Parlons
un peu des nouveaux outils de communication : ont-ils amélioré
les interactions entre les hommes ?
L'e-mail
s'impose très clairement. Est-il indispensable ? J'en doute :
la moitié des mails reçus peut être jetée instantanément,
et le mail n'apporte pas grand chose au final. Cependant, les employés
vivent comme une brimade le fait de ne pas avoir de mail : il faut
donc leur en donner un. Pour le reste : le chat est une source de
distraction, le SMS est utile. Quant à la visio-conférence,
elle ne peut pas être utilisée en France : les français
sont incapables de suivre un ordre du jour.
Que
pensez-vous des outils de travail partagé, comme l'édition
conjointe ou la conception conjointe ?
La
plupart du temps - lorsqu'on tente de les utiliser - c'est un
échec. L'édition conjointe ne remplacera jamais une réunion.
Quant au travail simultané sur une même application, ou un
même fichier, ça marche rarement. Il y a un seul cas où
ces outils de TCAO sont intéressants : quand les interventions
sur l'application ou le document peuvent se découper en différentes
séquences. Pour tous les processus séquentiels, les outils
collaboratifs ont un avenir. Pour le reste, je pense qu'ils ne décolleront
jamais.
Que
pensez-vous des outils qui permettent de gérer l'information et
les compétences ?
On
touche ici au knowledge management, et il existe des bons et des mauvais
outils. Je déconseille l'usage des moteurs de recherche :
on perd un temps considérable en les utilisant car on a tendance
à chercher toujours plus loin. C'est - ici encore - un
outil à réserver aux universitaires, qui ont le temps de
faire des recherches exhaustives. En entreprise, mieux vaut confier ce
travail à un professionnel, qui saura où s'arrêter.
Par contre, je crois en une autre façon de distribuer l'information :
la hiérachisation et le ciblage. Il peut être très
utile de faire parvenir des informations habilement choisies à
une cible bien précise.
Et
la cartographie des compétences ?
C'est
un excellent outil : il est devenu indispensable chez KPMG. Grâce
aux bases de données de compétences, nous savons très
facilement qui sait quoi parmi les 220 consultants de KPMG. Et si nos
clients utilisaient de telles solutions, ils pourraient presque se passer
de nous : la plupart du temps, nous leurs fournissons une expertise
qu'ils ont déjà en interne.
Vous
évitez donc de les conseiller à vos clients ...
Vous
vous trompez : je ne cours aucun risque si je leur conseille cet
outil. Il ne suffit pas d'installer une base de données pour que
l'échange des compétences fonctionne : il faut encore
convaincre les employés de mettre à jour régulièrement
leurs fiches de compétences dans la base, et d'accepter de conseiller
les collègues qui les contactent. Les entreprises ne jouent pas
la carte de la polyvalence : les employés sont concentrés
sur leur tâche, et lorsqu'on leur demande de donner des conseils
à un collègue, on se retrouve au bon vieux temps de la lutte
des classes : personne ne prendra le temps de donner des informations
stratégiques à un collègue. C'est
une erreur de la part des entreprises de ne pas essayer de changer les
choses. Mais pour tout dire : l'imposition de cette pratique serait
vraiment très délicate. Dans une petite structure comme
KPMG, nous pouvons facilement manier le bâton et la carotte. Qui
plus est, nos consultants ont grand intérêt à faire
connaître leurs compétences. Dans les grands comptes, la
question de la motivation est beaucoup plus délicate.
Et les outils de coordination -
WorkFlow, gestion des tâches, agendas partagés ?
Avec les outils de gestion
des connaissances, c'est ce que je retire de posititif du TCAO. Ils permettent
de rationaliser et d'optimiser la division des tâches chère
à Monsieur Ford. On découpe le projet en plusieurs parties,
et l'on nomme un responsable pour chaque unité. C'est très
utile