Qu'est-ce qui distingue le
leader mondial des services de messagerie gratuites,
Hotmail.com, et ses concurrents français ? C'est
d'abord le seul outil de la catégorie qui s'adresse
aux francophones en proposant une interface en partie
anglophone une fois dépassé le cap de
l'identification. Ensuite, Hotmail.com demande à
ses utilisateurs de se connecter au moins une fois par
mois sous peine de voir leur compte désactivé.
L'intérêt se ce "rappel à l'ordre"
est qu'il permet de disposer d'une base de données
rafraîchie en permanence.
En
France, Hotmail.com recense 1,6 million d'utilisateurs.
Une goutte d'eau par rapport aux 110 millions de comptes
ouverts dans le monde. "En général,
l'outil a été adopté par la première
génération d'internautes, d'ailleurs 63%
des utilisateurs en profitent depuis plus de deux ans",
commente Grégory Salinger, le PDG de MSN France
(co-fondateur de Château Online, il a pris les
commandes de MSN France fin 2001). Le profil socio-demographique
est d'ailleurs très proche de l'internaute "grand
public" : 67% d'hommes et 33% de femmes, alors
que 52% des utilisateurs sont catalogués CSP+.
Hotmail a trouvé un coeur de cible dans la fourchette
25-34 ans (34% ds utilisateurs), 19% ayant plus de 50
ans et 15% entre 15 et 24 ans. Ce service étant
mobile par excellence, les utilisateurs se connectent
beaucoup depuis les lieux publics et les établissements
scolaires.
Pour la direction de MSN France,
l'outil Hotmail est considéré comme un
produit d'appel complémentaire des services du
portail. Une approche clairement revendiquée
: "Un outil comme Hotmail ne serait pas viable
s'il n'était pas intégré à
un réseau", commente Grégory Salinger.
La fonctionnalité d'identifiant unique pour accéder
au bouquet de service ("single sign in") renforce
ce sentiment de produit intégré. D'ailleurs,
les deux-tiers des utilisateurs de Hotmail utilisent
parallèlement des services MSN (il est vrai que
l'incitation est grande car en se déconnectant
du service Hotmail, l'internaute atterit automatiquement
sur le portail MSN.fr).
Pour le moment, les revenus
que MSN France tire de Hotmail viennent essentiellement
de la commercialisation d'espaces publicitaires et du
marketing direct (offres commerciales). "Les annonceurs
ne sont pas forcément intéressés
par une messagerie gratuite. Ce qui fait la différence,
c'est l'assuidité de ses utilisateurs",
indique Grégory Salinger. Sur la partie "permission
marketing" (le fait d'accepter des offres commerciales
par mail) en provenance de MSN France, le PDG se veut
également optimiste. Il assure que la majeure
partie des 1,6 million de membres en France ont accepté
ce type de démarche en cochant des catégories
de services en fonction de leurs centres d'intérêts.
D'ailleurs, dans le cadre d'opération de permission
marketing, MSN France obtiendrait un taux moyen d'ouverture
de 57,52%.
Autre source de revenus : les
accords commerciaux signés avec des partenaires
pour mettre en avant leurs listes de diffusion thématiques.
Ainsi, Hotmail propose aux internautes de s'inscrire
à une dizaine de newsletters comme AutoJournal.fr,
Topsanté.fr, Canalstars.com, Sports.com ou Opodo.com
(nouvelle agence de voyages en ligne). La plupart du
temps, ces partenaires sont déjà présents
sur le portail MSN. Sur ce type de promotion, les sites
partenaires paient une location fixe de mise en avant
de leur newsletter pour une période donnée.
Le service semble en tout cas apprécié,
puisque chaque membre Hotmail s'inscrirait à
3,5 newsletters en moyenne.
Si, en France, le développement
de nouvelles fonctionnalités autour du service
Hotmail est lent, il faut regarder du côté
des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne pour distinguer
les grandes tendances qui se profilent. A l'instar de
Yahoo, MSN a commencé à développer
des services "premiums" autour de son service
de messagerie gratuit. En décembre 2001, une
option payante d'espace de stockage supplémentaire
(10 mégabits pour un abonement annuel de 19,95
dollars) a été mise en place. La branche
française du portail grand public de Microsoft
réfléchit également aux extensions
de ses activités sur des supports mobiles : des
accords avec des opérateurs de télécommunication
européen ont été signés
(Deutsche Telekom en Allemagne, Telefonica en Espagne).
Des services mobiles sont également apparus au
Danemark et en Suisse.
Le réseau MSN worldwide
reste discret sur ses résultats financiers dans
le monde et Grégroy Salinger refuse d'apporter
des précisions sur le cas français, et
encore moins sur le service spécifique Hotmail.
Toutefois, il apparaît globalement qu'un service
mondial comme Hotmail n'a pas atteint le seuil de rentabilité.
Malgré des économies d'échelle
réalisées au niveau mondial (avec des
serveurs en grande partie installés sur la côte
Ouest des Etats-Unis), ce type de service de messagerie
gratuite demande des investissements techniques importants
pour assurer le maintien du service, voire l'améliorer.
Dans un article publié en mars, Business Week
estimait que les frais d'entretien d'une boîte
Hotmail sont de 1 dollar chaque année. Avec 110
millions de comptes dans le monde, le calcul est assez
rapide. Facteur aggravant : le ralentissement de la
croissance du marché de l'e-pub a modifié
la donne, imposantune diversification des revenus. S'il
apparaît difficile de passer le cap de la rentabilité,
un service comme Hotmail a pour mission première
de générer du trafic pour orienter les
internautes vers des services en ligne peut-être
plus lucratifs. La complémentarité des
services en ligen constitue d'ailleurs le coeur de la
stratégie sur Internet de Microsoft, maison-mère
de MSN.
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