Vendredi
19 mai 2000
Les Français du Net ne sont ni surpris, ni inquiets
Le Journal du Net a recueilli à chaud les réactions de certains acteurs du Web marchand sur la liquidation de Boo.com. Premier constat : la plupart n'avait jamais acheté sur le site de sportswear.
"Je suis avant tout triste pour les employés,
explique Patrick Robin, le patron d'Imaginet, qui investit
dans des start-up du Net (Abcool.com,
Super-secretaire.com...)
Mais, même si cela peut paraître un peu facile
de le dire maintenant, je pense que le positionnement produit
de Boo.com
n'était pas le bon. On ne peut pas faire entrer à
tout prix toutes les activités sur la Toile. Certaines
n'ont aucune valeur ajoutée. Or l'achat de sportswear,
pour les jeunes, est avant tout un acte plaisir. Cela n'a
rien à voir avec l'achat de chaussettes, qui constitue
un gain de temps".
Du côté
des marchands français, les avis se recoupent. "Cela
ne m'étonne pas, commente Jean Mizrahi, le PDG
de Decoralia.fr.
Dès le départ, les investissements étaient
très agressifs. Or, il est nécessaire d'acquérir
de l'expérience. Aller trop vite peut être dangereux".
Une opinion partagée par le PDG de Clust.com.
"Le projet a tout de suite été monté
à l'international, ajoute Joël Palix. Mais
peut-être était-ce nécessaire à
l'économie du projet ? De toute façon, une start-up
est, par définition, un projet risqué. C'est
l'essence même de la création d'entreprise. La
difficulté pour Boo.com, c'est son hypermédiatisation,
du fait de la quantité d'argent investi". En qualité
d'ancien directeur du développement des 3 Suisses,
Joël Palix a un point de vue intéressant sur l'offre
produit du site suédois. "Plus que la difficulté
de vendre des vêtements en ligne, c'est l'aspect prématuré
du projet qui me frappe. Les internautes n'étaient
pas assez mûrs pour cela". Même son de cloche
chez Jean-Marie Boucher, le directeur du commerce électronique
de La Redoute
: "Le site était trop élitiste, tant dans
son approche marketing que dans la conception du site.Il n'y
avait pas assez de produits".
Le co-fondateur d'Yzea.com,
le site de lingerie féminine multi-marque qui vient
d'ouvrir ses portes, est plus tranché : "Boo.com
est le parfait exemple de projet euphorique des débuts
du Web, explique Stephan Morgan. C'est avant tout un
problème de structuration des coûts. Il faut
gagner des parts de marché, tout en contrôlant
ses dépenses". La directrice générale
France de Letsbuyit.com
partage le même avis : "Nous avons beaucoup de
points communs avec Boo.com, déclare Laurence Perratzi.
Nous sommes d'origine suédoise, nous avons levé
140 millions d'euros et nous sommes présents dans quatorze
pays. Mais nous veillons à contrôler nos coûts.
Il ne faut pas tout investir en marketing".
La plupart des marchands
interrogés ne se déclarent pas inquiets de la
mésaventure Boo.com et tous évoquent une arrivée
à maturité de la nouvelle économie. "Je
vois d'ici les gros titres "Internet, la fin d'un mythe",
commente William Guillouard, le directeur général
France d'Aucland.fr.Or,
il ne faudrait pas qu'il y ait d'amalgame. L'expérience
de Boo est plutôt rassurante pour ceux qui ont un modèle
économique qui tient la route. Il faut lever des fonds,
mais aussi rentabiliser".
Reste qu'à
l'exception de Stephan Morgan, aucun des marchands interrogés
n'a jamais acheté sur Boo.com. Mais le patron d'Yzea.com
a retourné le produit et s'est fait rembourser : "C'était
juste pour voir la qualité du service après-vente".
[Laurence
Matuchet, JDNet]
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