Outils,
méthodes, acteurs... Pendant une heure, le directeur
général de l'organisme de mesure d'audience a
répondu aux questions des lecteurs du JDNet. Compte-rendu
complet.
JDNet
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Invité
: François Blum, Directeur
général de Mediametrie eRatings (voir
sa fiche Carnet) |
Date
: jeudi 7 février, 18h-19h |
Nombre
de questions posées : 134 |
Nombre
de questions retenues : 37 |
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François Blum :
Bonsoir à toutes et à tous.
La
fusion eRatings / Jupiter ? On en est où exactement
? Ce sera fait et officiel quand ?
Comme je l'avais annoncé à la fin de l'année
dernière, nous attendons, courant mars, le feu
vert des autorités anti-trust américaines, qui
sera le véritable feu vert. Tout devrait pouvoir
aller très rapidement ensuite. Nous sommes donc
dans les temps.
Quels
seront les choix technologiques et méthologiques
suite à la fusion NetRatings / MMXI ?
Nos équipes techniques ont travaillé pour
évaluer chacun des "meters" (logiciels de mesure).
Les deux ont des fonctionnalités originales. Nous
prendrons soin de conserver donc ce qu'il y a
de mieux sur une base technologique unique. C'est
la garantie pour les clients de pouvoir garder
un historique de mesure, mais d'enrichir encore
leur connaissance de l'audience du Web.
Cybermétrie
fait l'objet de vives critiques de la part de
professionnels du Net. Peut-on encore être convaincu
de sa pertinence ?
Une précision : Cybermétrie n'est pas un outil
de mesure d'audience, mais de mesure du trafic.
Il ne répond donc pas aux mêmes objectifs et n'apporte
pas les mêmes enseignements aux mêmes personnes
(agences, éditeurs, analystes financiers, etc...).
Cybermétrie a été conçu il y a maintenant plus
de deux ans, dans un contexte de marché très différent.
Je crois qu'il répondait bien aux attentes mais
qu'il doit aujourd'hui évoluer. C'est ce que nous
nous attachons à faire.
Tout
le monde parle de mesurer l'audience au travail,
mais combien de salariés sont présents dans votre
panel ? Quelle garantie de représentativité sur
cette population ?
Aujourd'hui, nous mesurons l'audience au foyer
d'une part, et de l'autre, l'audience globale
foyer et/ou lieu de travail. Nous n'avons pas
encore publié de résultat spécifique au lieu de
travail ; pour une raison simple : nous avions
annoncé un échantillon nécessaire d'au moins 1.000
personnes ; nous y sommes presque, mais pas encore.
Estimez-vous
que la multiplication des outils de mesure d'audience
participent à un brouhaha qui fait reculer les
annonceurs ?
Comme tous les marchés, médias en particulier,
et dans le monde entier, le bon fonctionnement
économique passe par des indicateurs reconnus
et partagés. En d'autres termes, une monnaie qui
sert d'échange à tous. La multiplication des métholodologies
et des outils, la complexité du média, les incertitudes
économiques... ne favorisent certainement pas
la clarté pour les annonceurs.
Avez-vous
un moyen de mesurer l'audience et les comportements
des internautes sur les sites de e-commerce :
les transactions qui s'y opèrent... ?
Le panel Nielsen//NetRatings permet de mesurer
l'audience sur les zones ou sites sécurisés. Dans
ses prochaines versions (un upgrade des panels
est en cours), nous pourrons appréhender de façon
beaucoup plus précise le nombre de transactions,
voire des notions d'achat ou de panier moyen.
A
moyen terme, combien d'outils de mesure d'audience
vont cohabiter ?
Si nous parlons d'audience, nous parlons donc,
aujourd'hui, de panels. Il y a trois acteurs.
Si l'offre de rachat de JMXI par NetRatings est
entérinée, et si je compte bien, il devrait ensuite
en rester deux.
Que
pensez-vous de la difficile montée en puissance
de l'OJD avec son processus de certification d'audience
?
L'exercice de la mesure du trafic (et non
de l'audience) est également complexe. Nous le
vivons tous les jours avec Cybermétrie. L'OJD
cherche, comme nous et d'autres, avec difficulté,
à établir des indicateurs communs et partagés.
Le chemin sera long mais il est indispensable
que nous y arrivions ensemble.
Que
comptez vous faire de l'activité "analyse"
de Jupiter MMXI suite au rachat ?
Vous me demandez de faire de la prospective,
difficile... Ce que je peux dire aujourd'hui,
c'est que Jupiter est une très belle marque et
que leur travail apporte à de nombreux annonceurs
une partie des réponses aux questions qu'ils se
posent.
Netvalue
est-il un concurrent dangereux pour médiamétrie
?
Netvalue est un opérateur de panels concurrent
de Nielsen//NetRatings, même si sa couverture
géographique est moindre. Et moindre également
est sa taille. Mais je respecte trop un concurrent
pour ne pas reconnaître non seulement son existence
mais ses qualités. C'est ce que m'ont appris les
samouraïs japonais : si tu veux battre un ennemi,
il est important de l'apprécier et de le connaître
aussi bien qu'il se connait lui-même (Bernard,
à bon entendeur, salut !).
Je
suis éditeur de site. Quelle confiance accorder
à mes stats webtrends ?
Webtrends est un logiel d'analyse de logs
et non pas un tiers-mesureur. Notre métier, comme
pour la mesure de la télévision ou de la radio,
est de jouer ce rôle de tiers de confiance. Les
problématiques techniques liées à Internet justifient
encore plus la mesure hors-site.
Pouvez-vous
expliquer la différence entre les notions d'audience
et de trafic ?
Je crois que c'est assez simple. Le trafic
c'est, en fait, répondre à la question "quand
et combien", mais ne jamais pouvoir répondre à
la question "qui". En d'autres termes, ne pas
savoir quel est le profil (socio-démographique
ou style de vie) de ses visiteurs, de ses acheteurs,
etc...
Quel
est le critère le plus pertinent en terme de mesure
d'audience ? Visites, visiteurs uniques, taux
de pénétration, pages vues... ?
Tout dépend de l'objectif. Pour certains (par
exemple les publicitaires), c'est sans doute aujourd'hui
les visiteurs et leur profil, ce qui permet de
travailler sur des plans média pertinents . Pour
d'autres (dans certains cas les éditeurs), suivre
les chemins de navigation sur le site en s'intéressant
aux pages vues pendant une visite peut apparaître
comme un élément discriminant.
Vous
parlez d'annonceurs et non pas simplement de clients.
Pensez-vous que le marché des études sur Internet
n'existe que pour et par la publicité ?
Non seulement le marché ne se limite pas à
la publicité, mais je pense qu'il progressera
dans les mois qui viennent au moins autant, si
ce n'est plus, grâce au commerce électronique.
Internet, nous le savons tous, est certes un média
original, mais également un canal de distribution
et sans doute, d'ailleurs, bien d'autres choses.
Où
peut-on trouver les audiences de tous les sites
de sports avec le même outil de mesure. Pourquoi
n'est-ce pas diffusé régulièrement sur le Net
?
Le
panel Nielsen//NetRatings mesure précisément l'audience
de tous les sites de sport, en tout cas ceux dont
cette audience est significative. Ces mesures
ne sont pas publiées régulièrement mais nous en
faisons une analyse régulière. En d'autres termes,
appelez-nous...
Combien
de salariés chez Médiamétrie sont dédiés au média
Internet ?
C'est encore une équipe de taille réduite.
Nous sommes (Médiamétrie et Nielsen//NetRatings,
ce sont deux sociétés différentes) moins d'une
vingtaine.
Question
sur la taille et la représentativité des panels.
Ma source : www.Nielsen-netratings.com, rubrique
(gratuite !) "Hot Off the Net". En décembre 2001,
les internautes ("Current Internet Universe Estimate",
Panel "Home") étaient 31.316.988 en Allemagne
contre 12.100.000 en France. Néanmoins, votre
panel France compte 7.233 membres et votre panel
Allemagne 5.184. Le panel français me semble plus
représentatif !
Si la taille est un critère important, la
représentativité (par rapport à la population
étudiée) l'est tout autant. Nous avons rencontré
des difficultés de recrutement - comme pour tous
les médias - en Allemagne, ce qui explique une
montée en puissance moins rapide et donc une taille
aujourd'hui moins importante. Nous y travaillons,
en particulier en préparant le lancement du panel
Global (foyer et/ou lieu de travail).
Qu'est
ce qui vous a le plus frappé en différence de
comportements d'un pays à l'autre ?
Même si ce média est nouveau, on retrouve
beaucoup de différences culturelles liées à d'autres
habitudes, d'autres comportements. Quelques exemples
: à Hong Kong, les sites de jeu sont parmi les
plus fréquentés et on connait la passion ancestrale
des Chinois pour le jeu. En Europe du Nord, où
la presse quotidienne est très présente - en Norvège
par exemple - les sites de presse sont très puissants.
En France, la télévision est un média omniprésent
et Internet le reflète. On pourrait multiplier
les exemples à l'infini.
Le
passage au payant, qui implique une facturation,
ne risque-t-il pas de régler définitivement le
problème de l'audience ?
Non, il risque de faire évoluer la mesure.
De même que le commerce électronique nous
fait nous intéresser aux transactions, à la fidélisation
des clients, le passage nous offre de multiples
possibilités de mesure et d'analyse. C'est surtout
le business-model du site qui évolue.
Médiamétrie
prévoit-il un jour de monter un panel de convergence
entre les différents médias et, si oui, à quelle
échéance ?
Nous avons annoncé, il y a quelques mois,
les premiers résultats du laboratoire de convergence
TV-Internet aux Etats-Unis, riches d'enseignements
d'ailleurs. Nous réfléchissons aujourd'hui (très
concrètement d'ailleurs) à des expériences analogues
dans différents pays européens. Internet est un
média à part entière, mais parmi d'autres ; c'est
la connaissance transversale des comportements
qui va devenir importante. Nous nous attachons
donc à créer de la valeur dans ce domaine.
Comment
recrutez-vous les internautes au travail ?
Nous recrutons des individus représentatifs
des différentes fonctions de l'entreprise en validant
que ces entreprises sont elles-mêmes représentatives
de la structure des entreprises françaises (taille,
secteur d'activité, etc...).
On
dit que vous êtes le Séguéla de l'Internet (cf
votre éternel bronzage) qu'en pensez-vous ?
Je pense qu'il vaut mieux être riche et en
bonne santé que pauvre et malade. Quant à moi,
je me sens au moins en bonne santé.
Pensez
vous qu'il soit possible d'avoir un jour un panel
"bureau" réellement représentatif des secteur/taille/fonctions
en France ?
Je pense, et je l'ai déjà dit, qu'il y a une
réelle difficulté de recrutement et c'est pour
cela que nous "prenons du temps" pour construire
un échantillon satisfaisant. Quant à la perfection,
elle n'est pas de ce monde.
La
France est à la traine en terme d'équipement internet
en Europe. Pensez-vous qu'il s'agisse réellement
d'un problème de structure (insuffisance du réseaux
haut-débit par exemple) ou d'un problème culturel
français envers ce nouveau type de communication
?
Les coûts de communication et les infrastructures
sont un facteur explicatif évident de frein au
développement de l'Internet. Je ne crois pas vraiment
à une exception culturelle, surtout si le contenu
est là et de qualité.
Quel
est pour vous le pays le plus mature en terme
de consommation de l'Internet ?
On peut penser, sans prendre vraient de risque,
que les pays scandinaves sont de loin les plus
matures. Quelques explications en vrac : le froid,
les difficultés de déplacement, une offre de contenus
riche et variée, depuis longtemps (en Finlande,
par exemple, les sites de presse féminine sont
présents depuis trois ans avec succès)...
Le
haut-débit change-t-il quelque chose à la consommation
de l'Internet d'après vos analyses d'audience
?
La réponse est oui, clairement. Non seulement
le haut-débit augmente le nombre d'internautes
actifs au sein du foyer, mais il augmente aussi
le temps passé et favorise, par exemple, une activité
comme le commerce en ligne. Il a beaucoup progressé
en 2001, mais doit progresser plus encore, en
particulier au domicile.
Quelle
est la part de marché de Nielsen/Netratings
par rapport a MMXI et Netvalue ?
Notre part de marché varie d'un pays et d'une
zone géographique à l'autre. En France, en toute
vraisemblance, elle est supérieure à un tiers.
Avez-vous
déjà exclu des sites "tricheurs" de Cybermétrie
?
Très simplement, oui. Et je conserve les guillemets
au mot "tricheurs" ; dans certains cas, ce n'est
même pas volontaire. Mais il faut aujourd'hui
asseoir la crédibilité des médias, rassurer les
annonceurs, être donc nous-mêmes rigoureux, quitte
à perdre des clients.
Communiquer
sur une audience Dart, c'est significatif ?
Dart est un serveur de bannières et ne mesure
donc en aucun cas une audience.
Les
internautes de votre panel changent-ils régulièrement
? Sinon, pourquoi ?
Il y a deux raisons pour lesquelles ils changent
: la première, naturelle (ils le décident par
eux-mêmes, ils changent d'ordinateur, de FAI,
etc...) ; la deuxième, forcée (pour garantir la
représentativité de notre panel). C'est ce qu'on
appelle le "churn" : les panels sont renouvelés
en moyenne au bout de trois ans environ.
Les
membres du panel sont-ils rémunérés ou indemnisés
?
Comme pour les autres médias, ils ne reçoivent
aucune rémunération, mais des points-cadeaux.
Est-ce
que vous avez noté souvent des tricheur qui annoncent
des audiences sans rapport avec les chiffres de
Netratings ?
Contractuellement, nos clients sont tenus
de respecter très exactement la vérité de leurs
chiffres. Il est vrai, par contre, qu'il nous
arrive de découvrir des chiffres publiés par certains
sites et sans aucun rapport avec ce que nous mesurons.
Encore faut-il que l'on parle de la même chose
: des visteurs ou des visites, des individus ou
des machines ou des navigateurs, etc... Tout ce
qui nuit à la transparence et à la simplicité
nuit au marché, d'où cette volonté d'indicateurs
communs et clairs pour tous.
Sachant
que l'usage du Web se focalise principalement
par l'e-mail, comment peut-on prétendre à mesurer
globalement l'Internet sans tenir compte de la
messagerie électronique ?
Aujourd'hui, nous mesurons, avec le panel
Nielsen//NetRatings, les usages du Web. C'est
la demande principale de nos clients. Avec le
développement du e-mail marketing, nous avons
pris conscience de l'ntérêt de la mesure des e-mails
(pas simplement combien...) et nous lancerons
donc une nouvelle série d'indicateurs et de mesures
dans le panel.
Je
suis utilisateur de l'outil Xiti. Quel serait
pour moi l'intérêt de choisir cybermétrie ? Je
ne souhaite pas que mes concurrents connaissent
l'évolution de mon trafic !
Il y a aujourd'hui deux différences entre
Cybermétrie (qui n'est pas une technologie, mais
une étude collective en souscription) et ses concurrents
: la publication des résultats de l'ensemble des
sites mesurés et, c'est vrai, le partage des données
collectées entre tous les clients. Cette approche
permet, en particulier, un travail de benchmark
particulièrement important pour certains sites.
Si vous ne souhaitez pas être publié ou partagé,
vous pouvez néammoins utiliser la technologie
Cybermonitor et vous serez le seul à avoir accés
à vos chiffres.
On
ne parle jamais de l'audience des sites X ? Est-elle
encore prédominante ? ou bien avons nous passé
ce cap ?
Avez-vous
déjà été confronté à des réactions horrifiées
de certains de vos prospects qui découvraient
que vous recensiez TOUS les sites fréquentés par
les internautes... donc y compris les sites "Adultes"
:o) ?
Oui, nous recensons les sites adultes. Ils
font partie du paysage. Non, personne n'est vraiment
horrifié, ni même surpris (on se souvient tous
du Minitel). Par contre, ces sites ne sont pas
fréquentés autant que certains peuvent l'imaginer.
Peut-on
dire aujourd'hui que les outils de mesure sont
réellement représentatifs du client dans sa démarche,
ou bien y a-t-il encore beaucoup de travail dans
ce domaine pour avoir des résultats véritablements
fiables ?
Les résultats sont fiables d'ores et déjà.
En tout cas, nous nous interdisons la publication
de résultats non significatifs. Par contre, il
y a encore beaucoup à faire et à améliorer. Les
outils doivent évoluer autant que le média lui-même.
C'est la richesse et l'intérêt de l'Internet.
François Blum
:
merci
à tous, et bonsoir.
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