Excite@Home
est né de la fusion, en 1999, de la société d'accès Broadband
@Home et du portail Excite. La société occupe aujourd'hui un gigantesque
campus au cúur de la Silicon Valley et tourne de plus en plus
ses regards vers l'Europe, comme l'explique John O'Farrell.
Propos recueillis par Samuel Kissous
le 11 avril 2000
.
JDNet.
Pouvez-vous présenter Excite@Home en une phrase ?
Excite@Home est une compagnie unique,
qui associe le plus large fournisseur d'accès broadband (haut
débit) et l'une des cinq plus importantes propriétés média du
Web.
Quelles
sont vos sources de revenu ?
En ce qui concerne l'accès à Internet, nous touchons 35% des abonnements
recueillis par les distributeurs (sociétés de c’ble, DSL... ). Côté
média, nous avons des revenus de publicité et de partenariats.
Quels sont vos résultats ?
Nous avons réalisé un chiffre d'affaires
de 130 millions de dollars au quatrième trimestre 1999, avec une
répartition égale entre nos deux activités. Le nombre d'abonnés
au broadband croît rapidement : ils étaient 50.000 fin 1997, 1,15
million en 1999 et nous en prévoyons 3 millions fin 2000.
Comment
vous positionnez-vous par rapport aux fournisseurs d'accès Internet
par DSL ou satellite ?
Nous sommes les leaders de l'accès
broadband, peu nous importe si la liaison finale se fait par DSL
ou autre chose. Le satellite est un medium à sens unique, dont
la capacité est limitée dans le temps. Notre avantage est d'avoir
un backbone à haute vitesse.
Quelles
sont les synergies entre Excite et @Home que vous constatez effectivement
aujourd'hui ?
Nous venons de lancer @Home 2000,
qui propose pour la première fois du contenu Excite. Un abonné
@Home reçoit désormais un service broadband complet avec le portail
Excite, du contenu, la possibilité de s'inscrire à des clubs,
etc... En outre, Excite joue un rôle important dans l'acquisition
de nouveaux abonnés pour @Home. 60 à 70% des nouveaux abonnés
proviennent d'Excite ou de Matchlogic, notre filiale de marketing
direct.
Qu'est-ce
qui a changé depuis la fusion ?
Excite et @home se connaissaient
déjà bien, nous sommes géographiquement placés juste l'un à côté
de l'autre ! Au moment de la fusion, chaque société comptait 700
collaborateurs, et nous sommes aujourd'hui 3.000. Il n'y a pas
eu de licenciements lorsque les fonctions ont été intégrées. A
une organisation fortement imprégnée d'une culture d'ingénieurs
(provenant de la NASA ou de Cisco) se sont ajoutés des gens venus
des media, de la TV... Au début de cette année, le PDG d'Excite
George Bell est devenu PDG d'Excite@Home et le le PDG d'@Home
Tom Jermoluk a pris la tête du Conseil d'Administration [NDLR
: Tom Jermoluk va prochainement uitter Excite@Home pour rejoindre
la firme de venture capital KPCB, Kleiner Perkins].
Que
pensez-vous de la fusion AOL-Time Warner ?
Cela justifie notre propre stratégie.
AOL a passé beaucoup de temps à rechercher un accès au broadband.
Ils ont réalisé qu'ils avaient besoin d'une connexion à grande
vitesse, et ont finalement décidé d'acheter le c’ble dont ils
avaient besoin. Au moment où la fusion sera effective, ils auront
accès à 28 millions de foyers c’blés, quand nous pouvons en toucher
86 millions. Ils ont intégré l'accès et le contenu, mais fondamentalement,
ils sont restés une société d'ancien média à petit débit.
Quelles
nouvelles technologies vous semblent particulièrement intéressantes
dans l'industrie Internet ?
Le broadband, parce que la plainte
N 1 des consommateurs est la vitesse. Internet n'est pas encore
un outil facile. Le wireless (sans-fil) est un phénomène important,
permettant la mobilité et l'accès rapide. C'est une tendance énorme
au niveau international.
Quelle
est votre vision de l'industrie Internet en Europe ?
Il y a eu un changement considérable
au cours des dix-huit derniers mois. Les services gratuits y ont
joué un grand rôle. L'histoire de Freeserve est fantastique mais
fondamentalement, leur business model n'est pas solide. Les investisseurs
sont prêts à récompenser une croissance rapide mais de plus en
plus, ils vont exiger des modèles également capables de gagner
de l'argent. Les frais téléphoniques restent une barrière importante.
Quels
sont les plans d'Excite@home en Europe ?
Nous allons bientôt annoncer des
projets importants. Une version locale d'Excite existe déjà au
Royaume-Uni, en France, en Allemagne, en Italie, aux Pays-Bas,
et en Suède. Nous espérons améliorer notre présence en Europe
de manière considérable dans les mois qui viennent, en termes
de recrutement aussi bien qu'en termes de marketing. Parallèlement,
nous allons développer notre activité d'accès broadband. @Home
vient d'être lancé aux Pays-Bas et concerne 1.5 million de foyers.
Quels
sont vos marchés prioritaires ?
Cette année, nous allons étendre
notre offre broadband, par le c’ble ou le DSL, au Royaume-Uni,
à la France, et à l'Allemagne.
Avez-vous
le sentiment que le management européen est bon ou faites-vous
plutôt venir des Americains en Europe ?
Il y a plein de bons managers en
Europe. Excite comprend près de 80 personnes en Europe, principalement
à Londres, et @Home une centaine. 95% d'entre eux sont des Européens.
Nous voulons doubler ces chiffres dans les six prochains mois
en recrutant autant d'Européens que possible, et quelques Américains
pour permettre le transfert de technologies. La plupart des managers
américains eux-mêmes ne sont pas dans le business depuis plus
d'un an ou deux.
Envisagez-vous
de vous associer à des partenaires en Europe ?
Nous sommes ouverts à des partenaires
à condition que ceux-ci apportent des actifs ayant une véritable
valeur. Lycos a vendu 50% de son activité européenne pour 10 millions
de dollars, alors que la valorisation de cette activité atteint
aujourd'hui 4 à 5 milliards d'euros. Un partenariat n'est pas
un passage obligé pour nous.
Vous
avez travaillé pour la Communauté européenne. Quel doit être le
rôle du gouvernement dans le développement du commerce électronique
?
Il ne doit pas y toucher ! Il faut
une certaine régulation pour empêcher un usage frauduleux d'Internet
(protection de la vie privée par exemple), et s'assurer que les
réseaux soient ouverts. La fiscalité pourrait être un gros problème,
l'Union européenne a des projets de taxation du commerce électronique
qui pourraient s'avérer très néfastes. Dans l'ensemble, la classe
politique européenne s'achemine vers une meilleure compréhension
d'Internet. En tous cas, elle le comprend aussi bien que ses collègues
américains... Vous avez également travaillé pour Telecom Ireland.
Pensez-vous
que les sociétés de télécommunication européennes vont adopter
un tarif fixe ?
Il y a beaucoup de pression en ce
sens. Une politique de prix fixes se dessine mais la gratuité
totale ne peut durer.
Quel
est votre usage personnel du Web ?
Très fréquent. Je regarde les nouvelles,
la météo, l'actualité cinématographique, et je gère mon portefeuille
d'actions. J'achète des billets d'avion, des livres, des CD ...
Ma femme est une acheteuse plus importante, elle achète des vêtements
pour les enfants. C'est la meilleure façon de le faire : il y
a plus de choix que tout ce qu'on peut imaginer dans un vrai magasin.
Un
mot de conclusion ?
Excite@home n'est pas encore très
connu en Europe mais nous nous attendons à ce que ça change bientôt.
Nous occupons une position vraiment unique dans l'industrie et
nous avons l'intention d'y parvenir en Europe également.
Avant
de rejoindre Excite@Home, John O'Farrell a été président de la
division interactive de US West et responsable des " Nouvelles
Entreprises " pour Telecom Ireland. Il a également travaillé chez
Booz Allen and Hamilton à San Francisco, et pour la Communauté
européenne au Luxembourg. Il est diplômé d'ingénierie électrique
de l'University College de Dublin et a obtenu un M.B.A. à Stanford.