SFA : les projets se banalisent mais n'en restent pas moins hautement stratégiques
Par JDNet Solutions (Benchmark Group)
URL : http://www.journaldunet.com/solutions/0401/040121_enquete_commerciaux.shtml
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Mercredi 21 janvier 2004

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Comment les départements commerciaux des entreprises ont-ils évolué depuis trois ans, sous l'influence des nouvelles technologies et des progiciels de CRM et de SFA ? Comment le système d'information s'est-il modifié ? L'organisation, le management, les processus et la mobilité ont-ils suivi le mouvement ?

Des experts de la question et des entreprises utilisatrices nous livrent ici leur point de vue, oscillant entre banalisation des projets d'équipement des forces commerciales et nécessaire mise en cohérence des canaux, entre gains de productivité et indispensable adaptation de l'encadrement, entre remontées terrain plus riches et incapacité à les exploiter totalement, entre nomadisme accru et manque de communication avec la hiérarchie.

Des projets banalisés...
Alors que les projets d'automatisation des forces de vente étaient considérés comme complexes il y a encore deux ou trois ans, leur banalisation est aujourd'hui devenue une tendance lourde. "On a assisté à une véritable démocratisation, il n'y a plus rien d'original dans de tels projets", déclare Samir Khanfir, P-DG de l'intégrateur et éditeur Klee Group.

Cette généralisation est tout d'abord due à une meilleure acceptation des équipements nomades - ordinateurs et téléphones portables - par les utilisateurs, mais aussi par leurs interlocuteurs (clients, fournisseurs, partenaires...). La facilité de communiquer avec le système d'information de l'entreprise permet en outre aux "nomades" d'être connectés très régulièrement. "Les personnes mobiles sont un peu considérées comme des sédentaires désormais, elles ont accès aux informations de l'entreprise comme les autres", ajoute Samir Khanfir.

... mais hautement intégrés...
Si généralisés qu'ils soient, ces projets n'en restent pas moins de véritables projets d'intégration, dans tous les sens du terme. "Les applicatifs, les outils et les technologies sont là mais de fortes contraintes de performance sont à prendre en considération. Avec des PDA, par exemple, une optimisation du code doit être effectuée, différentes couches (métiers, interfaces, etc.) sont à gérer et des notions incontournables de sécurité apparaissent, tant au niveau du terminal que de la connexion", confirme Jean-François Jarno, en charge de l'offre mobilité chez Unilog Management.

Acquiescement chez AGF Assurfinance qui a récemment déployé le module Siebel Sales : "Nos commerciaux disposent d'une informatique nomade depuis 1994. Ils ont également accès à leurs fichiers clients depuis longtemps. Mais nous avons ressenti le besoin d'une intégration globale de leur poste de travail dans l'entreprise. Certaines informations nous échappaient parce qu'elles n'étaient pas remontées et exploitées", précise Xavier Harlay, directeur marketing.

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Depuis janvier 2003, grâce à une synchronisation qui a lieu en moyenne 3,5 fois par semaine, les commerciaux permettent à AGF Assurfinance d'avoir une image complète sur ses 2 500 postes nomades, de mieux suivre les retombées de ses actions marketing ou commerciales, de procéder à du scoring client et de comprendre avec plus de finesse le cycle de vente de son marché, passant d'une position de constat après coup à une démarche d'anticipation.

... et stratégiques !
"Si l'outil mobile est vu comme un projet stratégique - et non comme un gadget -, avec une intégration aux méthodes et processus de vente, il a de fortes chances de succès", note Jean-François Jarno, d'Unilog Management. Pour les directions commerciales, l'automatisation des forces de vente doit être vue comme une finalité, un axe autour duquel la stratégie commerciale est bâtie. La direction informatique doit par ailleurs être impliquée dès les premières réflexions, ce qui n'est pas toujours le cas et peut provoquer des échecs retentissants.

"Ce qui est important, c'est la transformation autour d'une rationalisation, d'une mise en cohérence des canaux. Jusqu'à présent, le multi-canal consistait en une sorte d'empilement. L'entreprise était certes plus ouverte vers l'extérieur mais il n'y avait pas de synchronisation. Comment articuler par exemple ses forces de vente avec un centre de contact ou même avec le Web ?", complète Christophe Melieres, senior manager chez Syntegra, en charge de la ligne de services CRM. Des questions, comme on le constate, qui relèvent de politiques d'accompagnement du changement pilotées au plus haut niveau.

Rapprochement avec le marketing
Autre mutation qui apparaît au sein des départements commerciaux, du fait de la présence de plus en plus forte des nouvelles technologies : le rapprochement avec les entités marketing. "L'articulation entre l'opérationnel (forces de vente classiques et centres de contact) avec les équipes 'études' se renforce. La maturité des offres a d'ailleurs été nettement perceptible dans les 18 derniers mois, on assiste à une fusion du CRM et du marketing", remarque Franck Giraud, également senior manager chez Syntegra, spécialisé dans le marketing et les forces de ventes.

Une tendance que le groupe Accor - qui a déployé au plan mondial un intranet pour 500 vendeurs - a constatée et qu'il met en oeuvre au quotidien : "Les hôtels communiquent les prix qu'ils pensent proposer sur un marché, une validation est effectuée par le marketing. Ces grilles de tarifs sont ensuite transmises à notre système de réservation puis sont vendables par Internet et par les agences, grâce au GDS", explique Jean-Jacques Mouchéné, directeur général adjoint, en charge de la DGTI (Direction Générale des Technologies de l'Information).

La collaboration accrue se constate également par le mode de transmission des supports promotionnels ou des argumentaires aux forces de vente. "Les scénarios de vente et les présentations commerciales sont mises à disposition sur intranet, elles sont ensuite téléchargées directement par les commerciaux. Il n'y a plus d'envoi par la poste, la transmission de l'information est fluidifiée, les relais physiques ont disparu", détaille Xavier Harlay (AGF Assurfinance).

Accélération du temps, mais pas toujours des processus de décision
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Remontée des informations plus rapide, meilleure entente entre le marketing et le commercial, plus forte intégration des canaux de vente, tout cela se manifeste par ce que les acteurs concernés perçoivent comme une accélération du temps. "Les entités régionales peuvent suivre des indications d'opportunités diffusées le matin même par le marketing central", déclare Christophe Melieres de Syntegra.

"Une décision prise la veille est répercutée le lendemain", confirme Samir Khanfir, de Klee Group. "Notre intranet a généré de vrais gains de productivité au niveau des forces de vente", renchérit Stéphane Ben Simon, directeur de la promotion, en charge du système d'information des forces de vente chez Accor.

Et Patrice Olivier, directeur informatique chez E.D.A, d'ajouter : "les 280 commerciaux peuvent se connecter simultanément en fin de journée sans que cela nous pose de problème". Le négociant et distributeur de produits alimentaires a récemment équipé sa force de vente d'une solution de prise de commande fournie par Danem et embarquée sur des terminaux NEC MobilePro 790. Dans 85 % des cas, les produits sont désormais livrés sous 48 heures.

Mais cet emballement est-il toujours bien maîtrisé ? La richesse des informations et la rapidité des technologies sont elles convenablement encadrées ? Rien n'est moins sûr. "Tout va plus vite : les clients attendent des réponses rapides et sont habitués au self service, les échanges s'accélèrent, le processus de vente est de plus en plus court mais pas forcément le cycle de décision. On touche ici à l'organisation et aux compétences", note Françoise Blondeau, responsable CRM & marketing chez Oracle.

Le pilotage de l'encadrement doit s'adapter
L'encadrement, qu'il soit au siège ou sur le terrain, est donc confronté à des cycles de décision nouveaux, parfois qualifiés de microscopiques (par opposition à macroscopiques). En central (au siège), on est passé de plans d'actions à moyen terme à une réactivité presque quotidienne : "on peut prendre des accords et les exécuter en plein milieu de cycle, on peut profiter d'une négociation qui se passe bien, diffuser les actions qui en découlent et analyser ce qui se passe", observe Samir Khanfir (Klee Group).

Au niveau du management intermédiaire, décentralisé, les directeurs de zone peuvent "débriefer" chaque jour s'ils le souhaitent, car ils disposent des données les plus fraîches sur leur secteur. Bien entendu, cette "présence" nouvelle, cette transparence accrue peuvent être perçues par les commerciaux comme un regain de pression. Pour que ce changement soit accepté, l'encadrement doit instaurer un climat de confiance propice au dialogue.

"C'est l'ère de la collaboration mutuellement consentie, naturelle parce que les processus de vente sont devenus complexes et que les cavaliers seuls n'existent plus. Vous pouvez être exigeant sur le travail de vos commerciaux si la relation est 'donnant - donnant' : les forces de vente sont par exemple exigeantes sur le suivi de leurs performances et, par là même, de leur rémunération. C'est un élément de motivation dont il faut tenir compte", ajoute Françoise Blondeau (Oracle).

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Les méthodes de vente évoluent
Alors, puisque les technologies ont une place de plus en plus prépondérante au sein des forces de vente, certains n'hésitent pas à aller jusqu'au bout de la démarche. C'est notamment le cas de l'éditeur de progiciels de gestion Arcad Software qui utilise la technologie de conférences Web fournie par Webex comme outil de prospection commerciale à part entière.

"Cela nous permet de couvrir le marché américain depuis la France, sans se déplacer, avec un commercial. C'est monnaie courante là-bas, les gens se déplacent de moins en moins. En France, nous ne réalisons que 20% de nos rendez-vous d'avant-vente via une conférence Web, de vieilles habitudes subsistent encore...", déclare Philippe Magne, P-DG d'Arcad Software.

Pour que ces rendez-vous virtuels aient lieu, le client ou le prospect téléchargent préalablement un plug-in puis assistent à une démonstration sur leur écran, menée à distance par un commercial qui décrit les fonctionnalités de sa solution au téléphone.

Les techniques d'animation et de motivation aussi
Chez Hexapage - fournisseur de solutions d'impression et de bureautique - en revanche, ce sont les commerciaux qui bénéficient d'une nouvelle méthode d'animation : l'annonce des résultats d'un challenge par messages audio notifiés par SMS !

"On cherchait une solution innovante et ludique pour les motiver. Tous les commerciaux sont des 'accros' du téléphone portable, nous leur envoyons donc deux fois par mois des messages en MP3 directement sur leur téléphone pour leur annoncer les classements intermédiaires du concours auquel ils participent jusqu'à fin janvier. L'adhésion est plus forte, tout le monde s'accroche pour dépasser le collègue !", précise Louis Faviet (Hexapage), qui a déployé cette solution originale avec la société de conseil et d'intégration Niji et l'agence "La Voix Prod";

Les exemples de ce qui peut se faire d'innovant sont pléthore, comme par exemple le journal vidéo hebdomadaire diffusé sur intranet par Total, à destination de ses commerciaux, qui peuvent le consulter en streaming ou le télécharger. L'agence Awak'it en est à l'origine. C'est également elle qui a développé la Web TV de DELL : eLive TV, qui émet tous les jeudis matin.

Forces de vente externalisées ?
Autre tendance émergente, l'apparition d'offres de création et de fourniture de forces de ventes ad hoc, "conçues" pour une mission à durée déterminée et dont les objectifs commerciaux sont clairement définis à l'avance.

"Quand American Express lance de nouvelles fonctionnalités pour sa carte Corporate, il faut un impact terrain pour les présenter. Nous recrutons les commerciaux qui conviennent à cette mission, nous les formons au produit, aux techniques commerciales et nous les équipons d'un véhicule, d'un téléphone portable et du matériel informatique adapté à la situation : PC portable, tablet PC ou PDA, en fonction de la complexité des informations à remonter et de la périodicité du reporting", explique Jean-Dominique Hochart, directeur commercial chez Ajilon. Bien entendu, l'encadrement de ces commerciaux est également fourni, afin que les objectifs soient atteints. Des prestations également fournies par la société Horus Executive, spécialisée dans l'externalisation d'ingénierie commerciale complexe.

La communication : première victime de ces évolutions ?
Derrière ces outils évolués, ces données toujours plus riches et rapidement diffusées, ces méthodes qui muent, certains sont d'avis que la première victime à pâtir de l'accélération généralisée des processus et de la dématérialisation des échanges est la communication, non seulement au sein des équipes mais aussi avec le prospect/client.

"L'e-mail est souvent la meilleure façon de ne pas se parler. Les commerciaux d'aujourd'hui manquent de dialogue avec leur management et de coaching. Le nomadisme accru ne vient pas améliorer les choses. Cette perte du sens concerne aussi le dialogue avec le client ou prospect, notamment dans le monde du B2C. La première chose que fait votre banquier lorsqu'il entame une discussion avec vous, c'est de détourner les yeux pour regarder son écran et accéder à l'outil informatique !", affirme Marie-Pierre Leroy, DG de la société Otia, pôle conseil du groupe Teamlog.

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Des arguments balayés du revers de la main par nombre de consultants et d'experts, pour qui les technologies et leurs équipements permettent justement aux forces commerciales de se concentrer sur l'essentiel : le contact avec le client, le relationnel, la convivialité, la découverte des besoins, tout en ayant préalablement accumulé le maximum d'informations sur la personne rencontrée, l'historique de la relation, ses desiderata, etc.

Un juste compromis doit très certainement être trouvé entre la disponibilité de données et d'outils de plus en plus performants et la prise en considération des effets néfastes qu'un nomadisme exagéré peut entraîner.

[Fabrice Deblock, JDNet]



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