Développer l'intelligence du cœur des dirigeants pour gagner en lucidité face à l'IA
L'IA est un sujet d'intérêt majeur pour les dirigeants. Mais le manque d'informations les pousse souvent à un usage sans discernement des algorithmes, réduisant les capacités sensibles de l'humain.
Face à la vague exponentielle des technologies d’intelligence artificielle, il n’est pas simple pour le dirigeant de prendre du recul pour s’informer, gagner en discernement et avoir le courage de décider du « juste » usage de l’IA. De fait, une technologie n’est jamais neutre. Que ce soit en raison de ses racines historiques, de considérations géopolitiques, des acteurs dominants qui la commercialisent et la promeuvent, ou encore en raison de ses impacts systémiques – humains, écologiques, politiques.
Des dirigeants entre fascination et répulsion face à l’IA.
Une étude exploratoire publiée par Heart leadership University en juin - réalisée en partenariat avec le Centre des Jeunes Dirigeants - rassemble et croise plusieurs éclairages (entretiens individuels, rapports et sondages, points de vue d’experts, focus groups) afin de contribuer à clarifier la manière dont les chefs d’entreprises de tailles et secteurs variés abordent l’IA.
Les dirigeants oscillent entre fascination par une « IA magique » (d’une praticité et rapidité fulgurantes, et désormais « générative ») et répulsion envers une » IA tragique ».
Ils savent nommer certaines de ses conséquences adverses : perte de pouvoir, perte de compétences, appauvrissement des relations et perte de valeur dans le moyen terme, inégalités paroxystiques et excusions, disproportions entre les montants investis et les bénéfices réels, vulnérabilités et augmentation visibles des cyber-risques.
Cependant les travaux menés dans ce cadre montrent une attitude affichée des dirigeants relativement favorable à l’IA, globalement vue comme une source d’opportunités.
L’IA appauvrit les capacités sensibles de l’être humain et uniformise la pensée.
Si l’IA utilisée sans discernement engendre des prises de décisions guidées par une machine, incapable de modéliser un monde volatil (peu prédictible), son usage abusif a également des impacts sur les capacités sensibles de l’être humain et sur son libre-arbitre.
L’un des dirigeants interrogés dans un focus groups de l'étude exprime une conviction comme ceci : « A partir du moment où l’IA brasse de la data et a tendance à converger vers la moyenne, on va progressivement écarter les extrêmes, c’est-à-dire les pensées divergentes, les idées naissantes, et potentiellement, tuer l’innovation à moyen terme. Cela supposerait d’être capable d’exercer une pensée critique dans l’usage de l’intelligence artificielle, or la pensée critique est déjà le parent pauvre des compétences dans l’entreprise ».
L’IA entraine également mécaniquement, d’après nos travaux, un excès de rationalisation (incluant des biais), une perte de confiance dans son intuition, une déresponsabilisation derrière la data, une difficulté à remettre en question le progrès technologique, une suppression ou automatisation de la relation ou encore une censure des émotions.
L’intelligence du cœur : intuition, courage empathie, pour un juste usage de l’IA
L’usage de l’intelligence du Cœur, défini par l’alliance de trois aptitudes humaines que sont l’intuition, le courage et l’empathie, permet au dirigeant de ne pas devenir otage ou suiveur de l’IA mais à en garder la maitrise grâce à sa lucidité et son discernement.
En effet, l’intuition aide de naviguer en temps de crises, complète l’approche analytique de la décision et identifie des signaux fiables (relationnels et prospectifs). Le courage permet d’affirmer des choix humanistes, de ne pas suivre obligatoirement la recommandation de la machine et de voir la réalité de l’IA en face (aspects matériels, enjeux géopolitiques...). Enfin, l’empathie préserve des relations de qualité et de confiance avec les parties prenantes, aide à prendre soin du vivant et à porter son attention à l’humain face aux bouleversements des métiers. Trois capacités humaines essentielles, menacées aujourd’hui par l’IA, mais qui sont notre plus grande richesse face aux algorithmes.
L’intelligence du cœur fera la différence à l’ère de l’intelligence artificielle.