Alors que
nous avons le regard fixé sur les mouvements visibles et spectaculaires
tel que la prolifération des assistants personnels (comme le Palm
Pilot) ou la montée en puissance du Web qui touche tous les secteurs
économiques, un autre mouvement, silencieux cette fois, est en
train de changer le monde en profondeur. Cette révolution en cours
aura aussi son impact sur le monde de l'informatique...
Les PC, les téléphones cellulaires et même les consoles de jeux
vidéo captent toute l'attention du public et des médias. Ces appareils
qui sont diffusés à des dizaines de millions d'exemplaires sont
considérés comme étant les symboles de l'ère de l'électronique.
Mais, sur les presque cinq milliards de microprocesseurs fabriqués
en 1998, seulement 2,5% d'entres eux se sont retrouvés dans nos
habituels systèmes informatiques (PC, serveurs ou même Palm) !
Mais alors, qu'est-ce qui a englouti le reste ? Tout ce qui est
l'électronique/informatique embarquée. Ce marché est devenu énorme
et ne concerne plus seulement les avions de combats. On prévoit
que d'ici à cinq ans, c'est près de dix milliards de processeurs
qui seront " consommés " par cette industrie. Tout le monde est
concerné, une maison américaine actuelle renfermerait déjà une
quarantaine de microprocesseurs disséminés partout, des appareils
ménagers dans la cuisine jusque dans le système de climatisation.
Et s'il y a un PC au foyer, ce dernier et sa périphérie fait monter
la moyenne à 50...
Même densité du côté de la voiture. Une voiture familiale moderne
en embarqué au moins une vingtaine (pour gérer l'ABS et les air-bags
mais aussi pour l'injection et l'allumage du moteur, le poste
de radio, le verrouillage des portes, etc.) et cette moyenne grimpe
vite quand on monte en gamme (autour de 60 pour une Mercedes "
ordinaire "). Comme on pouvait s'y attendre, c'est encore pire
dans les appareils sophistiqués comme les avions de ligne. Le
Boeing 777 a quelques 1300 microprocesseurs à l'intérieur de sa
carlingue. A ce niveau, on peut commencer à parler " d'ordinateur
avec des ailes " (dans la même logique, une maison est un système
électronique avec un toit, une voiture, un ensemble de puces avec
des roues et un volant, etc.) !
C'est évidement la loi de Moore qui a aidé à cette quasi-omniprésence.
En vertu de cette loi, non-seulement la puissance des processeurs
double tous les 18 mois, mais, également et encore plus important,
la taille et le prix de ces puces est réduit d'autant. En conséquence,
les objets les plus ordinaires ont été progressivement bourrés
de capteurs et de processeurs. Ainsi, un jouet en peluche, le
chien Furby, contient plus de puissance de traitement que le module
lunaire...
La question qui vient naturellement à l'esprit face à une telle
débauche, c'est " jusqu'où cela ira-t'il. Parce que l'on peut
mettre des capteurs et des processeurs partout, va t-on le faire
? ". La réponse à de bonne chance d'être positive. En effet, certains
spécialistes n'hésitent plus à prédire que les codes-barres des
emballages seront progressivement remplacés par des " étiquettes
actives " capables de communiquer leur statut sur le réseau via
une émission sans-fil (infrarouge ou autres). Un futur où tous
les objets (tous !) seraient asservis par des capteurs et des
processeurs qui calculeraient en permanence les meilleures conditions
d'utilisation et qui communiqueraient état et historique sur le
réseau en continu est en train de se dessiner en ce moment. Invisibles
mais omniprésent tel est le mot d'ordre déjà respecté par cette
armée de processeurs embarqués dans le décor de notre vie quotidienne.
OK pour cette vision futuriste mais en quoi cela pourrait-il nous
impacter ? Déjà, on peut prévoir que puisque le tracing généralisé
de tous les objets manufacturés sera possible, alors il y aura
une loi pour l'imposer (afin de définir les conditions et les
responsabilités d'un accident par exemple). Cette obligation de
tracing va imposer des applications adaptées (faisant appel à
des mécanismes d'intelligence artificielle pour filtrer l'énorme
masse des données) et des capacités de stockage bien au-delà de
ce qu'on a l'habitude de manipuler.
Ensuite, le feed-back entre fabricants et consommateurs sera permanent
et automatique. Ce nouveau cadre d'échange va accélérer les processus
de mise au point et permettre de tester des produits qu'on n'oserait
imaginer dans des films (exemple : des micros-machines au sein
de l'organisme humain pour remplacer l'effet de certains médicaments
localement bénéfiques mais globalement nocifs...).
Enfin, on peut imaginer que notre PC sera devenu portable dans
tous les sens du terme : une veste qu'on enfile le matin et qui
est bardée de capteurs, de processeurs et qui intègre plusieurs
interfaces de communication (infrarouge vis-à-vis des autres systèmes,
holographique et miniaturisé - juste devant l'oeil pour plus de
discrétion- pour son propriétaire).
Lectures recommandées :
"Honey,
I programmed the blanket: Omnipresent Chips"
[Alain
Lefebvre, vice-président du groupe SQLI]