtemps la plateforme et in fine, s'expose à davantage de publicités.
Les coordonnées, les données bancaires, la localisation, le nom et le prénom, la date de naissance sont au même titre que les photos de profil, les publications, les audios, les adresses IP, des données personnelles. Ainsi, un post sur votre compte Instagram est analysé par une IA, qui grâce à des techniques de reconnaissances d'images et d'interprétations, génère des renseignements sur vos préférences et vos centres d'intérêt. Combiner toutes ces informations permet de rattacher un internaute à un profil de consommateur, une mine d'or pour les producteurs de publicité. Services gratuits, les utilisateurs sont les produits. Les profils sont monétisés et vendus aux annonceurs afin qu'ils puissent cibler des utilisateurs susceptibles d'acheter leurs produits. A terme, "les banques et les assurances pourraient aussi se servir de ces données pour accorder un crédit avec un taux d'intérêt plus ou moins élevé et une assurance plus ou moins coûteuse", observe Arnaud Rayrole.
Il existe des recommandations basiques qui permettent de reprendre (un peu) le contrôle de vos données. Pour vous prémunir des risques de piratage de vos données et donc d'usurpation d'identité ou de vols, utilisez des pseudonymes, privilégiez des mots de passe différents pour chaque plateforme et inscrivez-vous avec des adresses email différentes pour éviter la réconciliation de vos différents profils. En ce qui concerne le profiling, aucune échappatoire possible : il s'agit de la contrepartie à votre présence sur les réseaux sociaux.