Chapitre.com
se revendique comme le dernier libraire en ligne "indépendant"
et se considère davantage comme un spécialiste qu'un
généraliste. Il s'appuie sur son réseau de
libraires physiques sous la forme de partenariats exclusifs. Il
mise également sur la francophonie. Le cap est non seulement
maintenu mais en plus il est renforcé. Contre vents et
marées...
Propos recueillis par Philippe Guerrier le 29
novembre 1999 .
JDNet:
Vous vous revendiquez comme le dernier libraire en ligne indépendant.
C'est un choix ou un passage forcé?
Juan Pirlot de Corbion : C'est clairement un choix
à l'origine. J'ai créé chapitre.com en septembre
96 pour être entièrement indépendant. C'est
la condition pour optimiser notre développement stratégique
avec notre réseau de 200 librairies partenaires.
Face
aux grands groupes (Fnac/PPR, Alapage/France Télécom,
etc), vous n'avez pas l'impression de jouer David contre Goliath
?
Nous sommes clairement dans cette position mais vous
connaissez la fin de l'histoire... Le fait d'être indépendant
nous donne de fortes capacités de réactivité
et d'inventivité.
Comment
vous positionnez-vous par rapport aux autres libraires en ligne?
Je pense
que chapitre.com se situe en troisième position derrière
le site de la Fnac et Alapage. En revanche, j'estime que nous
sommes devant BOL. France Loisirs avec son statut de club de livres
est un peu différent.
Vous
définissez-vous comme un généraliste "culturel"?
Nous avons une stratégie de spécialiste
et moins de grande distribution. Notre business model est différent
de celui de la Fnac ou de BOL. Nous proposons trois produits:
les livres neufs, les livres neufs à prix réduits
et les livres rares. Notre service de recherche est destiné
à acheminer les desideratas des internautes auprès
de notre réseau de plus de 200 libraires.
Quel
pourcentage du CA tirez-vous des livres neufs?
La part des livres neufs est toujours prépondérante:
70%. Le reste concerne le fonds de livres rares. Nous réalisons
1,5 million de francs par mois de ventes via Internet.
Chapitre.com dispose d'un portefeuille de 40.000 clients effectifs
avec
un panier moyen important, de l'ordre de 280 francs. Nous projetons
de
fidéliser 600.000 clients d'ici 5 ans.
Quels
sont vos objectifs ?
Nous visons 25% de part de marché sur le livre francophone
en 2000. Le projet dans son ensemble peut se résumer ainsi:
chapitre.com veut être le site le plus spécialisé
dans le monde du livre et de l'imprimé. C'est important
que nous gardions notre identité de librairie spécialisée
car les livres de fond sont de plus en plus écartés
sur le marché traditionnel.
Concrètement,
comment comptez-vous parvenir à les atteindre?
Nous allons adopter une stratégie de renforcement pour
les partenariats. Actuellement, nous signons deux ou trois nouveaux
partenariats par mois pour étoffer développer notre
réseau de fédération de librairies. Nous
misons sur la francophonie et ce n'est pas un vain mot. Nous réalisons
45% de nos commandes à l'export. La Suisse, le Canada et
la Belgique n'occupent pas une place de premier ordre. Ce sont
les Etats-Unis, le Brésil, le Japon et l'Afrique francophone
qui représentent une part prépondérante.
Nous nous adressons aux 75 millions de francophones dans le monde
entier. C'est un vivier de lecteurs/acheteurs considérable.
Nous avons signé des partenariats dans ce sens avec l'Alliance
Française et la Fédération internationale
des professeurs de Français.
Quelles
sont les nouveautés que l'on peut attendre du côté
de chapitre.com?
A la fin du premier trimestre 2000, nous allons mettre en place
un système de "print à la demande". Ce
sera un service d'accès à des documents introuvables
pour une ré-édition. A la mi-janvier, nous prévoyons
également d'ouvrir une filiale commune chapitre.com/L'Express
qui va s'appeler dicodor.com. Comme son nom l'indique, le site
va encadrer la grande dictée de Bernard Pivot en collaboration
avec le magazine Lire, France 3 et le Crédit Agricole.
Les internautes pourront s'entraîner à faire les
dictées des années précédentes. Ils
trouveront également des espaces de jeux de mots, des citations
et un Scrabble en ligne. La finale de cette année sera
retransmis en Real Video sur le site.
Comment
gérez-vous le contenu sur chapitre.com ?
Nous
avons une équipe éditoriale de trois personnes.
Une part très importante du budget y est consacré.
C'est plutôt un magasin plutôt qu'un magazine. Nous
produisons du contenu avec une fonction inédite : le téléchargement
de catalogues en format Word, RTF ou PDF. Nous les avons rassemblés
autour de 1.000 centres d'intérêt.
Que
faîtes-vous des données que vous récoltez
et qui concerne les internautes ?
Nous ne cédons pas notre base de données à
des tiers. En revanche, nous voulons renforcer l'aspect services
privilégiés. Nous avons une mailing list mais qui
reste à développer. Début 2000, nous allons
ouvrir un "Club Chapitre" avec lequel nous allons communiquer
sur les nouvelles parutions et formuler de nouvelles propositions.
Quel
est le profil de votre clientèle ?
Finalement, on a assez peu d'éléments à ce
sujet. Nous évitons de demander trop d'informations aux
internautes pour faciliter le processus de commande. Il apparaît
que les enseignants et les étudiants forment une grande
partie de notre clientèle.
Comment se passe le service d'enchères de livres avec Aucland
?
Très bien. Le nombre de transactions n'est pas négligeable
(NDLR, nous n'avons pas pu recuellir d'informations plus précises
à ce sujet). L'expérience d'enchères
pour un produit bien défini semble susciter un grand intérêt
auprès des internautes. Les enchères ont une certaine
légitimité pour les ouvrages un peu plus haut de
gamme.
Comment
chapitre.com est-il financé?
Les marges que nous dégageons sur les ventes ne constituent
qu'une brique de l'édifice mais elles sont bonnes surtout
pour des livres avec un prix élevé. Les marges représentent
en 99 35% de notre CA. Nous avons levé une première
tranche au début de l'année 99 et une deuxième
devrait être bouclé pour fin décembre. Le
financement externe est prépondérant.
Vous
avez été contacté pour un rapprochement ?
C'est une profession qui bouge beaucoup. La concentration est
très rapide. Nous avons juste engagé des discussions
mais pas plus.
L'arrivée d'Amazon en France,
vous y croyez ?
Ca semble bien parti. Ca va contribuer à ouvrir le marché.
Je connais bien le monde des éditeurs mais très
peu d'informations circulent à ce sujet. Amazon se retrouve
devant "l'exception culturelle" en France: il existe
une tradition d'éditeur, le minitel, la distribution des
livres par les maisons d'édition, le réseau important
de détaillants en France. C'est très complexe. Il
est normal qu'Amazon ne trouve pas tout de suite ses marques.
Comment voyez-vous l'évolution
du monde des libraires en ligne ?
Je vois deux logiques se distinguer: la grande distribution et
la logique de librairie de services. A l'intérieur de cette
répartition, un petit nombre de marques vont dominer le
marché. Ce seront des acteurs français, mis à
part quelques initiatives étrangères. Leclerc devrait
sortir quelque chose de grande envergure sur ce marché.
Il faut savoir que la part de marché de la grande distribution
est supérieur à celle attribuées aux maisons
d'édition. Mais il sera difficile pour les nouveaux venants
de s'imposer. Les places sont déjà prises.
Quel
est votre site d'informations favoris ?
Le site du Monde et des Echos
ont des contenus intéressants que l'on peut consulter assez
rapidement.
Vous
achetez quoi en ligne ?
Des livres bien sûr sur chapitre.com mais aussi sur les
sites de mes concurrents.
Qu'aimez-vous
sur le Net ?
La rapidité des échanges. Le fait de trouver des
informations inédites. Je trouve que le Net amène
de nouveaux rapports sociaux. Via la correspondance par mail par
exemple qui est très différente du courrier traditionnel.
Vous
détestez quoi ?
Les connexions lentes. Mais je plains surtout les autres. Nous
avons réglé ce problème de notre côté.
Chapitre.com en chiffres :
Catalogue
|
380.000
livres neufs, 150.000 livres anciens
|
Nombre
de commandes par jour
|
350
|
Réseau
de libraires
|
250
|
Panier
moyen
|
280
francs
|
Nombre
de visiteurs par mois
|
120.000
|
Objectif
|
fidéliser
600.000 clients d'ici cinq ans
|