L'insoutenable légèreté
du fournisseur d'accès
Par Phil Ox,
président des Webproducteurs
fondateur
de Moi j'aime la télévision
-
Mardi 12 février 2002 -
Bas
débit ou broadband, l'internaute est un peu comme un automobiliste
qui se serait payé une très belle autoroute le menant vers nulle
part. Il n'y plus guère que les fournisseurs d'accès pour faire
semblant de croire que les infrastructures télécom justifient
à elles seules le prix de l'abonnement.
Certes,
nous sommes tous contents de pouvoir envoyer et recevoir des e-mails,
mais ce serait manquer de réalisme que de parier sur le courrier
électronique pour assurer l'avenir de notre industrie. Les producteurs
de contenus pour l'Internet, réunis sous la bannière de l'association
Les Webproducteurs, pensent que le développement économique durable
du secteur passe par un engagement sans faille pour le contenu.
Les jeux, le cartoon, la fiction, le magazine, l'edutainment,
la musique et les contenus éditoriaux sont les produits d'appel
de notre futur Internet. Linéaires ou interactifs, ces contenus
doivent être spécifiques au Web, ils doivent s'inscrire dans notre
espace culturel, ils doivent être aussi fabriqués par des producteurs
indépendants dans une économie saine et diversifiée.
Pour
l'instant, nous sommes loin du compte. En effet, les webproducteurs
ont investi dans le développement de programmes originaux et de
qualité, mais peinent à trouver leur retour sur investissement,
face à l'immobilisme des fournisseurs d'accès et l'absence de
diffuseurs indépendants. Ceux de ces programmes qui ont pu être
diffusés ont rencontré systématiquement un public large et motivé.
Les professionnels des secteurs du cinéma et de la télévision
plébiscitent aussi ces programmes nouvelle génération, alors que
leurs diffuseurs naturels les boudent !
Pour
qu'une économie se constitue et se développe, l'argent doit circuler,
de façon dynamique et pertinente. Abonnement ou publicité, les
fournisseurs d'accès et les portails, qui en sont les émanations,
gagnent de l'argent et déclarent tour à tour des bénéfices. Ils
confisquent malheureusement toutes ces recettes sans vraiment
les redistribuer aux éditeurs de site et aux producteurs. Wanadoo
déclarait par exemple sans ciller qu'elle consacrerait zéro euro
cette année à l'achat de contenus. Paradoxalement, ce même fournisseur
vante l'ADSL dans ses campagnes de pub en promettant des contenus
audiovisuels mirifiques.
On
le voit, cela ne nous mène nulle part.
En
s'inspirant du modèle de l'audiovisuel classique, l'association
des Webproducteurs a donc décidé de proposer qu'un pourcentage
du chiffre d'affaires des fournisseurs d'accès aille alimenter
un fonds d'aide à la production de contenus internet. Le système
a fait ses preuves. Nous avons encore une industrie cinématographique
et un tissu d'entreprises de production télévisuelle parce que
la redistribution et l'incitation à l'investissement ont été mis
en pratique, en responsabilisant les salles de cinéma et les chaînes
de télévision. Ce système a profité à tous.
Les
Webproducteurs pensent que l'Internet français a besoin d'une
logique économique et que celle-ci dépend tout à la fois des producteurs,
des éditeurs et des fournisseurs d'accès. Il relève de notre responsabilité
à tous que l'internaute en ait enfin pour son argent. .
Phil
Ox
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