Management   Solutions   Emploi   Développeurs
 
 Linternaute   Journal des femmes   Copainsdavant 
 
 Séminaires   Evenements   Etudes 
Abonnements
 
RECHERCHER
 ANNUAIRES  Sociétés  Prestataires Carnet  Encyclopédie Progiciels Formations Fonds VOTRE HIGH TECH  Guides  Livres Prix Téléchargement 
 Tribune

Musique : je proclame l'alerte sanitaire!
par Yves Riesel,
Fondateur et directeur d'Abeille Musique.

 
          
 
En savoir plus

"Qu'est-ce que vous aimez sur le Net?" Le Journal du Net posait cette question dans une interview en octobre 1999 à Eric Tong Cuong, aujourd'hui président de la filiale française de la major EMI, mais qui était alors l'un des pères du label indépendant Naïve, tout juste créé. Il répondait : "La musique. Naïve, c'est le projet de toute ma vie, j'y ai mis toutes mes économies, c'est ma passion. Ce qu'on va essayer de faire avec le site de Naïve, c'est ça, un contenu éditorial un peu plus sympa. (...) Sur le Web, c'est quand même plus facile, plus libre."

Lire cela avec le recul, puis les déclarations du même, quatre ans plus tard, au journal "Le Monde" selon lesquelles "L'Internet libre, c'est du marketing américain, issu de l'ultra libéralisme" démontre cruellement à quel point les professionnels de la profession se sont trompés avec Internet. Et combien ils semblent encore prêts à tout, sauf à se remettre en question valablement. Au cours des dernières années, de surcroît, les incertitudes des stratégies internationales des majors, les tentatives d'alliances, la tendance baissière de leur capitalisation ne facilitaient pas la tâche des responsables opérationnels locaux, cantonnés à l'immobilisme et qu'on sentait sans doctrine, parce que sans consignes face aux enjeux vertigineux d'Internet, la prolifération du téléchargement et des graveurs.

Les éminences du disque ont pourtant fait semblant de s'y intéresser parce que c'était dans l'air du temps. Mais leurs sites sont le plus souvent restés longtemps inadaptés, sans usage réel. Plus grave, l'appropriation d'Internet par les entreprises musicales a été nulle en interne, pardon de le dire. Le questionnement sur l'utilisation du nouveau support, inexistant. La routine, toujours : on bourre les magasins, de n'importe quoi, et on soutient par la télé et les attaché/es de presse.

Culture major
Ce n'est pas, pourtant, que nous professionnels n'ayons pas été prévenus du combat qu'il allait falloir mener. Nous l'avons été très tôt (je me souviens par exemple des propos éclairants de Jay Berman de l'IFPI, en 1999) ; et nous avions le temps de nous retourner. Mais existait et existe encore, bien ancrée dans l'industrie de la musique enregistrée, une culture "major" qui transpire bien au-delà des compagnies dites "majors" et qui est avant-tout une culture commerciale de l'arrogance, du mépris de l'amateur de musique, et du conservatisme. Ce que n'importe quelle industrie secouée par l'arrivée d'un élément propre à bouleverser le paysage de son métier aurait pris en compte et tenté de comprendre, le métier du disque, du haut de sa morgue, ne l'a pas fait.

L'avènement de la mass-consommation, promue reine en musique, la séparation du commercial et de l'artistique dans les maisons de disques, la disparition de l'accueil dans les magasins ont écrasé sous leurs impératifs les répertoires musicaux les plus délicats, et aboutissent maintenant à la panne sèche. Et on nous annonce maintenant la mort du support physique ! Quand, je sache, rien ne saurait aujourd'hui remplacer sa fonction première et pratique, qui est de commercialiser le travail des producteurs, d'une manière propre à leur permettre de toucher des revenus légitimes de leur travail, et à offrir ce travail au plaisir des amateurs sous une forme pratique. Le Ring de Wagner n'est pas aussi adapté au téléchargement que les trois minutes du dernier succès de Carla Bruni.

Pour autant, faut-il être malheureux comme ces consommateurs appauvris et frustrés - ou cynique, comme ces opérateurs téléphoniques et providers dont la communication sur la musique gratuite est un scandale -, pour ne pas admettre que tout coûte et se paie, la musique comme les croissants du matin. Ou alors, il n'y aura plus de musique. Ou alors, la musique deviendra (mais Schönberg et George Antheil auront peu de chances d'être retenus !) le satellite promotionnel d'industries variées. Pourquoi la musique est-elle moins défendue par les belles âmes culturelles que l'industrie du logiciel ou la littérature ? Quelle levée de boucliers ne verrait-on pas si ces industries culturelles étaient l'objet des mêmes attaques de leurs droits fondamentaux !

Manque de souffle
Parce que le show-business mérite sa réputation, peut-il concevoir autre chose que la consommation de masse ? Pouvait-il même envisager, tenter d'appréhender, ce qui semble la première vertu d'Internet, cette relation rendue plus riche et plus féconde entre l'usager et le producteur ? Voyez l'usage balbutiant qui a été fait par les producteurs phonographiques d'Internet depuis quatre ans : quel manque de souffle, d'engagement ! Ils devront maintenant y avancer à coups de trique, mais à quel prix…

Le prix des conneries des majors, ce sont les producteurs de musique créatifs qui le paient déjà aujourd'hui, par un désastre dont les prochains mois nous diront quelle est l'ampleur véritable. Je proclame l'alerte sanitaire. Ce sont par exemple les éditeurs de disques classiques acculés à la faillite par les adeptes acharnés des schémas dominants qui, en même temps qu'ils ne voyaient pas venir la révolution de l'usage, appauvrissaient l'offre et, complices de la chaîne dominante du marché français, concentraient leurs efforts sur la musique de consommation la plus vulgaire - on pardonnera plus facilement aux hypermarchés d'avoir fait de même : ils sont moins prétentieux.

La page blanche qui est à écrire, et sur laquelle on lira un jour ce que sera devenue la pratique sympathique de produire et d'écouter de la musique enregistrée, et le modèle économique de cette pratique, à qui voulez-vous la confier ? À France Telecom ? Aux brillants acteurs des majors et assimilés, bergers avisés qui nous ont déjà amenés où nous sommes ? Bon courage ! La production de musique enregistrée restera une activité, une industrie à part entière parce que la musique est un métier très différent du téléphone ou de l'informatique. Confiez-la à AOL, vous voyez le résultat. Une industrie musicale autonome peut seule garantir que des moyens sérieux et professionnels seront mis à la disposition de nouveaux artistes - les partisans de l'auto- production ne vont pas loin généralement. Comment faire ? En donnant à la musique les moyens de vivre. La musique gratuite, c'est comme le mobile gratuit : vous serez interrompus par la pub. On peut vouloir autre chose, dans la vie, que le brouet du prime time.

[yves@abeillemusique.com]

Tribune publiée le 24 septembre 2003.
 

Toutes les tribunes du JDN

  Nouvelles offres d'emploi   sur Emploi Center
Chaine Parlementaire Public Sénat | Michael Page Interim | 1000MERCIS | Mediabrands | Michael Page International


Dossiers

Marketing viral

Comment transformer l'internaute en vecteur de promotion ? Dossier

Ergonomie

Meilleures pratiques et analyses de sites. Dossier

Annuaires

Sociétés high-tech

Plus de 10 000 entreprises de l'Internet et des NTIC. Dossier

Prestataires

Plus de 5 500 prestataires dans les NTIC. Dossier

Tous les annuaires

Nos autres sites Société | Contacts | Publicité | PA Emploi | Presse | Recrutement | Tous nos sites | Données personnelles
© Benchmark Group, 69-71 avenue Pierre Grenier, 92517 Boulogne Billancourt Cedex