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François Barraud
(PDG d'Ooshop)

Grand chef de rayon


Il a participé à la création d'Ooshop il y a deux ans, au sein de Promodès et en fait l'un des leaders de son secteur. Depuis la fusion Carrefour-Promodès, son cyber-marché occupe une place centrale dans la galaxie e-commerce du groupe de distribution. Mais pas question d'oublier les leçons d'un parcours déjà riche.

Rien ne semble prédestiner un ingénieur diplômé de l'école des mines de Paris à une carrière dans la distribution alimentaire. Rien, sans doute, sinon le goût marqué du premier pour les nouvelles technologies et l'irruption de l'Internet dans la seconde. A 32 ans, François Barraud, Rennais adepte d'escalade, de rafting et de parapente, se retrouve donc PDG d'Ooshop, le cyber-marché de Carrefour. Créé en 1998, sous l'égide de Promodès, aujourd'hui fusionné avec le numéro un du secteur Carrefour, Ooshop est devenu le site moteur du cybercommerce alimentaire.

Sa rencontre avec Promodès n'était pas la première, puisque entre 1992 et 1993, envoyé par le cabinet américain de conseil en stratégie Bain & Company, il avait conduit pour le groupe de distribution une réflexion sur la commande par Minitel de produits alimentaires. "Mais à l'époque, Promodès n'était pas près, se rappelle-t-il. Quelques années plus tard, Internet se déployant, le projet de commande en ligne est redevenu d'actualité. Ils ont fait de nouveau appel à moi, d'abord en tant que conseiller extérieur, puis à partir de septembre, en tant que membre du groupe."

"Nous avions eu huit mois pour concevoir le site et les éléments du marketing mix. On a d'abord essayé de comprendre ce qu'on devait apporter au client."

Quand il prend en charge le projet, il demande une certaine autonomie et bénéficie du soutien de Paul-Louis Halley, le PDG de Promodès (aujourd'hui président du Comité d'orientation stratégique de Carrefour). Des conditions essentielles à ses yeux, car à l'époque, le projet était embryonnaire! "Nous avions huit mois pour concevoir le site et les éléments du marketing mix. On a d'abord essayé de comprendre ce qu'on devait apporter au client pour qu'il commande de l'alimentaire sur internet. Ensuite, l'élaboration s'est faite de manière très pragmatique."

Mise en place d'un réseau et approche très pragmatique sont deux des recettes favorites de François Barraud. Et pourtant, l'homme est loin d'être un adepte de la routine, lui qui, avec Ooshop, participait à son troisième projet. Dès 1990, à sa sortie de l'école, il intègre, "par curiosité", Bain & Compagny. "A l'époque, les écoles d'ingénieurs étaient assez peu versées dans le conseil en stratégie. Mais cette activité m'intriguait car elle permettait de satisfaire mon goût pour la réflexion et mon besoin de diversité et de mouvement". Et du mouvement, la vie professionnelle de François Barraud ne va pas en manquer.

Chargé des fusions-acquisitions et des audits en stratégie pour des fonds d'investissement chez Bain, il enchaîne pendant trois ans les missions, sillonnant la France, les Etats-Unis, la Suisse et la Pologne. En 1993, il décide de fonder, avec un associé, sa propre société. AXS (prononcer "access") regroupe deux activités distinctes : un service de conseil et d'information pour les cadres - la partie dont il s'occupe -… et la restauration rapide. L'objectif, ambitieux, est de créer des synergies autour de deux projets où tout est à faire. Mais faute de pouvoir mener de front les deux activités, François Barraud recentre son énergie sur la restauration rapide. Résultat, en 1996, il se retrouve gérant de "Via Pasta", une chaîne de restauration à l'italienne comptant quatre salles sur Paris.

Aujourd'hui, l'ancien patron de "Via Pasta" dirige un supermarché doté de 6.000 références et qui annonce un chiffre d'affaires 2000 de 200 millions de francs.

L'expérience est de courte durée, car 1996 marque aussi le développement de l'Internet en France. L'événement ne laisse pas indifférent François Barraud, dont les technologies sont la véritable passion, mais surtout, il l'oblige à réorienter l'activité d'AXS, à l'heure où les financiers recentrent leurs investissements sur les nouvelles technologies. Manquant de capitaux pour investir et développer leurs restaurants, François Barraud et son associé décident de les vendre et accueillent au sein de AXS une nouvelle entité, AXS Telecom, qu'il crée avec Brad Knoefler. Le futur patron d'Ooshop en détient 50 % des parts. Opérateur alternatif de télécommunication, AXS Telecom se pose bientôt en concurrent d'Omnicom, auquel sera attribué le préfixe 5. Toutefois, comme François Barraud est en train de désinvestir sur AXS, il est contraint de se désengager progressivement du capital d'AXS Telecom. Début 1998, sa sortie est achevée. "N'ayant plus accès au niveau d'information que je souhaitais, affirme-t-il, j'ai vendu la totalité de mes parts." C'était un an avant la cession d'AXS Telecom à LibertySurf , en octobre 1999.

Entre temps, François Barraud a rejoint comme directeur général une société informatique lyonnaise, Soft Montain, qui exploite les technologies de l'Institut de recherche en informatique appliquée (INRIA). Sa mission est d'aider l'entrée de nouveaux investisseurs pour développer l'entreprise. Il n'y reste que quelques mois, la société étant rachetée par Versant, une grosse firme américaine. C'est alors que son chemin croise à nouveau celui de Promodès…

Aujourd'hui, l'ancien patron de "Via Pasta" est à la tête d'un supermarché doté de 6.000 références, dont le positionnement en terme de prix est similaire à celui d'un hyper et qui assure des livraisons (facturées 79 francs) sur Paris, les Hauts-de-Seine et quatre villes des Yvelines. Ooshop annonce un chiffre d'affaires 2000 de 200 millions de francs. Le panier moyen se situant entre 800 et 1.000 francs, le nombre de commandes oscille donc entre 4 et 5.000 par semaine. Quant à la structure des achats, c'est sensiblement celle des hypermarchés, un tiers des articles livrés étant des produits frais. Depuis la fusion de Promodès avec Carrefour, François Barraud encadre, au sein d'@carrefour, le pôle produits des sites Internet grand public du distributeur, Very-wine et Carrefour Beauté. Parmi les perspectives de développement figurent en priorité l'extension de la livraison à d'autres villes et la commercialisation via Internet de produits blancs et bruns. "Nous avons opté pour à une montée en charge maîtrisée et très progressive, résume François Barraud, fidèle à sa méthode. Dans un projet comme celui la, on ne peut ni tout prévoir, ni tout savoir !"

[Anne-Laure Béranger, JDNet]