Chatbots : en route vers l'industrialisation !
Plusieurs éléments indiquent que les agents conversationnels vont occuper une place prépondérante dans la transformation de la relation client. A condition, d'en saisir toute l'ampleur.
L'année 2017 a vu se multiplier les expérimentations autour des chatbots et des services conversationnels, il est temps pour de nombreuses entreprises d'établir un premier bilan. Les résultats ont pu être décevants, ou au contraire prometteurs. Malgré ces premiers tâtonnements, plusieurs éléments indiquent que cette nouvelle interface - la conversation - va occuper une place prépondérante dans la transformation de la relation client et des entreprises. A condition, d'en saisir toute l'ampleur.La réflexion stratégique : une nécessité dès la phase d’essai
Bien que démocratisés par Facebook, les chatbots ont surtout été portés par l’essor des applications de messagerie - 3 milliards d’utilisateurs quotidiens - et du canal de chat pour la relation client, et la façon de communiquer plus immédiate et naturelle qu’ils apportent. Pour bénéficier de cet engouement initial, de nombreuses marques se sont lancées dans des projets autour du conversationnel. Elles ont souvent cru qu’il suffirait d’investir rapidement dans ces nouveaux canaux pour attirer des millions d’utilisateurs, et que l’intelligence artificielle, dont on a considéré un peu vite que les chatbots étaient la face visible, allait résoudre tous les problèmes liés à la relation client – parcours, rétention, fidélisation. Le design conversationnel, encore nouveau et peu pratiqué, n’a pas non plus fait l’objet d’une réflexion poussée. Résultat : de nombreuses équipes ont élaboré des preuves de concept, ou POC (proof of concept) de chatbots sans y affecter les ressources financières et humaines suffisantes ni penser en amont les usages en fonction de la réalité. Si les POC ont pour but de définir les besoins en compétences et en technologie, il est vital de nourrir une réflexion approfondie sur leur audience et leur utilité pour les clients. Au demeurant, parmi les 200 000 chatbots annoncés sur Messenger, rares sont ceux qui ont trouvé leur cible.
L’avènement des chatbots de deuxième génération
En abordant les chatbots uniquement par le canal, on prenait ainsi le risque de laisser de côté l’atout principal des chabots : l’interface conversationnelle. La première génération de chatbots a repris les codes qui prévalaient dans les applications mobiles : parcours guidés, interfaces non conversationnelles - boutons, images, etc., capacité limitée ou inexistante à reconnaître les besoins de l’utilisateur exprimés en langage naturel. Au contraire, les chatbots de 2e génération mettent l’accent sur ces aspects. Ils comprennent plusieurs centaines d’intentions de l’utilisateur (et non plus seulement quelques unes), sont capables d’exploiter le contexte des conversations pour fournir une réponse adaptée (au lieu de répondre toujours la même chose), et permettent des conversations flexibles autorisant les digressions, les changements d’avis, les intentions multiples exprimées par un utilisateur dans un même message. Ces chatbots sont bien sûrs beaucoup plus prometteurs - 80% des entreprises utiliseront les chatbots pour les interactions clients d’ici à 2020 et généreront 8 milliards d’économies pour les services clients d’ici 2020 - mais aussi plus complexes à mettre en œuvre.
Vers l’industrialisationDe très nombreux grands groupes français l’ont compris et ont ainsi tiré profit de leurs premières expériences pour investir plus résolument dans l’interface conversationnelle. Les cas d’usage sont désormais beaucoup mieux orientés vers des services conversationnels à valeur ajoutée et du support, avec des objectifs de retour sur investissement. Les budgets sont beaucoup plus conséquents et les appels d’offres de plus en plus informés et exigeants. Des centres de compétences sont créés autour des chatbots - qui regroupent designers, chefs de projets, développeurs, spécialistes du support et de l’expérience client. Dans certaines entreprises apparaissent même des « usines à chatbots », qui visent à développer des dizaines de projets, internes et externes, avec une même exigence de qualité. Les projets de chatbot sont poussés par les métiers, mais supervisés et validés par les DSI. Le choix des bonnes technologies devient central, pour peu que l’on s’inscrive dans une logique de plateforme et non plus d’expérimentations isolées.
Miser sur des solutions interopérables et évolutives
Pour réussir la phase d’industrialisation, il faut donc davantage privilégier les technologies de développement de chatbot ouvertes et versatiles, adaptables aux logiques métier de chaque entreprise. Leur potentiel se mesure également à l’interopérabilité naturelle avec les architectures existantes, afin que les chatbots soient connectés aux solutions CRM, aux back-offices et aux plateformes de support ou de ticketing. Les technologies doivent également répondre aux contraintes croissantes de sécurité et de confidentialité des données. Enfin, il faut aussi viser l’évolutivité car la technologie conversationnelle est amenée à évoluer rapidement. Au sein des entreprises ou des ESN (entreprises des services du numérique), il est temps que les équipes s’approprient la modélisation des conversations, les données d’entraînement et le traitement du langage naturel, plutôt que de confier ces tâches essentielles à des solutions dites « boîte noire » dont on ignore le fonctionnement.
Les entreprises se tournent donc déjà vers des solutions de développement de chatbots plus ouvertes - voire parfois open-source - et modulaires. Les plus ambitieuses, déjà nombreuses, sont désormais en train d’adopter une logique de plateforme pour le développement de chatbots, en se dotant de moyens humains, financiers et techniques conséquents. Elles se préparent résolument à entrer dans l’ère de la conversation.