Navire à propulsion : Syroco et OBS surfent sur l'IoT pour battre les records de vitesse

Navire à propulsion : Syroco et OBS surfent sur l'IoT pour battre les records de vitesse Les deux partenaires analysent les vents, grâce aux capteurs IoT disposés sur leur prototype, pour optimiser l'efficacité énergétique des solutions pour les navires.

S'il y a bien un projet dans lequel l'IoT soulève un vent d'enthousiasme, c'est dans l'étude des vitesses de navire sans moteur. Le laboratoire d'innovation français dédié à la décarbonisation du transport maritime Syroco s'est associé à Orange Business Services (OBS) pour dépasser les 150 km/h avec un navire à propulsion à base de vent. L'optimisation de l'utilisation de la ressource passe par la mesure précise des vents pour parvenir à une analyse prédictive à court terme à l'aide d'algorithmes. C'est à ce niveau que l'IoT fait son entrée.

"Pour ce projet précis, nous ne pouvions pas utiliser une solution sur étagère", précise Yves de Montcheuil, cofondateur de Syroco en charge de la stratégie produit et marketing. Ses équipes ont pris contact avec celles d'OBS et ont commencé à travailler sur le sujet en novembre 2020 pour concevoir un prototype de la solution. Cette dernière comprend une demi-douzaine de capteurs (anémomètre, capteurs de température, d'humidité, etc.) mesurant la direction et la vitesse du vent, couplés à un hub embarquant de l'intelligence artificielle en edge computing.

La solution comprend entre 6 et 8 capteurs pour analyser les vents. © Syroco

Les capteurs communiquent leurs données en cellulaire, "l'option la plus simple pour avoir du temps réel et une bonne couverture, quel que soit l'endroit où le prototype, puis les navires, seront déployés", indique Solène Verdier, customer success manager chez OBS dans l'équipe Sud-Est. "Les capteurs sont prêts pour utiliser de la 5G car le temps réel et une faible latence sont indispensables", explique pour sa part Guillaume Chabas, directeur innovation & partenariats chez OBS.

L'analyse de ces données est effectuée par Syroco, sur sa plateforme logicielle. Les datas alimentent ainsi en temps réel le jumeau numérique du navire, embarqué à bord et développé dans le cloud d'Orange pour simuler le comportement de son pendant physique et améliorer son efficacité énergétique. "L'expertise de Syroco nous a été indispensable pour définir les bons modèles de données. L'échantillonnage des algorithmes a été particulièrement complexe. Nous pensions que certaines données étaient hors contexte, voir des erreurs de nos capteurs (rafale de vents, intensité, …) alors que ce n'était pas le cas", raconte Guillaume Chabas, qui a participé à la conception de six prototypes avant la version actuelle.

La prochaine cible : les bateaux de commerce

Les deux équipes en sont encore en phase de test. L'expérimentation d'un prototype radiocommandé, après de premiers essais en Camargue, est en cours dans la rade de Marseille. "Les premiers résultats sont positifs, nous pouvons déterminer grâce au dashboard la fenêtre de tir pour bénéficier de la vitesse maximale", se réjouit Guillaume Chabas. Les 150 km/h n'ont pas encore été atteints mais le cofondateur de Syroco ne doute pas d'y parvenir prochainement. "Les variations saisonnières de la météo offrent des jeux de données idéaux pour les modèles d'apprentissage", confie Yves de Montcheuil. Il se laisse jusqu'à la fin de l'année avant de lancer l'industrialisation de la solution et de tenter de battre le record de vitesse à l'été 2023.

"La propulsion permet de réduire de 20% la consommation de carburant"

L'aventure ne s'arrêtera pas là. Au-delà du défi sportif, Yves de Montcheuil entend servir l'industrie par son innovation. L'objectif est d'améliorer les performances de fonctionnement à destination des bateaux de commerce (porte-conteneurs, pétroliers, etc.). "Les transporteurs ont des objectifs fixés par l'ONU de réduction de 50% leurs émissions de CO2 d'ici 2050", rappelle-t-il. L'armateur CMA-CGM notamment utilise les jumeaux numériques de Syroco pour modéliser la pertinence de l'installation de solutions de propulsion à voile sur les porte-conteneurs. "Un premier résultat : cela réduit de 20% la consommation de carburant", fait savoir Yves de Montcheuil. L'intérêt est également manifeste pour les petits bateaux à hydrogène, "qui réduisent pour leur part de 25% l'emport de batterie et par conséquent le poids du bateau".

Autre perspective d'usage : la préparation des Jeux Olympiques de Paris 2024 (Marseille accueillera les épreuves de voile), pour lesquels la connaissance des conditions atmosphériques des deux étés précédents est indispensable. "L'un des principaux sponsors des régates est Oracle, ce qui montre que la donnée est un enjeu", souligne Guillaume Chabas. En attendant, les deux équipes de Syroco et d'OBS se battent contre vents et marées pour mieux comprendre en temps réel les modèles de vent dans la rade de Marseille.