Le groupe
Internet
Telecom, fondé par Sébastien Crozier et Xavier
Blanchot, met le cap sur l'Europe. Outre la régie publicitaire
en ligne via l'agence Axidium-Espace,
il s'appuie sur ces activités de fournisseurs de solutions
d'accès Internet gratuit pour des enseignes ou des marques,
qu'ils peuvent répercuter sur leurs propres clientèles.
Le groupe de presse informatique VNU (VNUnet Online), la Fnac,
et le Crédit Mutuel Maritime (Tigranet) ont adopté
ce concept. Le groupe vient de lever entre 10 et 15 millions de
francs auprès de la banque néerlandaise ABN-Amro
pour soutenir son développement européen.
Propos recueillis par Philippe Guerrier le 20
septembre 1999 .
JDNet
: Quels sont les projets d'Internet Telecom ?
Sébastien
Crozier : Notre
premier axe est l'internationalisation à marche forcée.
Internet Telecom est présent en France, en Grande-Bretagne
et en Belgique. Nous ouvrirons des bureaux dans l'ensemble des
pays limitrophes avant la fin octobre. Au début du mois
prochain, nous ouvrirons les bureaux d'Espagne et aux Pays-Bas.
Pour le deuxième axe, on est devenu en quelques mois l'un
des dix premiers "trafiquants de minutes télécom"
en France (à la différence des opérateurs
du type France Télécom, Cegetel, 9 Télécom
ou Kertel qui transportent des minutes physiquement sur leurs
propres réseaux). Nous nous orientons vers des offres qui
couplent téléphonie et Internet. Nous allons de
plus en plus entrer dans la logique de forfaits, qui seront développés
par nos sociétés clientes.
Et
les projets de vos clients à qui vous fournissez des solutions
FAI "clé en main" ?
Nos
clients actuel français sont en train d'être déployés
à l'international, en "global Europe". La Fnac
prévoit l'ouverture d'un accès Internet gratuit
d'ici la fin de l'année. Internet Telecom en sera le prestataire.
VNUet a l'intention également de développer ce type
de service en Belgique. Notre objectif est de globaliser les offres
de nos clients, tant pour eux qu'au sein des groupes auxquels
ils appartiennent.
C'est
un sacré défi...
20 à 30% de l'audience du Net en
France provient de l'international. Il ne faut pas avoir honte
d'exporter l'Internet français. Nous sommes les premiers
Français à conquérir l'Europe dans le domaine
de l'Internet gratuit. Notre réussite est importante. Il
ne faut pas se méprendre sur les enjeux. Il existe des
opportunités fantastiques à prendre en Europe.
Et
vos nouveaux clients ?
Nous finalisons une offre avec un partenaire bancaire qui devrait
apparaître dans les dix-quinze jours et nous développons
une offre liée aux médias.
En
matière de publicité en ligne (via Axidium-Espace),
sur quels projets travaillez-vous ?
Nous
sommes en train de monter des systèmes qui visent à
coupler Internet et publicité, à faire du profiling
avec des bases de données relationnelles. On est capable
d'attribuer pour un client qui passe par l'un de nos accès
un moyen d'identification qui lui permet de bénéficier
de réductions chez un e-marchand. Avec un accès
VNUnet, la home page est bloquée lorsque l'Internaute se
connecte. Il voit forcément les publicités affichées
sur le portail. Pour des opérations un peu fines, on arrive
à un taux de clics de 3 ou 4%. On a fait des tests dans
ce sens mais je ne vous dirai pas pour qui.
De
combien d'abonnés disposez-vous sur l'ensemble de vos offres
?
En
terme de nombre d'inscrits, plus de 250.000 inscrits. Ce chiffre
n'a pas beaucoup de sens. Nous préférons prendre
en compte le nombre d'abonnés actifs, c'est à dire
la personne qui s'est connectée au moins une fois dans
les 30 derniers jours par notre réseau. Et là, nous
arrivons à 120.000. Notre objectif est d'atteindre 250.000
à 300.000 abonnés actifs à la fin de l'année.
Quelles sont vos ambitions face à la concurrence ?
Nous
voudrions rejoindre le peloton de tête, à savoir
dans les quatre ou cinq premiers fournisseurs d'accès Internet.
Nous sommes sixième actuellement, derrrière quatre
FAI payants (Wanadoo, AOL, Club-Internet, Infonie) et un gratuit
(Liberty Surf).
Vous
avez levé fin juillet entre 10 et 15 millions de francs
auprès de la banque néerlandaise ABN-Amro. Vous
cherchez un second souffle?
Tout d'abord, notre modèle économique a toujours
été rentable, ce qui est rare dans le domaine de
l'Internet. Les levées de fonds servent à accélérer
notre développement en Europe. Il faut d'abord définir
les besoins. Nous répondons à beaucoup de sollicitations
en provenance de la place de Paris, en particulier des capitaux-risqueurs.
Que
vous inspirent les partenariats entre les FAI gratuits et les
portails ou sites marchands ?
Il faut faire attention à ne pas brader ses relations
clients en mettant en place des systèmes de partenariats
qui à court terme sont positifq mais à long terme
ne garantissent pas la pérennité des clients. Le
comble est de monter des partenariats avec des sociétés
qui demain risquent d'être vos concurrents.
En
avril-juin dernier, des prestataires criaient gare à l'Internet
gratuit, la qualité ne va pas suivre... Vous en pensez
quoi ?
Le prix n'est pas le facteur déterminant à la pénétration
des nouvelles technologies. Il faut quand même replacer
le débat: nous ne sommes pas sur un marché de remplacement
mais d'innovation avec un cycle de vie qui est rarement en dessous
de 25 ans. L'Internet gratuit n'a pas provoqué une explosion.
Nous l'avons bien vu en Grande-Bretagne. Au contraire, il est
venu en soutien à sa croissance. Nous l'avons vu avec le
téléphone ou la télévision, il faut
plus de 25 ans avant d'atteindre un taux de pénétration
de 90%. A aucun moment dans l'histoire des nouvelles technologies,
nous n'avons observé d'effet de rupture ou d'engorgement.
L'Internet gratuit est un modèle
qui durera longtemps ?
Disons encore entre 18 à 24 mois avant que de nouvelles
technologies modifient les modèles économiques.
Tout le monde sait que l'Internet gratuit n'est pas vraiment gratuit:
il faut payer les communications locales. On voit émerger
des offres avec forfait. L'ADSL va faire son apparition. On ne
payera plus à la durée. On rebasculera vers de l'Internet
payant avec des services à valeur ajoutée.
Qu'allez-vous devenir à ce
moment là ?
Internet Telecom a la faculté de s'adapter au marché
de manière assez flexible. La fait de posséder des
investissements lourds en terme d'infrastructures rend les entreprises
incapables de s'adapter au marché. Chez Internet Telecom,
nous possédons notre propre architecture de réseaux,
que nous louons. Nous sommes comme les grandes chaînes numériques.
TPS ou Canalsatellite ne possèdent pas leurs propres satelites.
Elles louent de la place. Nous sommes typiquement des gestionnaires
de flux télécom, financiers et de relation-clients.
Quand
allez-vous développer une offre ADSL ?
Courant novembre. Ainsi qu'une offre WAP (convergence Web/téléphonie
mobile) avant la fin de l'année.
Quels
sont vos sites d'information favoris ?
Les sites du Monde
ou de Libération,
où il possible de voir l'édition du jour à
partir de deux heures du matin.
Quels
sites consultez-vous pour vos loisirs ?
Les sites de jeux en réseaux. C'est un nouvel univers de
la convivialité. Et des sites d'archives d'images: ils
représentent une part de mémoire du monde.
Qu'aimez-vous
sur Internet ?
La richesse de l'information mise en ligne.
Qu'y
détestez-vous ?
La pédophilie.
Sébastien Crozier, 31 ans, est co-fondateur d'Internet
Télécom avec Xavier Blanchot. Fondateur et directeur
général d'ICI Télématique (3615 Fnac,
Ikea, Go Voyage, Bosch, Air Liquide...) entre 1990 et 1994. Directeur
de clientèle de VT Com (France Télécom) entre
1994 et 1996. Il a participé au lancement de Wanadoo et
Cybercâble. Il a été directeur d'études
multimédia pour SDI (groupe France Télécom).
Internet Telecom en chiffres :
Date
de création
|
Mars
99
|
Clients
|
Fnac, VNU, Crédit Mutuel Maritime
|
Société soeur
|
Axidium-Espace
|
Effectif |
30 personnes |
Prévision
chiffre d'affaires |
30
millions de francs sur les douze premiers mois |