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Interviews |
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Patrik Flierl
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Directeur
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SuSe Linux
France |
Poursuivre
une stratégie monopolistique en se revendiquant du modèle open
source est une contradiction |
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Patrik Flierl, directeur de SuSe
Linux France, répond ici à Colin Tenwick, vice président
Europe, Moyen Orient et Afrique de RedHat
(voir
l'interview sur le sujet). A ses yeux, une situation monopolistique
est irréaliste dans le monde Linux, car contraire à l'esprit
de l'Open Source. |
Propos recueillis par Antoine Crochet Damais le 18
juillet 2001
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JDNet
Solutions: Comment réagissez-vous aux
propos de Colin Tenwick ?
Patrik Flierl:
Il n'y a pas grand chose de nouveau
dans son propos. Hormis une restructuration de son organigramme
en Europe, la seule nouveauté que nous offre RedHat est une
base de données [RedHat Database]. Or, il ne s'agit pas là d'un
produit qui contribue à faire face à notre principal concurrent
commun. A savoir : Microsoft. De notre côté, nous recommandons
plutôt de se concentrer sur l'amélioration des interfaces (notamment
KDE) et des logiciels bureautiques - comme K-office et Star
Office (qui reste assez lourd). C'est par ce type de projets
que nous arriverons à fournir des alternatives sérieuses aux
outils Microsoft - tels Excel ou Outlook - qui se sont imposés
comme des standards.
Que
pensez-vous de la volonté de RedHat de s'imposer comme leader
sur ce marché ?
Il
s'agit là d'une contradiction. On ne peut adopter une stratégie
monopolistique dans un modèle Open Source, car il s'agit par
essence d'un univers multi-projets. Un monopole à 90 % n'est
pas réaliste. A la différence d'une telle stratégie, nous avons
plutôt opté pour une politique de partenariats. D'abord, nous
soutenons les initiatives des communautés de développeurs.
Ensuite, nous travaillons main dans la main avec des sociétés
oeuvrant dans notre domaine, tel que Sun ou Applix. Enfin, nous
accompagnons des constructeurs de matériels qui désirent lancer
des pilotes en Open Source.
Votre
implication dans le projet
LSB entre également dans cette logique de différenciation ?
La
volonté de certain de s'imposer en tant que leader est comparable
à ce qu'a vécu il y a quelques années l'univers Unix. Sun (avec
Solaris) et HP (avec HP UX) ont cherché à imposer leurs systèmes
respectifs. Mais, ils ne se sont pas mis d'accord autour d'une
norme commune. Conclusion : les logiciels tournant sous l'un
n'étaient pas supportés par l'autre. En soutenant LSB
(Linux Standard Base), notre objectif est d'éviter qu'une telle
situation se reproduise entre les distributions Linux. Et en
ce sens, nous montrons l'exemple en mettant nos solutions en
conformité avec ce standard de développement. Grâce à une telle
initiative, le monde Linux pourra se donner les moyens de proposer
suffisamment d'applications pour concurrencer Microsoft.
Quelle
analyse faites-vous du positionnement de cet "ennemi commun"
?
Lorsque
Microsoft a lancé Windows, le marché des systèmes d'exploitation
était encore très petit. Il n'a donc pas eu de mal à s'imposer
dans un premier temps. Aujourd'hui, les acteurs se sont multipliés
(IBM, Sun, Motorola, etc.), ainsi que les besoins (terminaux
fixes ou mobiles, gros systèmes, etc.). Et on remarque que sur
certains segments émergents, tel que les systèmes embarqués,
Microsoft a plus de mal à s'imposer. C'est notamment le cas
de Windows CE, qui n'a pas vraiment été accepté par les utilisateurs.
Quels
sont vos angles d'attaque du marché Linux?
Nous
visons à la fois le grand public (pour environ un quart de notre
activité) et les entreprises. Le marché des PME générant à lui
seul près de 25 % de notre chiffre d'affaires. Pour nous, il
n'y a pas de sens à cibler l'un ou l'autre. En d'autres
termes, un salarié doit pouvoir utiliser le même environnement
en rentrant chez lui. Vis-à-vis de ces deux cibles, la différenciation
offert par nos solutions réside dans leur prix, qui reste modeste,
et dans les possibilités offertes en terme de sur-mesure. Côté
entreprise, notre valeur ajouté majeure reste la prestation
de services autour du déploiement. Une démarche qui s'accompagne
par la commercialisation de solutions clé en main, tels qu'un
serveur de messagerie ou un serveur de travail collaboratif.
Plus globalement, nous nous concentrons sur les segments PC
et serveur, ainsi que dans certains domaines plus spécialisés
(telle que la santé). Nous sommes assez peu présents dans celui
des systèmes de distribution embarqués.
Quelles
sont les différences principales entre la distribution Suse
et les autres ?
A
chaque nouvelle édition, nous commençons par vérifier les librairies
de code du noyau. Puis, nous passons par un système de construction
de versions pour recompiler les logiciels. Au final cette démarche
nivelle notre distribution, et évite ainsi les problèmes d'incompatibilités
tout en assurant une bonne stabilité.
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Patrik
Flierl, diplômé de l'université de Stuttgart, est le Directeur
Général de SuSE Linux en France. Il a été précédemment responsable
des relations stratégiques de SuSE AG avec Intel. Il a également
travaillé pour TakeFive Software (actuellement WindRiver), où
il était responsable des pays scandinaves.
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